Quelle gouvernance pour une meilleure efficience des finances publiques, diversification des partenaires et des marchés, mise du secteur financier au service de l'investissement privé, quelle politique d'emploi adopter pour une meilleure protection sociale, telles sont les questions soulevées, hier, en marge du séminaire conjointement organisé par le ministère du Développement régional et de la Planification et la Banque africaine de développement (BAD) autour du thème «Vers un nouveau modèle de croissance pour la Tunisie». Un thème qui trouve toute sa justification dans le contexte actuel que traverse le pays et dans les nombreux défis qu'il est appelé à relever, notamment en matière de création d'emplois, de développement régional et de création de nouvelles sources de richesse. Par ailleurs, la Tunisie post-révolution est appelée à se doter de nouveaux mécanismes et de nouvelles méthodes qui s'inspirent des bonnes pratiques internationales dont la bonne gouvernance et la transparence. Hakim Ben Hammouda de la BAD note, à ce propos, qu'au-delà de l'impact immédiat de la révolution lié aux dysfonctionnements observés à tous les étages de l'économie nationale, la crise financière internationale et la crise européenne pèsent sur la relance économique de la Tunisie, ajoutant qu'en aucun cas, les défis conjoncturels ne doivent occulter les défis structurels auxquels le pays doit faire face afin de retrouver le chemin de la croissance durable. Le conférencier note, par ailleurs, que pour réduire les inégalités régionales et booster la création d'emplois, il faudrait une croissance plus rapide et inclusive précisant que jusqu'à présent, la croissance a, généralement, été plus le résultat d'investissements élevés que le produit de gains importants de productivité. Il ajoute que pour atteindre les objectifs visés en matière de croissance, la Tunisie est appelée à mettre en place une meilleure gouvernance institutionnelle et économique, d'adapter son système financier aux besoins du pays et de diversifier ses partenaires économiques afin de ne plus dépendre de la croissance des autres pays. Audrey Verdier-Chouchane de la BAD a, quant à elle, présenté les perspectives économiques de la Tunisie, revenant sur les perspectives macroéconomiques, les principaux enjeux, et les atouts de l'économie tunisienne. Elle annonce qu'en dépit du contexte difficile qu'elle traverse, l'économie tunisienne devrait rebondir en 2012-2013, hypothèse qui se base sur nombre de facteurs internes et externes. Sur le plan interne, on s'attend, en effet, à une croissance de la consommation locale, à une reprise de l'investissement public et privé et à une croissance sectorielle qui touchera, entre autres, les secteurs de l'agriculture, des services, de la construction et de la manufacture. S'agissant des moteurs de croissance externes, on trouve la reconstruction libyenne et la croissance des exportations de marchandises et d'offres d'emplois qui en découlent, le prix des exportations agricoles et les flux financiers externes. A. Chouchane se penche, par ailleurs, sur les facteurs qui constituent des entraves à une croissance optimale et rapide citant, entre autres, la frilosité des investisseurs, les tensions sociales, la lente reprise de l'économie libyenne, la fragilité du secteur bancaire et la crise européenne. L'Europe étant le premier partenaire économique de la Tunisie, l'incidence de la crise qu'elle vit risque, en effet, d'impacter fortement la croissance de la Tunisie à travers, notamment, la baisse des recettes d'exportation de biens, la baisse des recettes touristiques, la baisse des flux financiers (IDE, transfert des fonds des migrants...) et les effets de contagion au niveau des banques. S'agissant des enjeux qui se posent, la conférencière souligne qu'il s'agit de limiter l'endettement extérieur, de diversifier la structure de l'économie, d'améliorer le climat des affaires et la bonne gouvernance, d'enrayer le chômage des jeunes et des diplômés et de résorber les disparités régionales. Elle rappelle, à ce propos, que la Tunisie a reculé de 6 places dans le classement doing Business 2011. Un recul généré par un ensemble de contraintes dont la bureaucratie, l'accès difficile au financement, l'attente aux ports et les délais de dédouanement, l'augmentation des prêts non performants et un marché financier peu profond et peu dynamique. Cependant, souligne-t-elle, la Tunisie jouit d'un nombre d'atouts dont un niveau élevé d'infrastructures, une main-d'œuvre qualifiée, une position géographique stratégique, un réseau de télécommunication moderne et performant et la mise en place de nouvelles lois et de nouvelles institutions pour une meilleure gouvernance publique.