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Une colère non éteinte
Enquête : Electeurs non inscrits
Publié dans La Presse de Tunisie le 16 - 09 - 2011

Ils représentent 45% des électeurs, mais on en parle peu. Pourtant, les raisons de leur refus de s'inscrire sur les listes électorales, malgré le prolongement du délai et, surtout, leur vision pessimiste du futur, peuvent susciter des doutes non seulement sur la nature des choix qui ont été faits depuis le 14 janvier, mais également sur leur aboutissement.
Les résultats d'une enquête sociale qualitative, réalisée au cours du mois d'août dernier par un bureau de consulting (Elka), sur un échantillon de non-inscrits pris au hasard dans trois régions, à savoir le Grand-Tunis, Kairouan et Regueb, laissent penser que la situation est chargée d'incertitudes.
L'approche est originale. La Tunisie est comparée à une personne physique et les personnes interrogées, dans le cadre de six focus groupes (10 personnes par groupe, hommes et femmes, de 18 ans et plus et de catégorie sociale et professionnelle moyenne et faible), sont conviées à exprimer leur perception de la Tunisie avant, pendant et après le 14 janvier.
La Tunisie, victime pour les uns, coupable pour les autres
Pour les femmes et les hommes de la catégorie socio-professionnelle moyenne, la Tunisie d'avant le 14 janvier est une victime. Elle est comparée notamment à «un homme qui a une faible personnalité, qui triche, vole et donne l'image d'un gentilhomme qui est en réalité poussé à être méchant par son entourage ou par une très mauvaise fréquentation». La Tunisie devient coupable aux yeux des hommes de la catégorie faible, dont les plus âgés considèrent qu'elle est même impardonnable. A titre d'exemple, ces derniers la comparent à «un père qui a deux jumeaux et qui donne 1 dinar par jour à l'un et 100 dinars à l'autre», ou à «un père qui a plusieurs enfants et qui en exécute un chaque jour», ou encore à «Pharaon qui possède plusieurs esclaves et se fait plaisir en les torturant et en les laissant mourir de faim». La perception de la Tunisie change durant la période de la révolution et les participants à l'enquête la comparent alors à un alcoolique qui a arrêté de boire et qui, pour la première fois, regarde ses enfants en se demandant qui ils sont ? Ou alors «le père qui exécute chaque jour un de ses fils, s'effondre et se remet en question». Pour les plus pessimistes, parmi lesquels des participants de Kairouan et de Regueb et des hommes de niveau social très faible, «le jumeau qui recevait 1 dinar par jour a tué son père».
Un sentiment persistant d'injustice sociale
A partir des témoignages des participants, il ressort également qu'un sentiment de peur et d'angoisse mélangé à de la joie a été ressenti le 14 janvier par les habitants de Tunis, tandis qu'une joie démesurée, «violant» le couvre-feu, a explosé à Kairouan et à Régueb. L'enquêteur consultant, Mohamed Ikbel Elloumi, directeur général d'Elka, indique par ailleurs que «le sens du patriotisme et de l'appartenance a été enfin retrouvé à partir du 14 janvier, mais un sentiment très fort d'inégalité des chances et d'injustice sociale persiste chez ces Tunisiens».
Une citation tirée des discussions des focus de Kairouan et de Regueb illustre cette perception, que nous raportons dans sa crudité et sans doute aussi dans son excès : «SVP, dites aux gens de Tunis de construire un mur semblable à celui de Gaza pour séparer l'Est du pays de son Ouest. Qu'ils retirent aussi toute la police et l'armée, même si nous étions occupés par un autre pays, nous vivrions certainement mieux, si ce n'est pas au même niveau, parce qu'il n'y a pas pire!».
Autre conclusion tirée des discussions : si le sentiment d'injustice et d'amertume est général, les habitants de Tunis l'associent à la période des 23 dernières années, tandis que les Kairouanais et les habitants de Regueb évoquent spontanément les 50 dernières années, expliquant ainsi que l'injustice sociale a toujours frappé ces régions depuis l'indépendance.
Déviation des objectifs de la révolution
Huit mois après la révolution, la perception de la Tunisie par les personnes interrogées met en exergue le flou, l'ambiguité, l'incompréhension, l'instabilité, l'insécurité et le sentiment de rancune qui forment l'état d'esprit des Tunisiens approchés par les sondages politiques. La Tunisie est comparée à «une femme belle, guérie de sa maladie mais défigurée, ou à une femme libérée mais incapable de percevoir les frontières de la liberté, ou encore à un handicapé qui commence à marcher mais qui a mal à la tête». Ces métaphores ont la subtilité de traduire un changement positif significatif de la Tunisie après le 14 janvier, tout en pointant du doigt des zones d'ombre qu'il est urgent de traîter avant leur propagation, ou encore des brèches qu'il convient de colmater afin d'éviter un éventuel séisme. «Parmi les participants à ces groupes de discussion, il y a des hommes et des femmes qui sont déterminés à déclencher une 2e révolution si les objectifs de la révolution du 14 janvier ne sont pas réalisés», précise M. Elloumi, qui ajoute que pour ces non-inscrits, «les objectifs de la révolution sont économiques et sociaux avant tout, pas seulement politiques». Et, pour eux, la prolifération des partis politiques, la faible notoriété de leurs premiers responsables, leurs ambitions étalées au grand jour, les débats houleux et conflictuels entre leurs représentants, l'accaparement de l'opinion publique par les dossiers politiques ainsi que la très faible notoriété de Kamel Jendoubi et de l'instance chargée de l'organisation des élections sont autant de points d'interrogation, de zones d'ombre et de raisons de ne pas s'inscrire et de ne pas voter le 23 octobre.
Une image est utilisée par un des participants désabusés afin de rendre compte de ce qui est ressenti : «L'homme avait une seule mauvaise personne dans son entourage, aujourd'hui il en a une bonne centaine». Les femmes de Regueb n'y verront que du feu, l'une d'elle compare la Tunisie à une vieille dame qui a retrouvé sa jeunesse et sa beauté et qui reçoit une bonne centaine de demandes en mariage, mais personne n'est en mesure de la conseiller pour faire le bon choix.
Changer les stratégies de communication
Parmi les conclusions de cette enquête, l'affirmation que la non-inscription sur les listes électorales est loin d'exprimer une immaturité politique, bien au contraire. C'est parce que la visibilité est faible que ces Tunisiens, comme certainement beaucoup d'autres, font preuve de responsabilté en refusant de prendre le risque de faire le mauvais choix électoral. Mais il est possible de renverser la situation si, comme le préconisent les enquêteurs, les partis politiques et l'Isie amélioraient leurs stratégies de communication, se faisaient mieux connaître et prenaient en considération les problèmes quotidiens des Tunisiens. Car les Tunisiens non inscrits, parmi eux beaucoup de jeunes et de femmes, sont autant d'électeurs potentiels qu'il revient aux partis de séduire pour renflouer leurs rangs, et à l'Isie de convaincre pour améliorer le taux de participation aux élections de la Constituante.
La recommandation est à prendre au sérieux, car les habitants de la Tunisie profonde n'ont pas forcément les mêmes soucis que les Tunisois. On dit qu'à ce jour, il n' y a pas d'agence Steg à Regueb, ni d'antenne de la Protection civile. Or cette région, qui est l'une des plus pauvres, représente pourtant un grenier pour les autres régions.
Ce sont là les véritables préoccupations du Tunisien moyen qui a toujours le sentiment d'être lésé, même après avoir fait sa révolution.


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