Proposé en 2010 par les Archives nationales de Tunisie (ANT), le fonds documentaire «La Course et les relations internationales de la Régence de Tunis aux XVIIIe et XIXe siècles» vient d'être inscrit au Registre Mémoire du monde 2011 de l'Unesco. «Les Archives nationales de Tunisie sont la première institution d'archive et la première institution à caractère culturel et historique au Maghreb à proposer l'inscription d'un patrimoine documentaire sur le Registre international du programme Mémoire du monde de l'Unesco, a déclaré à l'agence TAP, M.Hatem Hattab, chef du service des activités culturelles et éducatives au sein des Archives nationales». La Tunisie est aussi l'un des 11 pays qui figurent «pour la première fois» selon l'Unesco sur ce Registre qui s'intéresse à toute la gamme de matériaux, de supports et de cultures, de la pierre aux celluloïds en passant par les parchemins, les enregistrements audiovisuels, etc. Le Registre Mémoire du monde comprend le patrimoine documentaire qui a été recommandé par le Comité consultatif international et approuvé par le Directeur général de l'Unesco, comme répondant aux critères de sélection en ce qui concerne son intérêt international et sa valeur universelle exceptionnelle. Le Fonds authentifié par plusieurs chercheurs regroupe des documents originaux et rares rédigés en plusieurs langues «La Course» est l'objet fondamental de ce Fonds qui est constitué en majorité de documents uniques qui datent de la fin du XVIIIe et du début du XIXe siècles. Ce fonds, qui reflète pour l'essentiel l'activité de la Course et de la diplomatie de la Régence de Tunis, comprend des documents uniques, précis et exhaustifs des captifs européens, de leurs origines sociales et ethniques dans leurs pays d'origine, les biographies de certains d'entre eux, de leurs parcours professionnels, voire politiques durant leur captivité dans la Régence de Tunis. A cette époque, la Course était intimement liée aux relations internationales et jouait un rôle important dans les équilibres politiques et stratégiques tout en contribuant au dialogue des cultures et aux métissages ethniques et linguistiques. De ce point de vue, ce fonds peut être vu de nos jours comme source de dialogue entre civilisations et cultures. En effet, sa richesse provient aussi du fait qu'il contient des documents originaux et rares rédigés en plusieurs langues telles que l'arabe, l'osmanli, le français, l'espagnol, l'italien et l'anglais. Bien conservés, ces documents couvrent un espace géographique allant de la Régence de Tunis jusqu'aux Etats-Unis d'Amérique en passant par l'Europe, le Levant et les pays scandinaves. En ce qui concerne l'authentification du fonds, il ne s'agit en aucun cas ni de copies, ni de répliques, ni de documents apocryphes, ni de canulars. L'authenticité du fonds a été attestée par plusieurs chercheurs qui l'ont consulté et dont les documents ont été la base de leurs publications et ouvrages. Selon le rapport de l'Unesco, toutes les informations que révèlent les documents de ce fonds et relatives aux lieux, aux événements, aux personnes et à l'époque sont fiables et vérifiables dans les sources historiques et les archives d'autres pays notamment méditerranéens. En effet, les listes des captifs, les traités avec les pays étrangers, les correspondances diplomatiques officielles et les registres de la comptabilité de l'Etat proviennent des Archives de l'Etat tunisien et sont le produit de ses administrations. Deux documents uniques: le passeport de Mahmoud Jellouli et une lettre adressée au captif d'origine napolitaine Mariano Stinca Parmi la liste complète de ce fonds figurent deux documents uniques, a relevé M.Hatem Hattab: le passeport du militaire Mahmoud Jallouli en mission à Malte pour acheter des armes pour le Bey de Tunis, en date de mars 1813, et une lettre personnelle rédigée en italien et adressée par un ami de Messine à Mariano Stinca, datée du 19 août 1809. Mariano Stinca était un captif d'origine napolitaine, au service de Hamouda Pacha Bey de Tunis (1782-1814). Il a laissé, après une longue période d'activité comme homme d'Etat, un grand nombre de documents rédigés en italien et contenant des correspondances officielles et des états comptables. Il fut aussi l'interprète personnel du Bey, son secrétaire et chef du protocole. Ces fonctions lui ont permis de faire une grande fortune et de passer des dizaines de marchés avec les commerçants européens et juifs pour le compte du Bey ou bien pour son propre compte. Ces dossiers contiennent aussi ses correspondances personnelles avec sa famille en Italie. Les captifs présents dans la cour des Beys de Tunis sont parvenus à introduire leurs langues devenues de plus en plus utilisées pour la rédaction des correspondances officielles avec l'étranger. Pour rappel, en novembre 2010, une réunion du Comité national tunisien du programme Mémoire du monde de l'Unesco s'est tenue à Tunis pour examiner les propositions d'inscription des pays du Maghreb sur le Registre international, ainsi que les actions à mener pour promouvoir plus largement le patrimoine documentaire de la Tunisie. Mis en place par l'Unesco en 1992, le programme «Mémoire du monde» vise à promouvoir la conservation des collections d'archives et de bibliothèques partout dans le monde et d'en assurer la plus large diffusion. Les comités régionaux sont des structures coopératives qui proposent un mécanisme de coopération dépassant l'échelon national, dans le but de poursuivre les objectifs du programme.