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Lettre ouverte à M. B.Obama, président des Etats-Unis
Opinions
Publié dans La Presse de Tunisie le 01 - 10 - 2012


Par Aymen Abderrazak JEBALI*
Nous sommes la « Ligue des peuples arabes & musulmans», une ONG fondée en l'an 2000, et dont l'une des vocations principales est le renforcement de l'amitié entre les peuples, l'instauration de la démocratie et la participation active de nos peuples arabes et musulmans dans la gestion de leurs cités et le développement de leurs pays... C'est ce qu'on a expliqué à votre ambassadeur M. Robert F. Godec, notamment lors de notre rencontre à l'Ambassade, à Tunis, en date du 26 juin 2009. Il a pu mesurer notre détermination à lutter contre toute forme de dictature comme il a pu apprécier la maturité politique de notre Organisation et notre conduite éthique (la fin ne justifie pas les moyens). Une estime réciproque s'est vite établie et nous avons trouvé chez lui un grand encouragement. On a découvert qu'on partage des objectifs similaires et quasiment une même plateforme de valeurs. La dictature, lui avons-nous dit, ne produit que des lâches ou des terroristes, jamais de vrais citoyens capables et pour cette raison on n'en veut pas dans nos pays.
Cependant, cette rencontre a renforcé notre intime conviction que les Etats-Unis pourraient soutenir, voire provoquer, (ne serait qu'en apportant l'aspect professionnel de Freedom House et d'autres organisations à des manifestations spontanées, en brouillant les esprits par des informations toxiques fournies par divers services secrets et en dirigeant les éruptivités sociales...), le changement de certains régimes arabes, dont celui de Ben Ali. Quand un ambassadeur nous demande de quelle région de Tunisie êtes-vous originaires, nous comprenons autre chose que l'intérêt de Son Excellence pour les micro-cultures régionales.
En ce moment-là, les Etats-Unis ont-ils déjà dépassé la phase d'étude stratégique pour entrer dans la phase opérationnelle sur le terrain dans l'application du concept de «chaos créateur » cher à l'administration Bush, et auquel nous étions fondamentalement opposés? C'est un outil divin et non humain, Dieu seul a fait ressurgir du cataclysme des civilisations brillantes et créé la vie de l'inerte. Alors que le chaos engendré par l'Homme ne crée que le désastre et vous avez pu mesurer ses effets néfastes lors des dernières manifestations antiaméricaines dans nos pays. En Irak également, le chaos était et demeure ravageur et « la création » s'est produite plutôt en Occident. Peut-être est-cela l'interprétation exacte de ce concept ? Chaos dans le monde arabe et créations aux USA. En effet, si l'intention était positive, ce concept aurait été plus inspiré de s'intituler «la liberté créatrice », ce qui est en l'occurrence vrai, car il n'y a pas de création sans liberté.
Rappelons également que la civilisation romaine à laquelle veut s'identifier la pax americana (le Capitole de Washington est là pour rappeller celui de Rome) n'était pas un facteur de désordre universel, bien au contraire elle a créé des cités modèles de stabilité et d'intégration.
Pour nous, l'action américaine était prévisible, compte tenu de la terrible crise financière aux USA, de la situation périlleuse du dollar et de la guerre ruineuse et sans résultat en Afghanistan. Il était clair que les Etats-Unis allaient imposer un nouvel ordre politique dans la région arabe (la plus riche, et la plus vulnérable) et un nouvel ordre économique mondial... Opinion que nous avons déjà exprimée clairement dans deux articles parus en Tunisie en date du 20 octobre 2008 (journal La Presse) et plus explicitement encore, le 06 janvier 2009 (journal Alchourouk), et même dans la post-face d'un de nos livres paru en 1999. On a également attiré l'attention dans notre livre intitulé Justice pour tous paru chez l'Harmattan en 1995, sur le fait que l'Homme est un animal religieux et sur la capacité des jeunes à s'affirmer même quand les idées ne sont pas claires ou brillantes. «Ces jeunes pauvres, apolitiques et insouciants, sont les derniers qui pensent à la révolution mais les premiers qui en portent le flambeau. Un changement peut-il être impulsé par autres que ceux qui souffrent des conditions existantes », avons-nous écrit.
Mais Ben Ali et ses conseillers, au lieu d'être attentifs à ce que nous écrivons, nous ont combattus dès qu'on les a informés en 2003 de l'existence de notre organisation. Et, faute de pouvoir nous contrôler, l'Etat tunisien a comploté avec la Ligue des Etats arabes, qui s'est précipitée de créer en 2004 un parlement arabe siégeant en Syrie pour faire croire que les peuples ont leur place dans la Ligue de ces Etats corrompus, mais bien évidemment cette illusion n'a pas réussi.
C'est dire que le régime de Ben Ali n'était pas balayé parce qu'il était corrompu (il l'était un peu trop), mais parce qu'il était stupide. Les sociétés arabes d'hier et d'aujourd'hui sont gérées avec plus ou moins de succès mais non pensées et ses dirigeants ressemblent à des chefs de tribu ou au plus à des PDG mais jamais à « de vrais hommes d'Etat». Aucun esprit brillant et ils sont, par essence, hostiles à l'intelligence et à la culture. La plupart de ces pseudo-politiques sont animés soit par des intérêts personnels ou des intérêts tribaux ou régionaux, sous une épaisse couche d'ignorance, de complexes et d'ambitions non fondées. En Tunisie, on a déjà l'Emirat de Sousse, l'Emirat de Sfax, l'Emirat de La Marsa, l'Emirat de Gabès... et autant de mafias et de monopoles.
Par ailleurs, des partis politiques ne sont que des alliances de médiocres et n'ont pour atout que la faiblesse intellectuelle et morale ambiante. Celui qui ne peut s'affirmer comme individu s'agglutine avec d'autres dans un groupe. Dès lors, l'idéal et les slogans affichés ne sont là que pour masquer l'intention honteuse.
C'est dommage qu'un pays, avec une aussi haute stature comme les USA, choisisse toujours de collaborer avec les médiocres, serviles et inconséquents, alors qu'en politique, comme vous savez, seuls la culture profonde, les valeurs et le civisme donnent au contenu des discours une crédibilité et une constance.
En tout cas, nous avons gardé le contenu de notre discussion, avec votre ambassadeur, confidentiel jusqu' à aujourd'hui (et on n'a pas tout divulgué), reste que pour nos peuples il n'y a pas de choix entre la dictature et le chaos. Ce sont les deux facettes d'une même monnaie : la décadence assurée.
Monsieur le Président,
Nous reconnaissons le coup de génie de votre administration qui a réussi (pour un temps au moins), par une «soft war» et d'un seul coup :
- à se débarrasser de « l'insolent » Ben Ali (Kadhafi...)
- àe se faire applaudir par le peuple tunisien (libyen, égyptien...)
D'offrir à nos peuples une démocratie confisquée qui serait plus maniable et plus docile que des dictatures rebelles. Les outils financiers internationaux pourront à l'occasion retenir sa fougue.
- à vendre aux frères musulmans un avenir (qui leur aurait appartenu de toute façon dans peu de temps) contre des services que vous n'aurez probablement jamais pu avoir sans cette brillante stratégie. Désespérés par l'âge et l'absence de perspectives, ils étaient –il est vrai- mûrs pour une telle transaction.
- à orienter l'éruption sociale cyclique et prévisible, à amplifier la contestation habituelle de l'Etat et de l'autorité, le conflit traditionnel entre les générations selon le principe de la boule de neige, donnant ainsi à nos peuples une occupation inefficace, voire inutile, pour les décennies à venir. Or il n'y a pas pire châtiment que le travail routinier, perpétuel et inefficace. 20 ans d'anarchie et 30 ans de guerre de religion, le temps que les richesses arabes monétaires et en matières premières soient épuisées, rendant notre aspiration à bâtir une civilisation (adossée à une véritable autodéfense) une fiction.
Cependant, nous vous demandons l'amabilité d'excuser la naïveté de nos apprentis politiques qui ont cru que les applaudissements au Congrès américain étaient adressés au peuple tunisien, alors que les sénateurs, quoi de plus normal, adressaient leurs félicitations à l''Etat américain qui a opéré en Tunisie, notamment, une révolution artificielle, préventive, qui a avorté une révolution réelle qui serait parvenue de toute façon vers 2014 (fin de règne à l'occasion d'une échéance électorale) et qui aurait pu menacer les intérêts américains (même raisonnement en Egypte).
Mais, le bébé issu de cet avortement est, comme vous constatez, prématuré et fragile. La révolution que vous avez stimulée ou orchestrée n'a pas un leader naturel. Et, nous regrettons que vous ayez eu l'indélicatesse de lui donner pour héros un malheureux vendeur ambulant dont les qualités morales et intellectuelles ne le hissent pas à un tel statut.
Par cet acte les Etats-Unis se sont projetés loin dans le passé, dans les temps pré-modernes et barbares, où la victoire n'est consommée qu'après l'humiliation de l'ennemi.
Monsieur le président,
Les applaudissements au Congrès nous ont confortés dans notre analyse que depuis deux décennies, au moins, les Etats-Unis ne prennent pas l'Empire Romain avec sa puissante armée, ses traditions, son organisation, sa monnaie universelle... comme un idéal seulement mais le prend comme modèle à suivre avec toute la hantise d'éviter à tout prix un déclin programmé. Cette hantise est dangereuse pour les USA et pour le monde entier. C'est l'idéal de vertu, de respect, de justice et d'équité qui est le meilleur rempart contre la décadence. Nos peuples arabes et musulmans ne souhaitent pas le déclin de l'Amérique, c'est l'Améqrique qui donne l'impression de vouloir nous maintenir dans un état de déclin permanent. Et quand on entend les déclarations dédaigneuses et méprisantes du candidat républicain aux élections présidentielles, on a peur pour votre pays.
Le déclin de l'Empire romain était attribué en définitive à l'incapacité de Rome à imposer son hégémonie et les murs construits par l'empereur Adrien pour protéger l'Empire n'ont pas empêché sa décadence. Les USA pensent aujourd'hui que son arsenal nucléaire et ses armes de destruction massives sont un meilleur rempart que les murs d'Adrien. C'est discutable.
Monsieur le président,
Nous étions, sur le point même de vous appeler, avec beaucoup de respect, l'Empereur Septime Sévère II.
« Toi, Romain, souviens-toi de régir l'Univers, donne aux vaincus la paix, aux rebelles des fers » criaient les sénateurs romains de l'Antiquité semblent murmurer aujourd'hui les sénateurs américains au Congrès.
Dès lors, il n'est pas étonnant que Carthage soit la première cible lors de ce grand projet de domination «romaine ».
Mais maintenant que l'ouragan a dévasté le monde arabe laissant derrière lui un chaos encore plus destructeur et que nos peuples qui rêvaient de chasser leurs dictateurs découvrent (comme disait Machiavel) qu'ils ont changé un cheval borgne contre un aveugle, nous sommes prêts à collaborer avec vous pour gérer les structures intermédiaires et les Cités de l'Empire, dans l'intérêt de nos peuples et de l'humanité toute entière.
On a cru que les modèles plus ou moins achevés fabriqués par les USA, comme celui tunisien par le passé (et qui a raté) ou celui turc aujourd'hui sont des exemples de cités romaines modernes, à moins que l'archétype soit perverti par le capitalisme financier rapace et la fièvre de l'or de Cortèse et ce sont les multinationales qui seraient de nos jours les structures intermédiaires de l'Empire alors que les boursiers Full Bright, les adhérents de Rotary Club..... joueraient le rôle des conquistadors.
À son époque, Cartèse a également chanté aux indiens l'hymne des droits de l'Homme et du plein droit à la citoyenneté pour les gagner à sa cause et les soumettre par la suite après avoir détruit tous les piliers de la noblesse sur lesquelles reposait la civilisation en Amérique du Sud.
Quant à l'ex-Union Soviétique, elle recrutait ses agents à l'étranger en faisant croire à certains naïfs qu'ils sont investis d'une mission universelle, celle de répandre le concept d'égalité. De grâce, monsieur le Président, ne faites pas croire à nos naïfs, et Dieu sait combien ils sont nombreux, qu'ils sont investis d'une mission universelle : la défence de la démocratie et de la liberté. Nous sommes, par essence même, des individus libres et nous nous soumettons qu'à Dieu. C'est même le sens étymologique du mot Islam.
Monsieur le président,
Nos peuples regrettent le décès de votre ambassadeur à Tripoli et de ses compagnons comme ils présentent leurs sincères condoléances aux familles de toutes les victimes sans considération de race ou de religion.
Par ailleurs nos peuples dénoncent avec véhémence les provocations infâmes de certains extrémistes occidentaux qui ont pris un plaisir malsain à profaner le sacré et qui nous obligent soit à la soumission honteuse soit à la réaction populaire incontrôlée. Il n'y a pas de liberté sans responsabilité. Nous nous étonnons également que la critique scientifique de l'holocauste soit prohibée alors que les insultes abjectes envers un prophète soient permises.
Nos peuples rappellent également qu'ils sont les premières victimes du Concept du chaos créateur, et souhaitent tisser des liens de respect mutuel et d'amitié solide avec le peuple américain. Par ailleurs, nous voulons que :
Cette démocratie instaurée ne soit pas manipulée et glorifiée comme une fin en soi mais comme un moyen permettant l'émergence des personnes les plus brillantes aux commandes de l'Etat (La pseudo-démocratie actuelle dans les pays arabes libérés est comme un antibiotique sous dosé qui n'arrête pas la contamination par la dictature mais sélectionne les souches les plus sauvages et les plus virulentes)
Imposer la démocratie à tous les pays arabes, y compris les pays du Golfe, des monarchies constitutionnelles à la britannique seraient commodes. Sans cela les dictatures vont bientôt regagner le terrain perdu dans le reste du monde arabe
Nous aider à instaurer, dans chaque pays, pour les douze prochaines années une alternance automatique au pouvoir, tous les quatre ans, comme un apprentissage de la démocratie, en faisant exclure de l'élection, à la fin de chaque période, le parti qui est au pouvoir en ce moment là.
Œuvrer pour une solution politique pacifique en Syrie qui ne sera envisagée qu'en excluant tous les protagonistes dans le conflit et en faisant émerger une élite neutre de l'intérieur du pays pour gérer la transition.
L'Histoire n'est pas complètement écrite, elle est toujours en construction et nous souhaitons que vous réussissiez à y écrire encore quelques pages.
Pour la Ligue des peuples arabes & musulmans
*(Médecin et juriste)


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