Désapointement et sentiment de frustration plus que visible au sein du groupe clubiste en fin de match. Il suffit de voir évoluer le CA pour comprendre que les joueurs sont encore sous le coup de la double désillusion face respectivement à la JSKabylie et l'ASK. Lors du choc CA-ST, les éléments du tout frais Habib Méjri n'ont certes pas eu beaucoup de réussite, mais n'ont pas aussi optimisé certaines qualités de groupe qui ont fait la force du CA jusque-là. Si le club de Bab Jédid peine jusque-là à s'imposer par un score fleuve, il a aussi su puiser dans ses ressources mentales et physiques pour forcer son destin lors du temps additionnel, ce qui confirme ce caractère clubiste assez trempé et cette confiance inébranlable propre aux solides postulants de la compétition. Ce supplément d'âme clubiste, observée tout au long de la saison, le CA, le doit en partie à ce passé qui éclaire le présent, et pour cause, lors des deux derniers excercices, le Club Africain a toujours su accélérer la cadence lors de la dernière ligne droite, détrônant l'Etoile en 2008 et "chipant" le leadership à l'EST après le derby retour de la saison passée. La théorie du retrovisieur, chère à Ben Chikha, avait globalement opéré en ce temps-là, ce qui a, par effet d'entraînement, concourru à entretenir la flamme clubiste. Talonner le leader et lui mettre la pression s'est avérée une stratégie de tout premier ordre, encore faut-il avoir de l'endurance pour ne pas être pris à son propre jeu...Le CA est actuellement sous la menace directe de l'Etoile, son adversaire de demain, cette dernière voulant, coûte que coûte, retrouver la seconde place, synonyme de qualification en ligue des champions, une compétition qui les fuit depuis quelque temps. Une source de motivation certaine pour des Etoilés qui se présenteront en conquérants face au CA. Les coéquipiers de Adel Nefzi, encore groggy par un destin actuel capricieux doivent absolument panser leurs blessures au plus vite, se remobiliser, faire contre mauvaise fortune bon cœur et s'employer à rebondir. Mettre un genou à terre est le destin de tout sportif. Puiser dans ses tripes pour se relever et tenter de riposter en asseignant le coup de grâce, voilà la marque d'un champion. Le CA est un grand club, une institution légendaire qui brasse large et qui touche toutes les couches de la société tunisienne. Le CA doit retrouver ce "fighting spirit" et cette "grinta" qui ont fait de lui un club de défis, de challenges et de chocs. Certes, la décrue clubiste intervient au moment ou le club s'apprète à fêter son 90e anniversaire mais c'est justement là un test grandeur nature pour l'un des doyens du football tunisien et ses précieux supporters. La mobilisation doit être générale autour du club, la contestation ne doit pas se transformer en procès d'intention envers certains et la recherche de boucs émissaires pour d'autres. Encore en lice pour brandir à terme le trophé de Coupe (un titre qui fuit le club depuis un bon bout de temps) et plus que concerné par une place en Ligue des champions, le CA de Habib Mejri doit absolument fermer la parenthèse des contreperformances passés, scruter l'horizon et retrouver sa solidarité et sa cohésion sur le terrain. Inutile de trop focaliser sur la première de Mejri face au ST. L'équipe étant encore dans les "vapes", le staff technique n'a pu que prendre le train en marche et tenter de parer au plus urgent. Dans un contexte difficile, la plupart des joueurs ont quelque peu perdu le goût de jouer face au ST. D'autres (à l'instar de Akrout), malchanceux devant la cage adverse, a été hué, conspué et traité de tous les noms d'oiseaux par les supporters (intolérable à ce stade de la compétition alors que le CA a des engagements importants à tenir à l'avenir!). Bien des choses sont à revoir au sein du CA mais revenons tout d'abord sur l'orientation préconisée en début de partie. Pour un supplément d'âme clubiste... Le duo Mejri-Rouissi n'a pas chamboulé le schéma habituel de l'équipe. Un 4-2-3-1 cohérent, articulé autour de Melliti à la manœuvre, Traoré et Messâadi, les deux inter gauche et droit et Akrout en pointe. A la différence des rencontres passées, Akrout s'est retrouvé esseulé, la plupart du temps, faisant preuve d'abattage, mais jouant dos au but, manquant de soutien et même "orphelin" des longues ouvertures de Oussama Sellami, d'une part, et des centres travaillés de Zouhaier Dhaouadi, d'autre part. Certes, l'avant de pointe clubiste a manqué l'immanquable lors d'un face-à- face avec Rami Jéridi, mais il n'est pas pour autant responsable de la mauvaise négociation des amorçes offensives clubistes. Il faut dire qu'en dépit de l'inefficacité clubiste, il y avait en face, un gardien en état de grâce. Rami Jéridi n'a rien laissé filtré, s'opposant avec brio aux tentatives des Wissem Ben Yahia, Messâadi, Traoré et Akrout. Sachant aussi que le ST dispose de la meilleure défense du championnat, les manœuvres clubistes n'ont pu déboucher sur le gain du match. Notons, finalement, la bonne entrée en matière de Youssef Mouihbi, ce dernier ayant disputé dix minutes de qualité. C'est encourageant et rassurant dans l'optique des prochaines échéances. Lotfi Rouissi en convient en fin de match :" Indépendamment du résultat et de notre manière de jouer, il y a des signes positifs et les prémices d'un redressement. Le retour de Dhaouadi et de Mouihbi donneront plus de tranchant et de force de pénétration. Nous nous présenterons sous notre meilleur visage lors des trois grosses explications, face respectivement à l'ESS, le CSS et l'EST". Un regain d'optimisme qui ne manquera pas d'agir sur le groupe clubiste et de le booster. Les paroles de l'entraîneur-adjoint du CA sont relayées par celle de Mohamed Traoré: " On a manqué de lucidité face au but. C'est frustrant de ne pas gagner quand on joue à domicile, mais on doit absolument se remettre en question, ne pas douter et entamer la prochaine série avec un solide mental . On doit avoir la rage de vaincre et reconquérir notre public". Voilà de quoi pousser le large public clubiste à resserrer les rangs et servir de rampe de lancement à une équipe qui a un besoin pressant de sérénité et d'alchimie de groupe. Patrick Liewig, un stratège... Si le onze de Habib Mejri n'a pas atteint son objectif de victoire, la supériorité (toutefois relative) du club bardolais en première mi-temps, n'est pas en soi un prétexte pour dénigrer et fustiger un CA qui a su par la suite retrouver des couleurs en deuxième mi-temps et prendre le match à son compte. Au cours de ce derby, le Stade Tunisien a débuté la rencontre avec beaucoup d'application et de cœur à l'ouvrage. La source de motivation des Bardolais est à chercher dans cet objectif motivant que représente la quatrième place synonyme de ticket composté à la coupe de la CAF. En technicien averti, Patrick Liewig a anticipé tout scénario préjudiciable pour son équipe. Sachant que le CA devait se racheter, le coach stadiste a adopté un schéma progressif des plus intelligents. Première étape, contrecarrer les "rushs" d'un CA placé dos au mur et décidé à tenter le passage en force lors des dix premières minutes. Secundo, opter pour un jeu court à une touche de balle ou Marouen Tej, Jédidi et les deux pivots, Tombadou et Ba, ont excellé, leurs combinaisons diverses ayant été conclues par un joli but à la demi-heure de jeu. Tertio, changer son fusil d'épaule en situation d'avantage au score, jouer en bloc et être les premiers sur ce que l'on appelle communément " la deuxième balle" en football. Une bonne lecture du jeu du CA, voilà l'apport de Liewig, sans aucun doute l'un des meilleurs techniciens de la Ligue 1. Pronant d'entrée un 4-5-1 souple et modulable, le coach stadiste a aligné trois pivots pour saper les constructions offensives adverses. Tombadou, Kouakou et Ibrahima Ba, s'étant acquittés de cette tâche avec doigté et générosité dans l'effort. Marouen Tej au relais offensif et Jédidi en soutien de Kasdaoui, sont venus compléter une ligne médiane intraitable en première période alors que les reconversions en situation de relance (le 4-5-1 se transformant en 4-3-2-1) et les dédoublements sur les flancs (montées de Chagra et Rhouma) ont permis au ST de bousculer le CA, toujours lors du premier half. Bien qu'ayant accusé le coup à la reprise, le Stade Tunisien a aussi manqué de réalisme et de réussite. Le "finish" a fait défaut, le plat du pied de Kouakou ayant trouvé le poteau de Nefzi...Ce qui a laissé dire à Chagra en fin de partie : "Nous avons été servi par la malchance. Il y avait forcément du K.O. dans l'air en fin de partie. Le CA s'est découvert en vue de doubler la mise, nous le savions et nous avons cherché à allier récupération et relance rapide vers nos deux pointes, Guelbi et Riahi (incorporés en vue de porter l'estocade). Notre vivacité et autre vitesse d'exécution auraient pu nous valoir la victoire. Par la suite, notre défense, articulée autour du duo de l'axe, Zairi-Hosni, a fait preuve de quiétude et de métier. Le nul n'est pas en soi une contreperformance bien que nous étions en mesure de battre le CA". Satisfaction et frustration des deux côtés en fin de match. Le nul est en soi équitable.