Un samedi après-midi très chargé pour l'élite de Sfax qui a choisi de débattre du développement régional dans le cadre d'un séminaire qui a regroupé bon nombre d'universitaires, en présence de personnalités de la région, de deux membres du gouvernement provisoire et du gouverneur de la région. Présidée par M. Mansour Moalla, ex-ministre de la Planification et des Finances, cette rencontre est à l'initiative du Collectif de réflexion et d'action citoyenne, l'Association Beït El Khebra, Forum d'action et de développement à Sfax, l'Association Challenge, le Réseau d'appui à la compétitivité de la région de Sfax et le Forum de développement de Sfax. Depuis longtemps, cette ville a été à la recherche d'un meilleur positionnement au niveau régional et national. Historiquement tournée vers la mer, Sfax, deuxième centre urbain du pays depuis 1830, a toujours revendiqué le statut de métropole. Toutefois, elle n'a pas su jouer son rôle donnant l'image d'une ville qui a accusé des retards, notamment sur le plan économique, durant les 23 dernières années. L'absence de toute forme de démocratie locale et participative a été à l'origine d'une gouvernance déficiente nourrie par un discours politique méfiant de tout pouvoir régional ou local. L'universitaire Ali Bennasr, qui a donné une conférence portant sur «L'aménagement urbain : métropolisation et gouvernance de Sfax», ne mâche pas ses mots : «L'Etat n'a jamais permis à Sfax de devenir une vraie capitale du Sud». Pire encore, la deuxième ville du pays n'a bénéficié que de moins de 4% de l'ensemble des investissements directs étrangers ! Si la ville a su préserver une certaine prospérité économique, c'est grâce notamment aux investissements privés qui ont relativement comblé le «vide» en matière d'investissements publics. Sur le plan social, cette ville a toujours souffert d'une marginalisation à l'origine de l'accroissement rapide du taux de chômage, notamment parmi les diplômés du supérieur. En l'absence d'un modèle de développement efficace à même d'encourager la création d'emplois, de préserver l'environnement, le constat est amer : le taux de mortalité à Sfax est parmi les plus élevés à l'échelle nationale, notamment à cause de la pollution. Ainsi, l'accumulation des problèmes de la région devient préoccupante, pour ne pas dire alarmante. Outre les insuffisances structurelles, la ville n'est pas à l'abri de problème sociaux, surtout avec la prolifération des quartiers populaires et spontanés dont la pluparts sont situés dans des zones à risques. L'intégration de ces quartiers dans la ville demeure très faible. Par ailleurs, certains intervenants ont soulevé un problème non moins important en matière de développement régional et local : la ville n'est pas l'expression de sa région. Les six délégations du gouvernorat de Sfax ne suivent pas le même rythme de développement économique et social. Dans certaines délégations, à l'instar d'El Amra, le chômage parmi les diplômés du supérieur s'élève à 50 %. L'appauvrissement de l'entourage de la ville ne fait que freiner un développement socioéconomique qui souffre déjà de plusieurs handicaps. Toutefois, les moyens d'une véritable prospérité économique de toute la région ne manquent pas. Plusieurs créneaux porteurs sont à exploiter, à commencer par le tourisme de santé et de bien-être. La ville est appelée à être un pôle d'attraction méditerranéen en la matière. La révolution du 14 janvier ne peut être que bénéfique pour tout le pays, mais surtout pour Sfax.