Le poste frontalier Wazen-Dhéhiba occupe toujours une importance particulière aux yeux des forces pro-Gueddafi. Elles avaient tout fait pendant les mois précédents pour mettre la main dessus, mais toutes leurs tentatives ont été vouées à l'échec. Plusieurs fois, ces loyalistes avaient essayé de franchir illicitement la frontière, un peu loin du poste, pour contourner les rebelles et les attaquer par derrière, mais l'armée tunisienne les en avait à chaque fois empêchés. Mardi dernier, le ton est monté de nouveau à Dhéhiba et ses environs les plus proches. Un animateur à la télévision libyenne a même mis en garde la Tunisie, allant jusqu'à menacer de bombarder le poste Wazen-Dhéhiba «par où les insurgés se procurent des armes», selon ses présomptions. Mercredi, des roquettes et des obus sont tombés effectivement sur le sol tunisien sans faire de dégâts, fort heureusement. Autrement dit, c'est comme si les troupes de Gueddafi étaient passées à l'action et que les menaces avaient été mises à exécution. L'armée tunisienne était sur ses gardes. Les avions n'ont pas cessé de survoler la région. Des blindés sont arrivés en renfort et l'ambiance est devenue très tendue. Et, depuis, la circulation a diminué dans les deux sens. Vendredi à l'aube, des tirs ont été entendus près de la frontière et, au lever du jour, les avions tunisiens (hélicoptères et F5) ont multiplié les patrouilles, exécutant parfois des acrobaties. «Les provocations des hommes de Gueddafi se poursuivaient, ainsi que les explosions», nous dit Kilani, membre de l'association de fraternité pour l'accueil des réfugiés, toujours présent sur les lieux et qui ajoute : «D'après nos forces, entre gendarmes et militaires, postées en première ligne, “des frictions” ont bien eu lieu mais nos hommes ont gardé leur sang-froid et n'ont pas riposté». Du côté de Ras Jédir, la situation est beaucoup plus calme, à l'exception de l'incident survenu jeudi, lorsque des forces loyalistes ont enlevé un bienfaiteur libyen bien connu; événement qui a généré des conflits verbaux entre les deux clans, à Ben Guerdane et à Zarzis. Sinon, la circulation a repris dans les deux sens et le nombre de ressortissants a augmenté, atteignant les 7.000 en 24heures. «La situation est vraiment tendue. Rien n'est clair. Ma famille et moi avons décidé de venir en Tunisie pour passer le mois de Ramadan dans la paix et le calme», nous dit M. Mustapha B.Z, qui arrive de Zouara.