Par Ezzeddine Ben Hamida Un des postulats fondamentaux de la théorie économique classique libérale est de considérer que la somme des intérêts individuels converge vers l'intérêt général. Autrement dit, la rationalité du comportement de l'individu et la poursuite de son seul intérêt conduisent à l'intérêt collectif. Nous proposons ici d'extrapoler ce postulat qui relève de la théorie économique, connue aussi par la métaphore (le principe) de la « main invisible » d'Adam Smith (philosophe et économiste écossais du 18e siècle), aux comportements des hommes politiques tunisiens. Aussi, les intérêts individuels de nos dirigeants correspondent-ils à ceux du peuple Tunisien ? Les carrières et les ambitions politiques de certains convergent-elles forcément vers l'intérêt suprême de l'Etat ? L'appétit et la convoitise de quelques-uns sont-ils en adéquation avec nos aspirations ? L'avidité de Moncef Marzouki pour la présidence concorde-t-elle avec l'avidité du peuple pour la justice sociale ? Les appétences politiques de Mustpha Ben Jaâfar travaillent-elles l'intérêt général du peuple ? Le désir, la soif et l'immuable envie de Rached Ghannouchi pour l'instauration d'un régime islamiste ne sont-ils pas éloignés des aspirations démocratiques des Tunisiennes et des Tunisiens ? Ainsi, les concessions démesurées de Moncef Marzouki et de Mustapha Ben Jaâfar au profit d'Ennahdha ne sont-elles pas en totale contradiction avec leurs engagements électoraux ? Leur complaisance et indulgence avec ce mouvement ne sont-elles pas vécues comme étant une trahison par la majorité de leurs électeurs ? Ces deux médecins ne sont-ils pas aussi responsables de la dérive sécuritaire que connaît le pays et du marasme économique et social que nous vivons? En s'accrochant ainsi à leur fonction, ne sont-ils pas en train de couvrir les agissements d'Ennahdha et sa stratégie de noyautage de l'administration et de la haute fonction publique ? Franchement, le président de la République et le président de l'Assemblée constituante ne devraient-ils pas démissionner ? L'histoire ne retient-elle pas plutôt leur avidité du pouvoir que leur supposé sens du consensus ? Certes, la démission de Moncef Marzouki et de Mustapha Ben Jaâfar pourrait précipiter le pays dans une crise institutionnelle grave mais les crises ne sont-elles pas aussi des moments de « destruction créatrice » ? Les Tunisiennes et les Tunisiens qui ont défié courageusement le tyran et bravé sporadiquement l'appareil de répression du misérable déchu ne sont-ils pas capables de surmonter derechef de nouveaux défis ? Envisager des alliances politiques avec monsieur Rached Ghannouchi, c'est faire le choix de faire valoir la suprématie du « politique » sur « l'idéologique », alors que la démarche du leader du mouvement Ennahdha d'apparence consensuelle, analysée en filigrane, ne montre-t-elle pas qu'il cherche constamment, consciemment ou inconsciemment, à faire valoir « l'idéologique » sur le « politique » ? Voulons-nous une société qui prône le retour vers le passé, conservatrice et profondément fondamentaliste ou au contraire une société résolument tournée vers l'avenir, moderne et surtout progressiste ? Réduire les femmes aux tâches domestiques et à leur simple fonction de procréation, comme le prônent les salafistes rétrogrades et certains hauts responsable du mouvement Ennahdha, est non seulement une absurdité morale et sociale mais aussi économique ; en somme, une forme d'hémiplégie mentale. Pour finir, force est de constater que les intérêts individuels de nos dirigeants et les aspirations sociétales et doctrinales de certains partis ne convergent pas avec l'intérêt général de notre nation et les aspirations démocratiques et progressistes de nos concitoyens !