Malgré la grogne exprimée par les supporters au coup de sifflet final du match Etoile-Sunshine (0-0), l'entraîneur Mondher Kebaïer garde la foi en le bien-fondé du projet qu'il compte mettre en place. Le coup d'arrêt subi samedi dernier devant les Nigérians de Sunshine Stars pour leur deuxième sortie en Ligue africaine des champions a produit sur le coup le mécontentement de la dizaine de milliers de fans étoilés présents au stade olympique de Sousse. Toutefois, le coach étoilé veut relativiser : «Nous avons exercé une domination totale, notamment en première période, et créé à la pelle des occasions très faciles, à l'instar de celles ratées par Justin Mengolo et Lamjed Chehoudi, analyse-t-il. Mais à vrai dire, au bout de seulement un mois de travail avec le groupe, le niveau de jeu exprimé n'est pas mauvais du tout. De plus, il n'y a plus au fond une grosse différence entre le fait d'évoluer à domicile ou à l'extérieur. Je comprends par conséquent un peu la frustration de notre public». Inutile, donc, de trop s'attarder sur la frustration générée par le festival de ratages auquel l'entraîneur aurait pu remédier en cours de jeu s'il n'avait pas été poussé à perdre deux changements en raison des blessures de Chamseddine Dhaouadi et de Frank Com qui ont dû être remplacés. Parfois aussi, la malchance s'en mêle, faut-il l'admettre... Pourtant, les copains d'Aymen Mathlouthi n'auront pas à ruminer longtemps leur déception. La preuve? Dès le 5 août (22h00), à Radès, ils peuvent réagir en croisant le fer avec l'Espérance de Tunis dans le choc du groupe «A». «Ce sera un superbe défi au goût particulier, se réjouit d'ores et déjà Mondher Kebaïer. Cela n'aura rien à voir avec les sorties à Chlef et contre Sunshine. On prépare bien évidemment les plans de jeu selon le “calibre" de l'adversaire». On pourrait même croire que cette affiche tombe à pic pour mesurer les progrès réalisés depuis l'arrivée de Kebaïer à la barre technique. Ou plutôt depuis son retour : «Le groupe avait sa propre identité et jouait pour le doublé, se rappelle-t-il de son premier passage, en 2011. Cette fois-ci, j'ai axé mon travail sur le bloc-équipe et le comportement défensif. Mon message consistait à inviter mes joueurs à tourner la page et à les remettre en confiance, d'autant qu'ils sortaient d'une phase tourmentée et instable où trois entraîneurs ont défilé. En intégrant Dhaouadi, en replaçant Belaïd, Santos et Belakhal, nous avons trouvé de nouveaux équilibres. Regardez comment se comporte Belakhal en demi récupérateur : dans les trois derniers matches, il a été très bon», relève l'ancien sélectionneur olympique. «Se fixer des objectifs de jeu» Si la communication («Beaucoup de communication avec les joueurs», insiste Kebaïer) a été à la base de la reconstruction, il fallut en même temps s'appuyer sur les dons de quelques solistes auxquels on impose une discipline de groupe. «Mossaâb Sassi possède un gros potentiel et progresse d'une sortie à l'autre. Cependant, si nous devons le protéger, il n'en est pas moins vrai qu'il est appelé à exploiter à fond les occasions dont il bénéficie, d'autant que son temps de jeu est souvent compté, analyse l'enfant du CA Bizertin. Lassaâd Jaziri a des dons naturels qui peuvent aisément l'autoriser à évoluer en Europe. Il doit cependant se fixer des objectifs sportifs afin d'aller le plus loin possible. La dernière recrue nigérienne, Moussa Maâzou, reste une valeur sûre malgré sa production moyenne de samedi dernier. Mais cela fait une semaine seulement qu'il a commencé à travailler avec nous; physiquement, il n'était pas au point. Il est du reste inutile de lui mettre une pression superflue». Plus généralement, Kebaïer trouve l'effectif qu'il a sous la main «fort intéressant et alliant les qualités de la jeunesse et de l'expérience». Mais dès qu'on aborde avec lui le volet des jeunes, le discours s'enflamme et on sent le bonhomme sur son terrain de prédilection: «Notre effectif compte plusieurs jeunes. Avec le temps, ils auront leur mot à dire. Mais le problème, c'est la pertinence du dosage : il faut savoir les protéger au moment de les lancer dans le grand bain. Dans la phase de maturation et d'apprentissage, les Jegham, Brigui, Doula, Yahia... doivent se fixer des objectifs de jeu. Il n'y a pas d'ailleurs une autre issue : la seule alternative qui vaille consiste à former des joueurs d'un certain niveau capables de percer et de briller. Au point de permettre à l'Etoile de vendre les plus brillants d'entre eux. N'oubliez pas que le club tire ses recettes jusqu'à hauteur de 50% de la vente de ses joueurs. Et il ne survit que par ce moyen. D'où toute l'importance stratégique du centre de formation qui abat un travail immense», constate Kebaïer, lequel avait en charge la direction de cette structure vitale en forme de boîte de Pandore, le centre de formation. Pourtant, ce choix n'est pas sans comporter certains sacrifices inévitables : «Après deux ou trois ans ensemble, l'effectif voit arriver six ou sept nouveaux joueurs. Forcément, le temps que la mayonnaise prenne, il y a une phase transitoire qui nous pénalise par rapport à un club comme l'Espérance de Tunis qui n'a presque pas changé depuis quatre ans. Mais c'est là la destinée de notre club et sa raison de vivre. Et il nous faut faire avec», admet avec philosophie le coach du champion d'Afrique 2007.