Le 5e chapitre du brouillon de la Constitution relatif au pouvoir juridictionnel comporte, aux yeux de certains magistrats et juristes, des lacunes à combler. Ce, afin de garantir autonomie et indépendance à un secteur vital pour la démocratisation de l'Etat. Voilà ce qu'ont convenu d'admettre des magistrats et juristes, réunis, hier, à Tunis, dans le cadre d'un atelier présidé par le président de la Commission des juridictions au sein de l'Assemblée nationale constituante (ANC), Fadhel Moussa, et le rapporteur général de la Constitution, Habib Khedher L'article 100 du chapitre en question a suscité l'intérêt de plusieurs intervenants qui ont souligné que l'on n'y mentionne pas les standards internationaux comme référence majeure. Ce qui constitue, selon certains, un pesant manquement à étudier. Pour Raoudha Karafi, tout comme pour Anas Hamadi, membres de l'Association des magistrats tunisiens (AMT), le fait d'ignorer les standards internationaux dans cet article vide la notion d'indépendance de son acception la plus large et contredit les conventions internationales ratifiées par le pays. Samar Jiîdi du Syndicat des magistrats tunisiens a fait remarquer que l'article 101 insiste sur les dimensions punitives à l'égard des magistrats commettant des dépassements, sans pour autant mentionner l'impératif de garantir aux professionnels concernés des conditions de travail décentes. Les réserves émises concernant l'article 106 réprouvent le fait de laisser vague la notion d'intervention dans le secteur de la magistrature. Les émetteurs de ces réserves ont, de ce fait, appelé à définir et à déterminer tous les dépassements possibles afin que les choses soient claires. Le bâtonnier Mohamed Salah Ben Aïssa s'est attardé, lui, sur la place de la Cour constitutionnelle dans la Constitution, proposant de lui consacrer un chapitre à part entière au lieu de l'intégrer dans celui du pouvoir juridictionnel. Comme il l'entend, il s'agit d'une grande institution qui «doit occuper le sommet de la pyramide». Or, l'intégrer dans ce chapitre est un «fait réducteur». L'autre article qui a suscité une grande polémique et de vives réactions durant la séance matinale de cet atelier se rapporte à la composition du Conseil supérieur du pouvoir juridictionnel. En effet, tous les intervenants se sont déclarés inquiets de la composition prévue par le projet de Constitution pour cette institution : 50 % de magistrats, dont certains sont désignés et d'autres élus et 50% qui ne sont pas des magistrats mais qui relèvent de l'ensemble du secteur. Une composition qui limite, selon eux, le nombre de magistrats élus. Ce qui peut ouvrir grandement la voie devant «le retour des pratiques des années de braise» : la consécration de la dépendance de la magistrature et la manipulation des magistrats. Ils ont, de ce fait, appelé à la création de plusieurs commissions au sein de ce Conseil, dont une qui s'occuperait uniquement des affaires et du processus professionnel des magistrats.