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E pour Evasion (La Grande, bien sûr !)
Opinons - Lexique révolutionnaire à l'attention du Premier ministre
Publié dans La Presse de Tunisie le 12 - 05 - 2011


Par Yassine Essid
Le monde ne sera pas détruit par ceux qui font le mal, mais par ceux qui les regardent sans rien faire. Einstein
Le phénomène d'évasion des prisons tunisiennes vient de connaître une très grande ampleur après la nuit du 14 janvier 2011, car les chiffres sont impressionnants. Plus de 12.000 criminels se sont fait la belle et la liste ne cesse de s'allonger. Dans ce domaine on a fait bien mieux que la prise de la Bastille qui ne comptait le soir du 14 juillet que sept prisonniers: quatre faussaires, deux fous et un noble enfermé à la demande de sa famille. Nos évasions massives, à susciter l'effroi et qui surviennent désormais à intervalles réguliers, n'ont pas l'air de provoquer un émoi particulier auprès des autorités et une campagne « portes ouvertes » des prisons, dûment organisée, n'aurait pas rencontré plus vif succès.
Car au fait, à quoi servent les prisons? N'est-ce pas à veiller à ce que les délinquants ne constituent pas une menace ou un danger pour autrui ? Aussi sont-elles cruciales pour la sécurité humaine et la sûreté publique. Bien que portée aujourd'hui tout spécialement à l'attention du public en Tunisie, dans la mesure où comptent parmi ses pensionnaires des personnalités de renom, cette institution n'a pas reçu des gouvernements de transition l'intérêt qu'elle mérite. Il faut avouer  qu'ils avaient d'autres priorités comme l'emploi, le développement régional et, depuis les événements de Libye, l'accueil des refugiés et la défense du territoire gravement menacé. Par ailleurs, il est rare de voir le public se mobiliser pour les prisons, ayant généralement une perception négative des détenus et une vision assez étroite des finalités de l'emprisonnement. Il faut dire que depuis que le clan Ben Ali et l'ex-équipe de ses « responsables » y sont à demeure, on privilégie surtout la sanction à la réinsertion.
Il ne suffit pas de condamner une personne à une peine d'emprisonnement, il faut aussi, pour la maintenir en captivité, des mesures visant à l'empêcher ou la dissuader de s'échapper. Des systèmes et des procédures sont ainsi mis en place pour prévenir des évasions, incendies, prises d'otages, suicides, meurtres ou violences entre codétenus, exigeant des plans d'urgence qui nécessitent d'être élaborés par avance. Ce sont les condamnés à de lourdes peines qui sont généralement les plus motivés à vouloir s'évader, et c'est eux qui sont susceptibles de constituer une plus grande menace en termes d'évasion, car ils ont le sentiment qu'ils n'ont rien à perdre et ne se résignent donc jamais face à l'adversité offerte par les murailles et les fers. Ils recherchent toujours avec persévérance une voie de sortie sans jamais se décourager, faisant souvent preuve d'intrépidité, d'endurance inlassable et d'ingéniosité. Le lieu confiné devient alors favorable à la gestation d'un plan.
Jusqu'à une certaine époque on s'évadait par habileté ou par supercherie, en passant par-dessus le mur de la prison, en sortant par une fenêtre après en avoir limé les barreaux, méthode Dalton, en revêtant des vêtements étrangers, en trompant la surveillance des gardiens, en nouant les draps du lit pour se glisser le long du mur d'enceinte.   Il y avait aussi le très romanesque creusement des tunnels. Une technique fastidieuse qui exige une performance physique et des efforts aussi gigantesques que nécessairement méticuleux et secrets pour tromper la vigilance des gardiens, sans compter les problèmes de logistique, ne serait-ce que le fait de se débarrasser de la terre sans attirer l'attention. Tout ceci pour un résultat souvent incertain.
Pourtant et malgré le progrès des technologies de surveillance et la sécurité croissante des établissements pénitentiaires, censées rendre les évasions quasi irréalisables, les vielles ficelles pour se faire la belle n'ont jamais été abandonnées. Dans le film Les Evadés, ou À l'ombre de Shawshank, Norton découvre que l'affiche sur le mur de son compagnon de cellule cache en fait l'entrée d'un tunnel qu'il a creusé pendant 19 ans à l'aide d'un taille-pierres. La réalité rejoint la fiction en 2005 lorsque Charles Victor Thompson s'est évadé d'une prison texane en se faisant passer pour inspecteur de l'Etat venu inspecter les lieux.  Il avait caché des habits civils et s'était servi de sa carte de détenu en la montrant en un éclair pour passer les gardes. Le 9 mars dernier un prisonnier du Texas, David Puckett, s'est fait la malle en sciant les barreaux de la cour de sa prison. D'autres évasions paraissent plus spectaculaires justement parce qu'elles recourent à des méthodes désuètes. Ainsi en 2006 le criminel américain, Ralph "Bucky" Phillips, s'est servi d'un ouvre bouteille pour creuser un trou dans le plafond de la cuisine de sa prison. Singulier profit tiré d'un outil minuscule a priori insignifiant. L'issue ouverte, il n'a plus eu qu'à courir en toute liberté avant de se faire rattraper. Bien que jugé anachronique, le procédé consistant à creuser un tunnel à partir de sa cellule prouve encore son efficacité. Près de 500 talibans se sont évadés de la prison de Sarposa à Kandahar après avoir passé 5 mois à creuser un tunnel, de folle ingéniosité, long de 360 m. à partir de leur cachot. Ils avaient même réussi à vendre la terre qu'ils avaient retirée des galeries. Enfin, avoir des soutiens hors de la prison est aussi une condition indispensable pour une escapade réussie. Pascal Payet s'est évadé par les airs en 2001 de la prison de Luynes. Ses complices avaient volé un hélicoptère pour le hisser hors de l'enceinte de la prison. De même que Lesley Deckers, la petite amie du malfaiteur Mohamed Johri, qui avait loué un hélicoptère pour permettre à celui-ci et deux autres détenus de la prison de Bruges de s'évader. Mais là on entre dans le domaine des entreprises d'évasion rocambolesques et fort coûteuses.
Les prisons tunisiennes ont surpassé en ce triste palmarès et en imagination tous ces exploits, faits divers, ou fictions confondus. Un adage arabe ancien ne dit-il pas que la ruse suprême consiste à se délester des ruses ? Et c'est alors qu'on opte pour l'évidence, le degré zéro de l'ingéniosité. Pour ceux qui n'ont qu'une culture occidentale, qu'on se souvienne de La Lettre Volée d'Edgard Poe : une lettre, compromettante pour l'honneur de l'épouse du roi, a tout simplement été ‘cachée' en face du mari trompé sur sa table de travail. Ainsi, le seul lieu où l'on innove vraiment de la sorte, c'est l'évasion simple qui, affranchie des circonstances de bris, de violence, de chantage ou de prise d'otage, n'entraine aucune sanction.
En matière de chiffre aussi, on a fait mieux que bien des pays. Seulement 2512 prisonniers évadés en 2008 aux Etats-Unis pour une population carcérale de 1.4 million. Dans les prisons fédérales, les évasions sont encore plus rares. On compte une seule évasion en quatre ans pour une population carcérale de 115.000 détenus.
Voilà donc que les prisons tunisiennes ne font plus peur à personne. Les prisons suisses non plus me diriez-vous, mais pas pour les mêmes raisons. Dans les prisons suisses, les cellules sont transformées en résidence de luxe, avec tout le confort. Les prisons tunisiennes sont tout simplement ouvrables comme le jour du même nom, dont le prisonnier mis à l'ombre justement est censé être privé.  Les détenus ont-ils vu une porte, rendue ouverte par leurs codétenus, ou par la négligence de gardiens ? Qu'à cela ne tienne. Ils l'empruntent allégrement. Qu'importe qu'ils aient connu à l'avance les tentatives faites pour opérer l'effraction, qu'ils aient conspiré pour la rendre effective, cela ne suffit même pas pour les rendre complices.
Serait-ce ici tout le synopsis de l'histoire récente de nos prisons depuis l'immense évasion de plus de 12.000 criminels au lendemain du 14 janvier ? En même temps que la révolution, la contre-révolution se mettait en place avec une armée d'inconditionnels de l'illégalité avec lesquels nul changement n'est négociable.
Il ne nous reste qu'une seule bonne idée, à nous honnêtes citoyens, peureux et simplement prisonniers de nos chambres, et à la suite des plus récentes virées de près d'un millier de prisonniers qu'on imagine sur les routes, entonnant l'hymne à la joie en guise de méchant clin d'œil à tous les « Printemps » arabes du Bahreïn jusqu'en Mauritanie en passant par le Yémen et Misrata, Place Barcelone ou Marrakech. Il ne nous reste que cette bonne idée que nous osons vous proposer faute de mieux : quitter l'air malsain de tous ces « Printemps » torrides et retrouver dans la pénombre de nos prisons maintenant vides, un semblant de paix de braves.


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