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Comment saborder la mémoire collective?
Profanation des mausolées
Publié dans La Presse de Tunisie le 19 - 01 - 2013

Les agressions contre les mausolées se poursuivent au bon rythme. La profanation de Sidi Bou Saïd, célèbre lieu saint surplombant la toute aussi célèbre colline verdoyante de la banlieue nord de Tunis, a plongé une partie de la population dans une profonde émotion. L'attaque vient après une série ciblant méthodiquement les édifices religieux. Le laxisme des autorités et l'absence de poursuites ont incité les agresseurs à reconduire en toute impunité leurs actes, sous prétexte doctrinaire. L'islam soufi et maraboutique étant sévèrement condamnés par la thèse islamiste radicalisée qui a fait des adeptes dans le pays depuis la révolution. De rite malékite réformé, les Tunisiens, dans leur majorité, se sentent agressés au quotidien par ce rigorisme venu d'ailleurs qui ne cesse de saper leurs croyances, traditions et tout ce qui compose l'identité tunisienne, à commencer par le drapeau.
L'assaut contre Sidi Bou Saïd, classé patrimoine mondial, perpétré le 12 janvier, à quelques jours du Mouled, fête religieuse, où, traditionnellement, des processions prenaient le mausolée comme point de départ, a été le coup de grâce. Les résidents, épaulés par des compatriotes venus en renfort ont manifesté bruyamment leur colère deux jours durant. Tant et si bien que les officiels qui avaient pris le pli en pareilles circonstances, de faire part, via des communiqués soignés et fermes, de leur totale condamnation, se sont crus obligés de se déplacer. Les ministres de la Culture et de l'Intérieur, venus condamner sur terrain, ont été contraints de regagner rapidement leurs voitures sous les huées. Le président de la République, voisin proche du village endolori, n'a pas eu droit à meilleur traitement. Il a été «dégagé» illico par des Tunisiens en colère.
Comment le prendre ?
Une colère qui s'explique face à ce qui a été considéré comme une totale démission de l'Etat. Les hypothèses officielles expliquant l'incendie ravageant totalement le lieu saint ont jeté de l'huile sur le feu. La thèse criminelle a été diligemment avancée. Les théories de l'accident fortuit provoqué par un court-circuit ou par des braises encensées qui se seraient propagées ont eu également bonne presse. Comment le prendre ? Quand de Tataouine à Bizerte, la carte des mausolées attaqués présente un inventaire accablant des atteintes systématiques de la culture populaire et du patrimoine des Tunisiens. Quand le ministère de la Culture annonce «un chiffre qui dépasse et de loin ce qui a été dit jusque-là». Comment le prendre ? Quand après chaque profanation d'un lieu saint, les congratulations pour le trophée apporté à la confrérie et «pour avoir eu raison du «taghout», tyran mécréant, envahissent la sphère jihadiste du web.
Sidi Bou Saïd ; tendrement appelé «El Béji» en référence à sa ville natale du Nord-Ouest, Béja, et ses pairs, Sidi Belhassen, Sidi Abdelziz, Sidi Yacoub, Sidi Abdelkader, Sidi Sahbi, Sidi Mansour, Sidi Salem... et Saïda Manoubia ont consacré leurs vies à la prière, à diffuser les préceptes d'une religion aimante et tolérante et à faire le bien autour d'eux. Pourquoi les considère-t-on comme les ennemis de la religion et la source de dérives ?
Fausse lecture de la religion
Le ministère des Affaires religieuses répond par la voix de M. Abdessatar Badr : Ce sont des actes absurdes qui ne mènent à rien et choquent tout le monde. Et, c'est une fausse lecture de la religion, a-t-il regretté, qui associe la visite des marabouts à une déviation superstitieuse, voire même au sacrilège capital du « shirk » associationnisme. C'est le fait de réclamer l'appui du saint et non pas divin qui les révulse, a-t-il développé. Mais, même sur le plan exégétique, il y a confusion. Si l'on se basait sur «El Kiass» l'analogie, le prophète avait interdit au commencement de l'ère islamique la visite des cimetières. Après l'enracinement de l'islam, il l'avait consentie. Nous condamnons fermement, a pris soin d'ajouter le directeur général, et ce n'est pas en incendiant des édifices qui ont une valeur symbolique et une charge historique que vous allez inculquer la foi aux gens, a-t-il lancé. Oui mais les condamnations n'ont pas suffi visiblement jusque-là, rétorquons-nous ? Nous sommes un ministère technique, a tout de suite réagi M. Badr, nous n'avons pas les moyens de la force publique, comme le ministère de l'Intérieur. Notre rôle se limite à former les prédicateurs, à sensibiliser la population à travers les prêches du vendredi. Nous essayons de coordonner avec le ministère de l'Intérieur et le Contentieux de l'Etat quand des actes similaires sont perpétrés, a-t-il avoué en concluant.
Le ministère des affaires religieuses supervise donc la pratique religieuse qui se tient dans l'enceinte du mausolée. Le statut juridique des mausolées relève du ministère de la Culture, donc de l'Etat. Qu'a fait l'Etat à ce jour pour protéger ces lieux saints, ces édifices architecturaux chargés de mémoire ?
On se renvoie la balle
Joint par La Presse, Abdellatif Mrabet, nous précise qu'un inventaire des mausolées attaqués dans les campagnes, les villages et les grandes villes est en passe d'être publié. Nous avons condamné, ajoute laborieusement le chargé de mission auprès du ministre de la Culture, et intenté quelques actions en justice. Des commissions mixtes sont à pied d'œuvre pour le recensement et la réparation, énumère encore M.Mrabet. Nous sommes en contact permanent avec les associations de sauvegarde de la médina de toutes les régions. Nous considérons ces monuments comme faisant partie de notre patrimoine, a-t-il encore argumenté, et veillons à ce qu'ils soient transmis aux générations futures. Cela nous engage à intervenir matériellement, et c'est notre mission. Que peut-on faire de plus ? Nous ne sommes pas seuls à défendre le patrimoine. C'est l'affaire des autres ministères aussi, lance le chargé de mission dans une interpellation similaire à un cri d'alarme.
Tout compte fait, le ministère de l'Intérieur semble, seul, disposer de la force logistique mais aussi des attributions requises pour agir. Lotfi Hidouri précise à La Presse, et à ce titre au moins, sa déclaration a le mérite de la franchise: «Nous ne pouvons assurer la protection de tous les lieux, imaginez ceux qui sont perchés sur une montagne», a-t-il interrogé pragmatique. Et ceux qui sont célèbres, et déjà attaqués, demandons-nous? Quelques enquêtes sont en cours, répond le porte-parole du ministère de l'Intérieur, mais je n'ai pas de précisions sur les nouvelles dispositions prises. Nous agissons en coordination avec les deux ministères des Affaires religieuses et de la Culture, uniquement, lorsqu'ils nous sollicitent».
On se renvoie la balle ! Cette histoire par son cheminement nous rappelle celle des jardins d'enfants coraniques. Espaces d'éducation destinés à la petite enfance, hors la loi et hors contrôle, ayant pu proliférer au bénéfice des vides juridique et institutionnel. Ce même déficit permet aujourd'hui la destruction méthodique et acharnée de la mémoire collective des Tunisiens au nez et à la barbe des autorités. Ce même déficit, serait-il les prémices de l'enracinement de l'islamisme wahabite radical au cœur de la cité Tunisienne ? Si c'est le cas, nous connaissons la suite, d'autres contrées ont déjà fait l'essai.
L'INP condamne
Le syndicat des chercheurs de l'Institut national du patrimoine (INP) condamne, dans un communiqué publié hier «l'agression odieuse à l'encontre des monuments historiques et des sites archéologiques». La multiplication des actes de destruction du patrimoine matériel et immatériel, explique le syndicat, «constitue un tournant dangereux portant atteinte au patrimoine civilisationnel et culturel de la Tunisie».
Le syndicat appelle dans ce contexte «les autorités, partis politiques démocratiques et composantes de la société civile à faire face à ces horribles profanations qui menacent les fondements de l'identité et de la culture richissime de la société tunisienne».
Le bureau syndical relevant de l'Union générale tunisienne du travail (Ugtt) tient à rappeler qu'«au moment où les structures du ministère de la Culture et les composantes de la société civile s'emploient à préserver et restaurer les monuments historiques et les sites archéologiques et récupérer le patrimoine spolié, on assiste à des agressions répétées et des opérations d'appropriation illégale de plusieurs monuments historiques», citant l'incendie du mausolée de Sidi Bou Saïd El Beji. En ce qui concerne le cas de l'école Khaldounia, le communiqué précise que «la transformation de son usage a été entreprise sans consultation des départements concernés du ministère de la Culture».


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