«Qui n'a pas de tempérament n'est pas digne de faire des tableaux», écrit le poète et critique d'art français Charles Baudelaire, dans le salon de 1846. Du tempérament, ce n'est pas ce qui manque à l'artiste peintre Aïcha Ibrahim. De la fougue, de l'abondance, de la générosité, de l'énergie, dans le dessin et dans les couleurs. Sa dernière exposition Origines, qui se tient à la galerie Bel Art d'El Menzah 6 depuis le 25 février jusqu'au 13 mars, est une véritable explosion de couleurs, de matières et de sujets. Richesse d'inspiration, la nature et la création se conjuguent au féminin. Un foisonnement de couleurs, de motifs, qui s'imbriquent, s'interpénètrent dans une vision surréelle où les objets insolites se côtoient, se bousculent, où l'imaginaire débridé s'en donne à cœur joie et à cœur ouvert. Un imaginaire hanté par des visages de femmes, des femmes encerclées dans des matrices et matrices elles-mêmes, baignant dans un espace nourricier originaire, marqué par deux symboles dominants : l'œil et le poisson. Toute une cosmogonie surgit : la lune, le soleil, la mer, la terre. Une faune et une flore, un univers naturel qui s'ouvre sur la magie et les mystères. L'invisible rendu visible, manifeste à travers des formes et des couleurs. Peindre devient un acte mystique où l'artiste rencontre l'autre moi inconscient, enfoui, et s'élève par degrés à un savoir occulte sur soi et sur le monde, par une vision qui embrasse l'un, le monde visible dans le multiple. Les couleurs vivent dominent‑: vives et violentes dans leur contraste. Un certain rouge domine et provoque le noir, le vert, le bleu, le jaune… Toute la palette du peintre voyage des couleurs fondamentales aux couleurs travaillées, recherchées. Et puis… de la matière. Certaines pièces passent pour un ouvrage de tapisserie. L'artiste travaille aussi en relief, sur du bois, avec une technique mixte, un mélange de sable, d'acrylique et d'autres matières. Un second volet de cette exposition, non moins attirant, se présente avec une série de dessins, quelques portraits et scènes de la vie quotidienne, desquels la couleur absente est remplacée par l'expression allégorique des visages ou du mouvement. C'est sous le signe de la diversité des techniques et des formes d'expression plastiques que l'artiste expose cette quête originale des «Origines».