Des employés travaillant dans le cadre de la sous-traitance à l'Office national des postes (ONP) observent un sit-in ouvert au siège social à Tunis depuis le 25 décembre 2012. Cinq personnes font une grève de la faim sauvage. Elles revendiquent la régularisation de leur situation. Le 3 janvier 2013, un accord a été signé entre le gouvernement et l'Union générale tunisienne du travail (Ugtt) relatif à la suppression de la sous-traitance dans le secteur public. Le procès-verbal de la réunion stipule que la situation des agents contractuels sera régularisée, à travers leur intégration dans l'entreprise publique. Or, la situation des employés travaillant dans le cadre de la sous-traitance à l'Office national des postes n'est régie par aucun contrat. Ces employés, ouvriers de gardiennage ou de ménage et chauffeurs, qui vivaient déjà dans l'incertitude depuis 2011, se demandent aujourd'hui s'ils seront concernés par les nouvelles dispositions prises par le gouvernement. Avant même que l'accord du 3 janvier n'ait eu lieu, ils avaient demandé audience auprès de la direction de l'ONP, du ministre de la Technologie de l'information et de la Communication, du ministre des Affaires sociales et de l'Ugtt, pour discuter de leur statut. Une réunion était prévue à Tunis pour le vendredi 4 janvier, mais elle a été reportée pour le lundi 7, parce qu'il y a eu une séance plénière à l'Assemblée nationale constituante (ANC) le même jour et à laquelle devaient assister les ministres. Les employés s'étaient pourtant mobilisés pour l'occasion, et sont venus de plusieurs gouvernorats dont Sousse, Nabeul, Tozeur, Kébili, Gafsa et Kef. Au siège social de l'ONP, ils sont actuellement près d'une centaine à observer un sit-in ouvert. Des femmes et des hommes de tout âge, unis pour une même cause : la régularisation de leur situation. Cinq hommes ont entamé une grève de la faim sauvage. Deux autres les ont précédés et seraient actuellement hospitalisés. Dignité bafouée «Le jour de la révolution, je récurais les toilettes à 4h du matin à mon lieu de travail, dans l'insécurité totale», déclare une ouvrière venue du Kef. La sous-traitance à l'ONP, d'après les témoignages recueillis, veut dire pas de congés payés, pas d'assurance maladie, pas de prime ou aucun autre avantage dont bénéficient les salariés. Cela peut vouloir dire aussi 90DT de salaire pour une femme de ménage et 300DT pour un gardien qui, lui, doit enchaîner 12h00 de travail d'affilée par jour, sept jours sur sept. Tout cela, avec le risque de se retrouver sans travail du jour au lendemain, puisqu'il n'y a pas de contrat. Pas de contrat implique également ne pas être affilié à un syndicat pour défendre ses droits. Le 22 avril 2011, il a été décidé de supprimer la sous-traitance dans le secteur public en Tunisie. Les employés, qui travaillaient pour des entreprises privées, ont rejoint les organismes publics. Beaucoup disent avoir perdu au change, avec la suppression des jours de repos et la baisse des salaires. «Comment peut-on donner un bon rendement dans ces conditions ?», s'interroge un employé de la poste à Gabès. Dans la foulée, les contestataires accusent l'administration de l'ONP de corruption, de ne jamais appliquer les PV de réunion et à l'Ugtt on reproche de ne pas les soutenir par des grèves. Au siège social, deux députés de l'ANC ont rendu visite au sit-inneurs. L'un d'eux leur a promis de porter leurs voix au gouvernement, en particulier au ministère des Affaires sociales. Et après ? «Cette situation n'a que trop duré. Notre dignité a été trainée dans la boue », clame un ouvrier. « Nous, les habitants des régions frontalières, allons immigrer en Algérie si cela continue», prévient un autre. Dans la salle en effervescence, au rez-de-chaussée de l'ONP, on s'est entendu de se nourrir «de pain et d'eau» jusqu'à lundi et d'entamer, ensuite, une grève de la faim générale au cas où aucune mesure ne serait prise par les autorités compétentes.