L'avenue Habib-Bourguiba, animée par les derniers festivaliers et par la projection de rue nocturne, disait au revoir aux journées cinématographiques de Carthage. C'était samedi dernier, date de clôture de la manifestation. A l'entrée de la salle le Colisée, un passage fluide des invités a été prévu, afin d'éviter ce qui s'est passé pendant l'ouverture. Comme au premier jour, les techniciens de cinéma ont manifesté devant la salle, réclamant plus de reconnaissance et une structure qui les rassemble et protège leurs droits. Les invitations étaient marquées selon la catégorie, mais cela n'a pas été respecté, une fois les convives dans la salle qui s'est très vite remplie. De nombreux retardataires, surtout les invités du festival entre réalisateurs et acteurs, ont peiné à trouver une place, livrés à eux-mêmes. Le retard du lancement de la soirée a permis à l'espace de s'animer, aux journalistes de faire plus d'interviews. Parmi les chaises, on chuchotait ses pronostics ou bien on relançait des rumeurs sur le palmarès. La musique des frères Mohamed et Béchir Gharbi — violoniste et luthiste accompagnés d'un percussionniste — a pris ensuite la parole et dirigé les regards vers la scène, pour offrir au public un morceau instrumental. Le début de la cérémonie a été tout de suite après annoncé par les paroles de son animateur, Mondher Kalaï, qui présente l'avantage de s'exprimer en arabe, en français et en anglais. Il a cédé la parole au directeur de la session, Mohamed Médiouni, qui a parlé d'année record, en nombre de films et de salles participantes, tout en admettant que cela a permis de détecter le manque de matériel de pointe. Il fait ainsi référence aux nombreux problèmes techniques rencontrés pendant la projection, dont il s'est excusé en rappelant que le comité d'organisation n'a pas bénéficié d'un budget conséquent pour une pareille manifestation. A son tour, le ministre de la Culture, Mehdi Mabrouk, a reconnu, dans son allocution, les lacunes d'organisation, dont la responsabilité incombe à tous, a-t-il expliqué, répliquant indirectement ainsi à Médiouni, tout en saluant l'amour du public pour l'art et pour la vie. Une traduction en langue française des deux discours défilait en simultané sur l'écran. Mondher Kalaï a repris la parole pour annoncer un petit film d'ambiance sur ce qu'ont été les JCC 2012. Aussi avons-nous appris que 100.000 spectateurs ont fréquenté les salles et ont choisi leur long métrage préféré qui s'est avéré être celui du jury de la compétition officielle internationale. Avant cela, les prix parallèles, les prix d'interprétation, de scénario, de court-métrage et de documentaire ont été décernés, tant bien que mal. Plusieurs fois, les annonces en arabe et en français venaient en avance ou en retard. Celui ou celle qui remportait le prix pouvait apparaître trop tôt sur scène, se faire trop attendre ou se révélait...absent. Pour recevoir le Tanit de Bronze du documentaire, remporté par Tout ça et plus du Libanais Wissam Charaf, un jeune se présente avec, entre les mains, une pancarte sur laquelle il est écrit l'équivalent de «vous nous avez maltraités». Il s'agissait d'un Tunisien, Youssef Jmour, membre du comité d'organisation des JCC qui a tenu à manifester contre les conditions de travail et la marginalisation de l'équipe. L'on se demande si la manière qu'il a choisie était la plus sage, mais il nous pousse à réclamer, encore une fois, haut et fort, que les JCC bénéficient d'une structure d'organisation permanente, afin de réduire les problèmes de logistique, d'un côté, protéger les droits des soldats de l'ombre, de l'autre. Ces derniers ont quand même bénéficié d'un tout petit film projeté en leur honneur pendant la cérémonie. L'annonce des Tanit de la compétition officielle est enfin venue pour lever le suspense, avant de laisser place à la projection du film de clôture Mama Africa de Mika Kaurismaki. La remise des prix s'est déroulée sans grande émotion et des applaudissements éparpillés, surtout que les Tunisiens n'ont pas été beaucoup cités dans le palmarès, lui-même contesté par quelques voix qui se sont élevées dans le public, acclamant surtout Les chevaux de Dieu de Nabil Ayouch. Ce palmarès, qui semble ne pas faire l'unanimité, a de quoi se défendre, le jury ayant favorisé, cette année, le côté recherche et innovation dans le langage cinématographique. Après tout, les prix, c'est partout ainsi!