• L'impératif de séparer le politique et le religieux et de sauvegarder l'article premier de la Constitution de 1956. Les recommandations du peuple révolté qui a aboli la dictature tournaient, et tournent encore, autour de trois principaux droits: le travail, la liberté et la dignité. Personne n'aurait cru qu'à la veille des élections se déclenchera un pseudo-problème qui divisera le peuple en deux clans opposés: islamistes et laïques. Un pseudo-problème identitaire qui dégénère pour atteindre le projet de la nouvelle Constitution. Certains islamistes appelaient, avant que le problème ne soit tranché, à l'adoption de la charia comme source de la Constitution alors que les laïques recommandent un Etat civil, autonome et indépendant de toute influence politique. Le mariage de deux concepts contradictoires a semé trouble et conflits aussi bien dans la société tunisienne que dans l'Assemblée nationale constituante. Vu l'importance de ce thème, le Centre d'études sur l'Islam et la démocratie (Csid) a organisé récemment une conférence intitulée: «La religion et l'Etat dans la nouvelle Constitution ». La conférence a été donnée par deux professeurs qui, loin de se contredire, sont unanimes sur la nécessité de séparer le politique et le religieux, et ce, pour diverses raisons. Dans son allocution, le Pr Ahmed el Abyadh, activiste politique et penseur islamique, a tenu, d'abord, à rectifier la définition même de la charia. Si certains islamistes la qualifient comme étant un texte de loi, à même de se substituer aux lois civiques, l'orateur trouve que la Charia n'est pas un texte de loi. Selon son avis, elle représente la méthodologie à suivre et l'ensemble des principes qui orientent le musumlam tout au long de sa vie. Ses principes de base ne sont autres que la justice et la libération de l'individu de toutes sortes de contraintes et de répression. D'un autre côté, l'Etat, dans sa conception civique, se doit d'être autonome et neutre. Ses prises de décision ne doivent aucunement être influencées par aucune autre partie. L'orateur a insisté sur le principe des élections comme étant le meilleur moyen de garantir la légitimité de l'Etat. Pour sa part, M. Alaya Allani, professeur d'histoire et chercheur spécialisé dans le mouvement islamiste à la faculté de La Manouba, a indiqué que l'Islam constitue un point de convergence entre les Tunisiens et non de conflit. Il a rappelé que l'histoire de notre pays témoigne de la richesse des tentatives de modernisation de la pensée islamique. Toutefois, il a appelé à la vigilance et à la lutte contre la ré-instauration de la dictature via une Constitution privilégiant l'esprit d'un mouvement bien déterminé. Le professeur a rappelé que l'union du politique et du religieux a eu des conséquences fâcheuses à travers l'Histoire, d'où l'impératif de veiller sur la séparation de ces deux concepts contradictoires. L'assistance a été unanime sur l'importance de sauvegarder l'article premier de la Constitution de 1956, qui garantit à la fois l'identité arabo-musulmane du peuple tunisien et la civilité de l'Etat.