Par Dr Rejeb Haji «Responsabilité entraîne solidarité» (Victor Hugo) L'hystérie médiatique continue à déferler sur notre vie quotidienne pour nous angoisser encore plus. Rien qu'à lire la «Une» diversiforme de nos journaux, quelle que soit leur appartenance, ou à écouter les propos biscornus sur les ondes, quelle que soit la station, ou encore à suivre la retransmission de discussions qui effleurent à peine le cœur des sujets, quelle que soit la chaîne de télévision, on aboutit à la même conclusion : les refrains sont les mêmes et le constat est toujours de plus en plus accablant. Il se dégage un décalage énorme entre la version des faits et la réalité. En conséquence, nul ne voit le bout du tunnel en consultant nos médias. Pourquoi la confiance tarde- t- elle à être retrouvée, et qui va donc nous tirer d'embarras ? Est-ce les tartuffes de la politique qui se déclarent çà et là les meilleurs, les bâtisseurs de la Tunisie nouvelle, voire les instigateurs de notre révolution à tous ? Toujours les mêmes, ils accaparent les ondes pour nous parler de leurs exploits. Ils voguent d'un journal à l'autre et d'une station à une autre au gré des circonstances, pour nous dire qu'ils sont les mieux outillés pour mener notre barque à bon port, alors que, pour la plupart, ce sont d'illustres inconnus sans histoire ni références reconnues. Ils argumentent en continu, sur l'inutile et même sur le dérisoire. Les conseillers ministériels s'en mêlent, dépassant leurs prérogatives, faisant fonction de pouvoir parallèle. Ils deviennent des faiseurs de politique, alors même que leur cursus universitaire ou politique reste encore flou. Pour certains, il est vrai, ils doivent tout à leur appartenance à la Troïka. Etre adhérent à cette dernière peut conduire aux plus hautes fonctions de l'Etat. Il suffit pour s'en convaincre de se référer aux quelque quatre-vingt ministres et aux dernières nominations en date pour mesurer l'ampleur des dégâts. Que ces prétendants prouvent leurs capacités d'indépendance d'esprit, de probité, de transparence et de rigueur dans la démarche au service de l'Etat. Ils seront sans aucun doute adulés et acclamés par tous, sur tous les toits. Notre peuple, doit-on se souvenir, par son vote, lorsqu'il s'est rendu aux urnes, a confié à ses représentants une mission bien définie et bien claire : écrire une Constitution dans un délai d'un an. Qu'en est-il au juste aujourd'hui ? Tout le monde espère que la parole donnée pour le mois de mars sera tenue. Mais que ces représentants se rappellent qu'ils n'ont pas été mandatés pour une durée indéterminée ni pour tout décider, tout désorganiser et récompenser les serviteurs fidèles. Pourtant, pour services rendus, des illustres inconnus se gargarisent en critiquant les bilans des autres, alors qu'ils n'ont ni bilan ni envergure. Notre classe politique, parlons- en ! Est-ce celle qui se rue dans les fêtes pour se montrer, se frayer un chemin et s'approcher des nouveaux venus au pouvoir ? Nous ne le pensons pas. C'est plutôt celle qui est capable d'imaginer le futur en tirant les conclusions du passé, de proposer des solutions crédibles, en recourant au vécu, et de s'acharner à sortir le pays de la crise dans laquelle il est plongé, dans toutes ses composantes économique, politique et sociale. Les arguments chocs qui nous sont présentés, à chaque chamaillerie des tenants du pouvoir, ne sont plus de mise. Le consensus ou encore aujourd'hui l'arrivée des prix Nobel ou d'autres, venues d'ailleurs chercher refuge dans notre pays, n'ont plus d'effet. Par ce biais, allons-nous trouver des solutions à nos problèmes? Allons-nous satisfaire nos vœux et refaire une santé à notre économie ? Encore plus grave dans notre paysage politique, l'éparpillement imposé par des godillots de la politique va accentuer le basculement vers l'inconnu, vers l'imprévisible, voire vers l'irrémédiable : chose que personne ne souhaite et que personne n'admet. L'essentiel demeure pour un petit pays comme le nôtre, aux dimensions historiques immenses et aux ressources matérielles limitées, de trouver sa voie dans une politique «bien intentionnée» qui doit être «bien faite» pour que ses réalisations soient «couronnées de succès». Pour exaucer ces vœux, il faut «connaître la machine économique» pour déterminer les «manettes de réglage». L'objectif sur lequel tout le monde doit s'accorder est celui de relever le niveau de vie du citoyen et d'aider les plus démunis. Les nouveaux défis économiques et politiques suscités par la révolution, ajoutés à ceux de la crise mondiale, exigent de nouvelles réponses. En effet, dans une société comme la nôtre qui veut se construire «pluraliste» où l'intérêt général prime, l'organisation des pouvoirs doit être autour d'un consensus où chacun assume pleinement son rôle. Les partis au pouvoir ou du pouvoir, choisis par le vote, doivent assumer leur rôle dans la direction du pays et l'opposition, quant à elle, doit contrôler et contribuer par une critique constructive l'action gouvernementale. Quant au quatrième pouvoir —les médias— il faut le laisser vivre sa mue et se réorganiser en dehors de toute pression politique ou idéologique pour informer, alerter, lancer des appels en cas d'urgence, raconter des histoires célébrer les héros... A lui de respecter son code de conduite et d'agir en toute liberté. Il est urgent de concourir avec les autres organisations civiles à la formation de la volonté politique du peuple pour pouvoir répondre aux exigences de l'Etat, de l'économie et de la société. La tâche est rude et les sacrifices doivent être consentis et partagés pour définir un modèle politico-économique répondant à une révolution qui a épaté le monde et qui se meurt à petit feu. Il est temps de la refaire revivre pour lui rendre sa crédibilité et pour qu'elle soit à l'apogée de sa victoire. Puisse, aujourd'hui, le congrès du parti dominant donner le feu vert à une coalition ouverte à tous, pour une unité retrouvée au service de tous. Seules, en période de crise comme celle que traverse notre pays, «l'union fait la force» et comme disait Victor Hugo «responsabilité entraîne solidarité» !