Consacrer une ligne budgétaire spécifique à la Cour des comptes est de nature à assurer son indépendance Des dysfonctionnements structurels, des incohérences juridiques, des défaillances en gestion … autant de variables qui ont pesé lourd sur les attributions, les prérogatives et l'autonomie de la Cour des comptes (CC), pendant plusieurs années. En somme, ses performances ont été largement en deçà des attentes de l'Etat et des citoyens, malgré le fait que cette administration regorge de compétences dans plusieurs disciplines. Ce qui a porté atteinte à la bonne gouvernance, la préservation des fonds et biens publics, ainsi qu'à la transparence des comptes de l'Etat. En effet, certains opérateurs ont multiplié les dérapages et les manœuvres frauduleuses pour servir leurs intérêts particuliers au détriment des besoins des citoyens et de l'intérêt général de l'Etat. La persistance d'une telle situation a alimenté les premières vagues contestatrices et les premiers slogans de la révolution tunisienne. Donc, plus que jamais, il est nécessaire de s'investir dans un système de contrôle des finances publiques, plus indépendant, plus au contact de l'opinion publique, en vue de répondre aux exigences d'un pays en transition démocratique et d'une société qui aspire à une meilleure justice sociale. C'est dans ce cadre que s'inscrit le séminaire intitulé «les Institutions Supérieures de Contrôle (ISC) et les mdias, alliés pour une meilleure performance gouvernementale», organisé par la Cour des comptes de Tunisie, avec la participation de la GIZ, la Banque mondiale. Présentant la nouvelle vision de la Cour des comptes, M Chedli Srarfi, rapporteur général de la CC note qu'«on ne devrait plus attendre la publication du rapport annuel. La Cour des comptes doit organiser périodiquement des points de presse pour faire état des suivis et des résultats de ses travaux». En effet, la complémentarité visée relève du bon sens et profite à toutes les parties prenantes des œuvres publiques. Il explique« «Si la CC dévoile ses rapports et que la presse assure le bon relais, les citoyens seront davantage impliqués aux projets entrepris pour le développement de leurs zones et veilleront eux-mêmes à leurs réalisations.» Ainsi, le renforcement des contrôles est de nature à dissuader certains gestionnaires, peu soucieux de la qualité des œuvres, qui profitent des écarts entre les visites de contrôle pour bafouer les standards de qualité convenus. On apprend aussi qu'un bureau dédié à l'organisation des relations avec les médias pourrait voir le jour pour mener à bien le relais d'information. Le premier pas, rompre avec les écueils du passé La batterie de textes de loi qui régissaient le travail de la Cour des comptes n'ont fait qu'affaiblir l'institution, voire la régresser en arrière-plan. D'ailleurs, selon Imen Essid, cadre à la CC, «l'appréhension du statut de la Cour ne pourrait s'effectuer en ignorant le Conseil d'Etat dont elle fait partie. Mais cette question demeure ambiguë : l'appartenance audit Conseil ne permet pas de trancher sur le statut de juridiction de la CC puisque le Conseil d'Etat est une institution virtuelle, inexistante». Il paraît évident que tout commence par rompre avec les écueils et les incohérences du passé. Pour ce faire, l'expert préconise de préserver le caractère d'institution Constitutionnelle en réservant une place dans la nouvelle Constitution. Aussi de résoudre les problèmes issus de la virtuelle appartenance au Conseil d' Etat inexistant. De ce fait, la CC doit être reconnue comme une autorité juridictionnelle, spécialisée et indépendante par rapport aux deux pouvoirs législatif et exécutif, et ce, au double plan organique et fonctionnel. Le chantier portera sur tous les aspects de la Cour, notamment, le rattachement administratif et financier, les modalités de nomination du président, le statut des membres de la Cour, les procédures de travail et les aboutissements des travaux de contrôle… En somme, ces réflexions, aussi ambitieuses que pratiques, ne peuvent se traduire au concret que par la consécration d'une ligne budgétaire spécifique pour la CC et la valorisation constitutionnelle des attributions de la Cour. i