Par Heikki HOLMAS* La plupart des parents souhaitent offrir le meilleur avenir possible à leurs enfants et petits-enfants. Les dirigeants mondiaux doivent avoir le même objectif lorsqu'ils se réuniront à Rio Je travaille pour un monde plus juste. Les parents souhaitent pour leurs enfants une meilleure vie que la leur. Nous devons donc contribuer à la croissance économique, à la création d'emplois et à la sécurité pour des millions d'individus. Nous devons veiller à ce que le monde utilise des technologies encore plus respectueuses du climat, dans le cadre d'un développement durable. Et c'est aux plus gros pollueurs de faire le plus d'efforts pour réduire les émissions. Voilà 20 ans, cette année, que le développement durable est devenu un thème de discussion majeur pour les dirigeants de la planète. A l'époque, Gro Harlem Brudtland était à Rio de Janeiro pour lancer de nouvelles idées en matière de développement et d'environnement. En juin prochain, les dirigeants mondiaux se retrouveront encore dans la capitale brésilienne pour le sommet international de l'ONU, qui offrira une nouvelle opportunité pour se mettre d'accord sur les moyens de parvenir à la croissance et à la prospérité tout en préservant l'environnement. La Tunisie se trouve dans une période unique après sa révolution avec l'ouverture du dialogue social et le fleurissement de tous les secteurs de la société civile. Cette ère exceptionnelle donne la possibilité de créer une nouvelle dynamique de coopération entre les autorités du développement durable et les organisations et initiatives nongouvernementales dans ce domaine. Nous avons besoin d'une croissance durable. Nous avons également besoin d'une meilleure répartition de l'argent lorsque les pays s'enrichissent. Un habitant de la Terre sur cinq n'a pas d'électricité. Ils sont deux fois plus nombreux, soit trois milliards, à cuisiner et à se chauffer au bois et au charbon. La fumée des poêles de mauvaise qualité est nocive pour la santé et tue près de deux millions d'individus par an. Ce n'est ni juste, ni rentable, ni viable. Il serait préférable que les enfants puissent aller à l'école et que les adultes aient l'opportunité d'avoir un emploi rémunéré. Les pays riches gaspillent l'électricité et consomment plus que leur part de l'énergie de la planète. Lorsque tous les pays augmentent leur consommation d'énergies polluantes — pétrole, gaz et charbon — cela provoque des changements climatiques dangereux. En Norvège, les maisons et les bâtiments consomment 40% de toute l'énergie. En améliorant l'efficacité énergétique des constructions, nous pouvons diviser par deux la consommation d'électricité d'ici 2040, tout en augmentant notre confort et en diminuant la facture d'électricité. Les répercussions néfastes des changements climatiques sont d'ores et déjà perceptibles. Mais les plus graves conséquences, ce sont les générations futures qui les subiront. Prenons un autre exemple, celui de la nourriture. Selon des statistiques de l'ONU, environ un tiers des aliments est jeté ou détruit. Dans les pays riches, chaque individu jette une centaine de kilos de nourriture chaque année. Rien qu'en Norvège, 500.000 tonnes d'aliments vont aux ordures. Dans le même temps, plus d'un milliard d'individus ont faim. Même dans les pays pauvres, les pertes de nourriture sont importantes, à cause de routes en mauvais état et d'infrastructures de stockage insuffisantes. Pour que tous les enfants mangent à leur faim, nous devons changer beaucoup de choses. Ce sont là quelques-uns des problèmes dont nous discuterons à Rio. Les pouvoirs publics, la société civile, les chercheurs et les industriels du monde entier chercheront des solutions. Tout le monde s'accorde pour reconnaître que notre mode de vie n'est pas viable. Il est cependant beaucoup plus difficile d'obtenir un consensus sur les solutions parce qu'elles nécessitent un partage plus équitable qu'aujourd'hui. Un partage à la fois des richesses et du droit de polluer pour créer des richesses. L'aide des pays riches aux pays pauvres contribue à un partage plus juste. Mais l'aide est plus efficace lorsqu'elle débouche sur des investissements privés et qu'elle permet aux pays de trouver leurs propres solutions. Les pays pauvres peuvent aujourd'hui adopter des démarches plus respectueuses de l'environnement que celles dont nous disposions lorsque nous sommes devenus riches. Mais cela ne suffit pas, loin s'en faut. Et si la crise financière et les élections dans de nombreux pays importants incitent les responsables politiques et la population à penser d'abord à eux et au proche avenir, le sommet de l'ONU à Rio vient nous rappeler que les grands défis appellent des idées neuves. Les dirigeants du monde entier doivent coopérer encore mieux. Nous devons susciter suffisamment de volonté politique pour que le sommet de Rio marque une nouvelle étape en faveur du développement durable. Nous devons trouver des moyens pour que les solutions viables soient également rentables. Nous ne pouvons pas procurer assez de nourriture pour tous simplement en produisant davantage de denrées alimentaires. Nous devons aussi améliorer toute la chaîne alimentaire, du champ à la table. Les pertes de nourriture pendant la récolte et le stockage se traduisent en pertes de revenus pour les petits paysans et en produits plus chers pour les populations pauvres. Aussi devons-nous investir non seulement dans la production alimentaire, mais aussi dans les infrastructures et les technologies afin d'empêcher la nourriture de s'avarier et donner au plus grand nombre accès aux produits alimentaires. La Norvège travaille pour que la conférence de Rio fixe de nouveaux objectifs en termes d'énergie durable. Elle soutient le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon qui prône l'électricité pour tous. Il veut doubler la part des énergies renouvelables et rendre l'énergie existante deux fois plus efficace d'ici 2030. Cela exige de la coopération, et l'industrie doit jouer un rôle décisif pour utiliser les nouvelles technologies nécessaires à cet égard. Dans le pire des cas, le sommet de Rio se résumera à beaucoup de bruit pour pas grand-chose. Les pessimistes rappellent que l'ONU a démontré à plusieurs reprises son incapacité à résoudre les problèmes les plus difficiles. Toujours est-il que seule l'ONU rassemble tous les pays du monde pour discuter et agir. C'est la raison pour laquelle nous devons profiter ensemble de la conférence de Rio afin de renforcer la capacité d'action de l'ONU et tracer la voie pour une croissance équitable, ménageant l'environnement. La Norvège œuvre en faveur d'un consensus général sur de nouveaux objectifs de développement durable qui obligeront les pays riches et les pays pauvres à prendre des mesures chez eux. Un tel objectif exige des décisions courageuses, à Rio et dans les années à venir. * (Ministre norvégien du Développement international)