Par Moncef Horchani La situation sécuritaire dans le pays est réellement préoccupante. Tout le monde le sait, tout le monde en parle mais rares sont ceux qui agissent pour y remédier. On se dit de temps à autre que la sécurité commence à s'améliorer mais ce n'est qu'une illusion, des troubles surgissant ici et là pour nous signifier que nous sommes loin de sortir du tunnel. Cette instabilité que traverse le pays depuis l'avènement de la révolution crée parmi la population un sentiment de mal-être, d'angoisse, de peur et suscite beaucoup d'inquiétude quant à l'avenir du pays sur tous les plans. Quand ce déferlement de la violence cessera-t-il ? Personne n'est en mesure de répondre à la question. On ne fait, chaque jour, que constater les dégâts. Sans plus. Tous les prétextes sont bons pour une frange de la population minée par le virus de la contestation pour exprimer haut et fort dans la rue son mécontentement, son hostilité à n'importe qui et à n'importe quoi. Les contestataires, qui font désormais partie du paysage, ne sont jamais à court d'idées, même les plus saugrenues, mais quand une occasion de taille s'offre à eux, telles les déclarations fracassantes de l'ex-ministre de l'Intérieur, ils l'exploitent à fond pour semer de plus belle la terreur dans le pays dont la situation sécuritaire est déjà fragilisée par des mouvements subversifs successifs. En donnant cette interview bizarre, M. Rajhi, au fait de la situation explosive qui prévaut dans le pays, a-t-il mesuré la gravité de son action? Qu'est-ce qui a donné tant de crédibilité à ses déclarations ? Son atout, c'est d'avoir su, grâce au franc-parler et à la bonhomie dont il a fait montre dans des entretiens télévisés, acquérir la sympathie de nombreux Tunisiens longtemps habitués à des discours stéréotypés tenus par des responsables austères. Et c'est précisément cette sympathie qui a donné de la véracité à ses propos. Il n'a pas été piégé comme il l'a laissé entendre car il est difficile, sinon impossible, pour deux journalistes quelconques d'abuser de la confiance d'un ancien ministre de l'Intérieur, magistrat de surcroît. Quoi qu'il en soit, il n'a à tirer aucune fierté de son coup médiatique quand on voit les dégâts énormes qui en ont découlé‑: destruction de biens publics et privés, pillage de boutiques… L'heure est venue de mettre un terme à cette vague d'agitation et de violence qui, inéluctablement, achemine le pays tout droit vers le chaos. On connaît le mode opératoire appliqué par les fauteurs de troubles, il y a lieu dès lors de trouver les moyens appropriés pour y faire face. Ce scénario débute par le rassemblement d'une poignée de personnes venues scander des slogans à propos d'on ne sait quelle revendication. Des voyous s'infiltrent dans le groupe et d'autres se tiennent légèrement à l'écart prêts à entrer en action dès que la manifestation, pacifique au départ, prend une autre dimension. Dans le cas où les forces de l'ordre n'interviennent pas pour disperser les manifestants, ils sont alors soumis à des flots d'injures et une pluie de pierres et de caillasses. C'est alors l'affrontement avec tout ce que cela comporte comme actes de vandalisme. Hommage aux forces de l'ordre On se doit de rendre hommage aux forces de l'ordre pour ce qu'ils font, parfois au péril de leur vie, pour contenir ces manifestations guerrières, et ce, malgré quelques dérapages non intentionnés mais déplorables. Il ne fait pas de doute que les opérations de banditisme s'inscrivent dans une stratégie savamment mise au point et se déroulent avec un encadrement bien rodé et une répartition des rôles minutieusement agencée. Les profits tirés de ces actes varient selon le profil des différents acteurs : l'instauration de l'insécurité dans le pays pour «les maîtres d'ouvrage», des services gracieusement rémunérés pour les intermédiaires, le produit des pillages pour les simples exécutants. L'essentiel n'est pas d'arrêter les casseurs pour nous en montrer quelques-uns à la télé, mais d'identifier et de neutraliser les commanditaires, quels qu'ils soient. Le mystère qui entoure ces forces obscures doit être éclairci au plus vite. Qu'on commence au moins par interdire les manifestations sauvages qui sont la plupart du temps à l'origine des actes de banditisme. Dans tous les pays démocratiques, seuls les partis politiques, les organisations de tout ordre ont le droit de manifester mais ils le font dans un cadre réglementaire strict les mettant à l'abri de tout débordement. Nous ne devons pas faire l'exception, nous qui clamons haut et fort le droit à la démocratie. Il est temps aussi de faire cesser toutes ces grèves sauvages, sit-in, blocages de routes opérés par des individus sans scrupules qui placent leurs intérêts personnels bien au-dessus de celui du pays. Il importe de leur signifier une fois pour toutes que l'économie nationale est au plus bas et que leurs actions, ô combien critiquables, ne font que l'ébranler davantage. La démocratie qu'ils font valoir pour entreprendre ces mouvements de contestation, qui n'ont que trop duré, ne leur donne pas le droit de paralyser l'économie du pays et de porter atteinte à la liberté de travailler de leurs concitoyens. A notre connaissance, l'état d'urgence est toujours en vigueur dans le pays. Pourquoi donc ne pas l'appliquer dans toute sa rigueur, n'en déplaise aux défenseurs des libertés dans l'anarchie. Tous ceux qui portent atteinte à la sécurité et à la stabilité du pays doivent répondre de leurs actes. La révolution ne les autorise guère à transgresser la loi. Dans les mêmes circonstances et sous d'autres cieux, ce sont les tribunaux militaires qui statuent sur le sort de ceux qui portent préjudice à l'Etat. A méditer. Tous les Tunisiens pour qui la Tunisie est tout ce qu'il y a de plus sacré doivent faire bloc contre tous ceux qui s'acharnent à détruire leur pays. Les laisser faire, c'est être leurs complices. Tous les partis politiques, et ils sont nombreux, toutes les organisations de quelque nature qu'elles soient se doivent, dans l'interêt supérieur de la nation, beaucoup plus que de la leur, d'inscrire en priorité la stabilité et la sécurité du pays dans leur agenda. Ils ne peuvent pas observer sans broncher la violence que nous vivons au quotidien ainsi que les mouvements de contestation destructeurs. Pour que vive la révolution. La vraie. Celle des dizaines de nos martyrs.