Le centre-ville de Tunis a cette particularité architecturale : la Médina côtoie les habitations du style colonial. Cette particularité qui fait ravir les visiteurs n'est pas appréciée à juste titre par beaucoup de nous autres locaux. La Médina et les constructions coloniales en ont souffert avec le temps et les intempéries. Et puis, des actions de sensibilisation ont commencé à se faire, suivies de véritables projets de rénovation et de réaménagement. C'est la raison d'être de l'association de sauvegarde de la Médina de Tunis. Avec l'aide de la mairie de Tunis, ses architectes et chercheurs font en sorte de redonner à la Médina sa figure d'antan, son éclat et sa configuration de conglomérat témoin de 12 siècles d'histoire. Son action ne date pas d'hier, l'association existe depuis 1967 et trouve son sens véritable depuis que Tunis est classée Ville du patrimoine mondial en 1979. Les membres de cette association, notamment M.Zoubeïr Mouhli, architecte et membre de l'association, et Mme Samia Yaïche, la présidente, sont venus lors d'une conférence tenue vendredi 7 mai au Club Tahar Haddad, présenter leur dernier projet en date qui a permis de rénover un circuit urbain reliant sidi Brahim Riahi à la Zitouna. Un circuit urbain avant tout Quand on entreprend un projet de réaménagement, il est important d'y inclure les habitations et les institutions concernées. C'est là l'essentiel de tout projet. c'est de là aussi qu'émanent les principales difficultés que peut rencontrer son exécution. Le circuit qui a été créé se veut avant tout d'être un circuit urbain, dans le sens où il agit sur deux axes: la restauration des façades des bâtiments qui le longent et l'amélioration de la qualité de la vie de ses habitants, avec la prétention de créer autour une dynamique culturelle et, pourquoi pas, touristique. Les recherches qui ont été faites ont permis d'orienter les architectes. Le vrai visage de la partie de la Médina qui s'étend de la rue sidi Brahim Riahi à la Zitouna était enfoui sous des couches de peinture, de ciment et de chaux. Il fallait impliquer les habitants avec différents sortes de persuasions dont la proposition de crédits pour refaire les façades de la bonne manière, avec les couleurs adaptées et typiques, en cachant les câbles d'électricité et tout aspect non esthétique et étranger au style initial de la Médina. Des mois de travail ont abouti sur un circuit type dont le principe devrait petit à petit s'étendre sur d'autres ruelles de la Médina. Ce projet étant achevé, la conférence a permis de savourer le résultat avec un diaporama de clichés, avant/après, du circuit qui est totalement transformé et qui a facilité énormément la vie des habitants et l'accès aux étrangers. Il n' y en a pas que pour la Médina de Tunis En addition aux actions de réaménagement à l'intérieur de Tunis, d'autres actions couvriront des villes de l'intérieur du pays. Nous avons pu découvrir lors de la conférence les exemples de Béja et de Kairouan, présentés respectivement par Mme Inchirah Hbebou et M.Khaled Karoui. Béja présente la même particularité que Tunis: la vieille Médina bordée par le style colonial. Son circuit part donc de la vieille église, située en plein centre-ville pour serpenter les ruelles de la Médina jusqu'à la Kasbah. Mme Hbebou a dû avant tout comprendre le mode de vie des habitants de la Médina pour adapter le réaménagement à leurs besoins, «parce qu'une Médina, dit-elle, est avant tout une histoire. Et à Béja, elle ne s'est jamais vidée de ses habitants et de son histoire et elle est toujours restée au cœur de la ville». Sur un total de 1.200 ml, les façades ont été homogénéisées avec les rues, en améliorant l'éclairage public et les revêtements de la chaussée. Tout en respectant l'organisation de la vieille ville, on a procédé à des améliorations qui servent à la vie de tous les jours. Ainsi, les hommes qui se rassemblent dans la place près de la mosquée ont un espace vert avec des bancs pour se reposer. Il en est de même pour les femmes qui se rencontrent plus haut, dans la place près du Souk. Pour le cas de kairouan, le projet d'aménagement et de réhabilitation de la Place Jraba, s'insère dans le même esprit :améliorer le cadre de vie des habitants tout en préservant l'identité historique et culturelle du patrimoine. Cette place est située au centre de la Médina de Kairouan, elle est donc «un nœud qui relie les principales artères au cœur de la Médina». Voilà pourquoi c'était important de s'y attaquer en premier. Sa superficie totale est de 1.000 m2 et elle inclut des monuments importants entre mosquées, mausolée, dispensaire, maisons et boutiques qu'il fallait réaménager et surtout homogénéiser. La Médina, cette figure emblématique de notre histoire que l'on retrouve partout en Tunisie est comme la mère qui s'est longtemps occupée de ses enfants et qui a désormais besoin que ses derniers le lui rendent. L'aménagement de la Médina a besoin de beaucoup de moyens, de bon sens, de savoir-faire et aussi de conscience de la part de nous tous au vu de l'importance de préserver notre histoire et ses empreintes. C'est une partie intégrante du travail de la mémoire car qui ne sait pas d'où il vient, ne sait pas où il va ! N.T..