Par Adel LATRECH Après les Danois et les Français, voici venu le tour des Espagnols pour répandre leur fiel sur le Prophète Les musulmans ont naïvement cru qu'après leurs indépendances si chèrement acquises et au prix de beaucoup de sacrifices que les mentalités occidentales ont évolué et se sont transformées, vu que la notion de guerre sainte semble renvoyer au passé, voire à une forme d'obscurantisme médiéval, ce face-à-face. C'est à se demander si les croisades menées dans le passé évoquent encore une période lointaine de notre histoire. Il est cependant triste de constater que jusqu'à ce jour, le terme de croisades continue encore d'entrer en résonance avec notre époque, au point que le concept même de croisades est régulièrement évoqué dans l'actualité. Cette terrible confrontation à répétition menée au nom de la chrétienté horrifia les Arabes et surprit les chrétiens d'Orient eux-mêmes. Si féroce fût-il, le face-à-face ne peut toutefois se réduire au choc des armes. La rencontre des cultures en est aussi la partie intégrante. Elle eut des suites inattendues. Le peuple du Prophète Mohamed triompha finalement de bastions de la défense franque avec la fin tragique des Templiers et des ordres religieux militaires et prêcheurs des Teutoniques. Pourtant, cette civilisation musulmane qui surpassait l'Europe latine et chrétienne sur le plan matériel et intellectuel, se laissera distancer pour elle. Le centre du monde se déplacera résolument vers l'Ouest, constate l'écrivain libanais Amin Maâlouf, qui déplore que tout au long des croisades, les Arabes aient refusé de s'ouvrir aux idées venues d'Occident. Pourtant, les Européens ne cesseront pas pour autant de s'émerveiller de la culture et du vaste savoir arabes. Leur assimilation et la redécouverte, à travers eux, des auteurs de l'Antiquité, Averroès en tête, les conduiront à amorcer une profonde mutation culturelle. A qui incombe la faute ? Après le 11 septembre, George Bush emploie le mot «croisade» dans la guerre contre les talibans et Oussama Ben Laden. Plus récemment encore, en mars 2011, le ministre sortant, Claude Guéant, l'invoquait au sujet de l'intervention des forces de l'Otan en Libye. Les menaces se font plus précises aujourd'hui avec le syndrome syrien et les risques réels encourus par l'ensemble des pays arabes, laissant craindre un nouveau plan de partage semblable à celui de Sykes-Picot de 1946. L'arrivée au pouvoir de partis à sensibilité islamique, dans la foulée du printemps arabe, a galvanisé leurs fidèles et mis au service de leur cause une politique destructrice du tissu social et de la paix civile au moyen de croisades, redevenues «Jihad». Un excellent subterfuge pour multiplier des résonances qui laissent entrevoir autant de niveaux d'interprétation du combat des croyants contre le mal et les mécréants. Des caricatures au vitriol Face à l'Islam rampant, l'Occident judéo-chrétien se forge de nouvelles alliances dans lesquelles beaucoup de pays musulmans sont impliqués. La référence aux croisades se nourrit aujourd'hui de l'impérialisme actuel de l'Occident aux yeux des musulmans coupables de plus d'une bévue. Le film blasphématoire L'innocence des musulmans, la récente republication dans le journal satirique Charlie Hebdo, une bande dessinée très blessante sur l'Islam, voilà que survient sur ces entrefaits la publication dans un journal espagnol de caricatures ordurières sur notre Prophète. Les exemples de tels sacrilèges, à force d'être répétitifs, devraient être traités avec tout le dédain et le mépris qu'ils méritent. Point n'est besoin de répondre au mal par le mal. Cela ne sert que leurs auteurs. Les Oriana Fallaci, Salman Rushdie et consorts ne cesseront pas de sitôt leurs basses œuvres. En parler, serait leur accorder une importance qu'ils sont loin de mériter et que les actes hostiles qui s'ensuivent ne puissent pas être exploités abusivement à des fins évidentes. C'est à cette seule condition que ces outrages peuvent être neutralisés.