PARIS (Reuters) — Le succès de la prime à la casse n'a pas empêché la production française de voitures particulières de chuter d'un quart en 2009 et la baisse devrait se poursuivre en 2010, estiment les experts du Crédit agricole. Dans ses perspectives sectorielles publiées hier, la banque verte voit la production en volume reculer encore de 5% par rapport au bas niveau de 2009. En 2008 déjà, la production de voitures avait chuté de 19% en France, conséquence de la délocalisation vers l'Europe de l'Est de la fabrication de petits modèles. Ce même phénomène conjugué à un mouvement de déstockage massif explique la baisse de 25% de la production en 2009. La prime à la casse mise en place au début de l'année a permis un bond inespéré de 11% des immatriculations sur l'ensemble de 2009, à plus de 2,3 millions d'unités. Les constructeurs français en ont profité pour améliorer leurs parts de marché grâce à la bonne tenue de leurs petits modèles comme la Peugeot 207, la Citroën C3, les Renault Clio ou Twingo — mais tous sont produits hors de France. «La prime à la casse a permis de sauver les immatriculations de 2009 mais elle a surtout concerné les petites voitures fabriquées en Europe de l'Est», a expliqué Gilles Frécault, de l'équipe des études industrielles et sectorielles du Crédit agricole, lors d'une présentation à la presse. Ces voitures ont été vendues à des gens qui, autrement, auraient acheté d'occasion, ce qui a eu un effet pervers sur le marché de l'occasion, ou à des personnes qui ont anticipé un achat prévu ultérieurement. Du fait de ces achats anticipés, Gilles Frécault prévoit un reflux de l'ordre de 10% des immatriculations cette année. Effet permanent ? Soucieux d'éviter un effondrement du marché comme en 1997 après la suppression de la prime à la casse d'alors — les ventes s'étaient écroulées de 20% — le gouvernement a opté pour un retrait progressif du dispositif. La prime de l'Etat, de 1.000 euros jusqu'au 31 décembre et souvent doublée par les constructeurs, a ainsi été réduite à 700 euros et passera à 500 euros au 1er juillet. Selon Gilles Frécault, la baisse des immatriculations ne sera pas immédiate car le premier trimestre bénéficiera encore des commandes prises jusqu'au 31 décembre. «A l'issue du premier trimestre, on devrait avoir des baisses importantes. Sur l'ensemble de l'année, on risque d'avoir un recul d'environ 10% et de revenir sur des niveaux inférieurs à 2,0 millions par an qui est le niveau moyen du marché français», a-t-il dit. La production devrait parallèlement continuer de baisser mais plus modérément après la saignée de 2009. «La prime à la casse a entraîné un déplacement du “mix” vers les petites voitures et la grande interrogation en 2010 sera de savoir si cela va continuer», a expliqué Gilles Frécault. «Soit on revient au marché antérieur et on peut espérer une augmentation de la production en France, soit les habitudes prises en 2009 se prolongent et on aura encore une baisse. Nous avons mis -5% car nous pensons que cet effet de dégradation du mix risque d'être permanent». Le Crédit agricole voit en revanche la production en volume des utilitaires légers se stabiliser après un effondrement de 50% en 2009, et celle des utilitaires de plus de cinq tonnes se reprendre de 9,5% après un plongeon de 65%. La chute de la production des usines automobiles françaises a entraîné une baisse de 29,0% de la production d'acier mais le Crédit agricole voit celle-ci se reprendre de 12% en volume en 2010.