Où en sommes-nous depuis la révolution du 14 janvier 2011? Où voulons- nous aller suite à cet état de crise dans lequel se morfond le pays? Ainsi s'interroge M. Hamma Hammami, président du Parti communiste des ouvriers tunisiens, lors de la conférence de presse qu'il a donnée, hier matin à Tunis, en allusion à la montée en puissance des salafistes qui n'ont cessé de jouer avec le feu, usant de tous les moyens de violence et d'agression dans l'impunité totale et face au silence assourdissant du gouvernement en place. Et les récents incidents survenus au Palais El Abdellia n'ont été, à ses dires, que de faux prétextes qui ne font que justifier l'injustifiable. Il est dérisoire, selon lui, de laisser ces assaillants du courant extrémiste s'autoproclamer, à chaque fois, protecteurs de la religion et défenseurs du sacré, s'imposant, en toute liberté, comme des justiciers allant jusqu'à qualifier les gens de mécréants et les accuser d'apostasie. Et d'ajouter que le laxisme de la Troïka et son indécision continuent à alimenter ces dépassements et «légitiment» la violation de la loi par la lutte contre la profanation provocatrice. Une telle position politique détournée, lance-t-il, risque de provoquer une dérive sécuritaire, voire le chaos socioéconomique. Et M. Hammami n'a point hésité à accuser et le gouvernement et l'Assemblée constituante d'avoir tergiversé et trop tardé à prendre les choses en main, en les bombardant de toutes sortes de reproches et de critiques, leur imputant l'entière responsabilité. Il n'y est pas allé par quatre chemins pour culpabiliser tous les partis au pouvoir : «Les trois présidents sont impliqués dans des manœuvres politiques qui risquent de mettre l'avenir du pays en péril, ne cherchant qu'à mettre la poudre aux yeux pour se dérober derrière leurs intérêts étriqués». D'autant plus que certaines parties étrangères ne veulent surtout pas que ce pays parvienne à réussir sa révolution et arrive à bon port, croit-il. «D'autres, rétrogrades et obscurantistes, voudraient nous ramener au passé lointain, au Moyen Age...», se moque-t-il, sans aucune réserve. Dans la tentative d'une «Somalisation de la Tunisie», pour utiliser ses propres termes. Ce qui menace, à ses dires, les acquis de la Tunisie et les objectifs de la révolution. Et c'est là où réside la responsabilité du gouvernement pour éradiquer la corruption et assurer la sécurité et la paix sociale. Qu'attend le gouvernement pour mettre le pays sur la bonne voie? Est-il, vraiment, en mesure d'aller plus loin pour identifier son agenda politique et fixer un calendrier des prochaines échéances politiques, notamment la date butoir de la Constitution et la création de l'instance indépendante des élections? Ainsi s'est interrogé le porte-parole du Pcot. «Si les dérives de Ben Ali ont provoqué la révolution dans le pays, ce gouvernement, par cette politique irréfléchie, pourrait, ainsi, l'entraîner dans le chaos», prévient-il sur un ton d'ironie. En tant qu'alternatives aux choix politiques et économiques afin de sortir le pays de cette crise si lourde, Hamma Hammami a appelé à la réforme du système sécuritaire, à la réforme de l'appareil judiciaire et à la neutralité des mosquées et lieux de culte pour ne pas être des sources de zizanie et d'incitation au meurtre. Allant dans le sillage de plusieurs partis ayant choisi d'agir dans des alliances et de coalitions pour servir le pays, ou à l'instar de l'initiative de l'Ugtt d'aborder le dialogue national pour aboutir au consensus social, le Poct a contribué, aux dires de son porte-parole, à la relance du front du 14 janvier créé au lendemain de la révolution, mais qui avait été par la suite suspendu. Selon lui, il est temps de rebondir en engageant des concertations avec le processus démocratique social et le parti républicain dans le souci d'instaurer de nouveaux équilibres politiques dans le pays. A propos de l'initiative de Caïd Essebsi, Hamma Hammami a fait remarquer qu'il s'agit, à vrai dire, d'un parti politique plutôt qu'une initiative de sauvetage du pays.