Déductions communes au titre du chef de famille et des enfants à charge seraient portées respectivement à 250 dinars et à 100 dinars par enfant Révision à la hausse de tous les timbres exigés par les administrations publiques L'importation des grosses cylindrées, de plus que 2 litres essence ou 2.5 litres diesel, sera assujettie à une taxe supplémentaire de 5 mille dinars par voiture payable à la première immatriculation. Le projet de la loi de finances de 2013 a été élaboré pour permettre la réalisation du programme économique et social du gouvernement. Les 43 dispositions et mesures sont répertoriées en six chapitres. De la promotion de la compétitivité de l'entreprise, l'investissement à la réforme du système fiscal et la lutte contre la fraude et la corruption en passant par l'équité fiscale, le projet mérite de plus amples analyses. Pour ce faire, on a rencontré Mme Habiba Louati, directrice générale des études et de la législation fiscale. «Pour booster les recettes fiscales, et redresser ainsi le déficit budgétaire, le projet de LF, dans son ensemble, vise à taxer davantage les dépenses en produits de luxe, ainsi que les gros revenus contre un allégement de la pression fiscale sur les petits revenus», résume la directrice. Ainsi, d'une pierre deux coups : restituer une partie des dépenses de compensation ayant profité à des franges sociales aisées et assurer une meilleure justice fiscale. Dans cette perspective, les révisions à la hausse de la taxation ont touché principalement les dépenses de voyages, les dépenses relatives aux voitures de tourisme, les séjours en hôtel, ainsi que les professionnels et les gros revenus. Révisé à 80 dinars, le timbre de voyage est en mesure de rapporter 14 millions de dinars supplémentaires au fonds de l'emploi 21-21. De même, la nouvelle LF prévoit d'augmenter de 25% la vignette automobile. «Dans une première réflexion, on a pensé exonérer les voitures populaires de cette majoration. Mais compte tenu du pourcentage de cette catégorie dans le parc auto national, une telle exclusion risque de diluer le résultat de cette mesure, voire la remettre en cause», explique-t-elle. Cette majoration pourrait générer 20 millions de dinars. Toujours avec les voitures de tourisme, l'importation des grosses cylindrées, plus que 2 litres essence ou 2.5 litres diesel, sera assujettie à une taxe supplémentaire de 5 mille dinars par voiture payable à la première immatriculation. De même, les non-résidents, propriétaires de voiture de tourisme, payeront un droit de 50 dinars pour circuler pendant six mois sur les routes tunisiennes. L'autre luxe que l'on pourrait s'offrir, notamment en période de crise, un séjour en hôtel se trouve aussi taxé par un droit de deux dinars par nuitée. On apprend que ce droit fait l'objet de négociation et pourrait avoisiner deux euros, soit quatre dinars. L'enveloppe constituée sera versée au fonds de la compétitivité touristique. Reste à préciser qui va payer réellement cette taxe : les hôteliers qui ont déjà négocié la prochaine saison et n'ont probablement pas assez de marge, les TO étrangers qui sont prêts à basculer d'une région à une autre pour le moindre gain supplémentaire ou plutôt le client tunisien qui renoncerait à des tarifs gonflés par cette taxe? Dans la même lignée, certaines consommations, classées sous la rubrique «de luxe», afficheront des prix plus salés. Car, l'on s'attend à une imposition supplémentaire de 1% du chiffre d'affaires des cafés, des pâtisseries et des boîtes de nuit. Du coup, ces opérateurs ne tarderont pas à répercuter cette hausse sur les prix à la consommation, tout en arrondissant les chiffres vers le dinar supérieur. La directrice argumente : «La logique est de restituer une partie de la compensation de certains produits subventionnés vendus à des prix exorbitants par ces professionnels». Une augmentation de la taxe sur la consommation des boissons alcoolisées est également envisageable pour générer des ressources d'une valeur de 170 millions de dinars. De même, tous les timbres exigés par les administrations seront révisés à la hausse. Parallèlement, l'amnistie fiscale pourrait rapporter une somme comparable à celle de 2011, à savoir 22 millions de dinars. «Un mauvais arrangement vaut mieux qu'un bon procès», rappelle-t-elle. Soutien aux petits revenus Un deuxième barème d'imposition pourrait entrer en vigueur pour assurer une meilleure équité fiscale. En effet, le nouveau tableau présentera deux nouvelles tranches d'imposition, notamment en matière des gros revenus. Ainsi, dans une nouvelle tranche de ceux qui touchent entre 35 et 50 mille dinars par an, le taux d'imposition est de 35% au lieu de 30%. De même, l'imposition pourrait avoisiner 45%, contre 35%, pour ceux qui touchent plus que 75 mille dinars par an. Pour les petits revenus, le projet de LF prévoit une déduction supplémentaire de 1.000 dinars de la base imposable de ces contribuables. De même les déductions communes, notamment de chef de famille et des enfants à charge seraient révisées à la hausse, respectivement de 250 dinars et de 100 dinars. Toujours avec cette classe relativement défavorisée, le gouvernement semble déterminé à réaliser les projets relatifs aux logements sociaux en accordant une possibilité de déduction des bénéfices réalisés dans ces œuvres de leurs bases imposables. Dans ce cadre de recherche d'équité, force est de constater que de gros revenus, notamment de quelques professions libérales ou de quelques opérateurs du régime forfaitaire, demeurent à l'abri de toute imposition et de tout contrôle. Pour éviter tout chevauchement avec le code des incitations aux investissements en préparation, le projet de LF n'a pas consacré beaucoup de mesures pour les investissements et les entreprises. La première mesure consiste en l'exonération des gratifications de fin de service, de la TFP et de la taxe du Foprolos. «Il n'est pas juste qu'une entreprise continue à payer des taxes pour un employé qui ne figure plus parmi le personnel», mentionne la directrice. De même, le projet affiche une baisse, de 0,2 à 0,1% sur le chiffre d'affaires, de la taxe sur les entreprises qui distribuent des marchandises dont les prix sont administrativement homologués et dont la marge ne dépasse pas les 6 %. C'est une mesure qui a rectifié le tir : «Une entreprise qui a payé 100 mille dinars en 2011 a vu sa dette fiscale à ce titre rebondir à 1 million de dinars. Avec ce nouveau tarif, elle payera 750 mille dinars», illustre-t-elle. Une autre mesure, de ce chapitre, vise à soutenir les jeunes promoteurs agricoles en abattant les frais d'enregistrement de transfert de propriété des terres à vocation agricole. Le projet étant encore une ébauche, on croit que le gouvernement accordera une importance particulière des investissements réalisés en 2013. Si l'exonération de ces investissements de toute imposition est quasi certaine, la période de cet avantage est encore en négociation. Par ailleurs, la directrice a insisté sur le fait qu'un programme de renforcement des équipes de contrôle est nécessaire pour améliorer le rendement de l'administration fiscale.