En vue d'établir la Constitution selon un consensus et une entente entre les divers partis et les composantes de la société civile, conforme au slogan de la révolution (liberté, dignité et égalité des droits) et répondant aux aspirations de tous les Tunisiens, sans prédominance d'aucun parti dans l'établissement de la Constitution et dans le cadre du dialogue national sur le projet de la Constitution, organisé par l'Assemblée nationale constituante (ANC), en collaboration avec le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud), les représentants des divers partis politiques, les experts juridiques et en droit constitutionnel, les représentants des associations et des organisations de la société civile, les étudiants... se sont réunis en concertation avec les membres de l'ANC pour discuter du projet de la Constitution, hier à Sousse, dans un hôtel de la place. Le projet de Constitution en question comporte 149 articles répartis sur 9 chapitres, à savoir ceux «des principes généraux», «des droits et libertés», «du pouvoir législatif», «du pouvoir exécutif», «du pouvoir judiciaire», «des commissions constitutionnelles», «du pouvoir local», «de la révision de la Constitution» et «des dispositions finales». Principales suggestions Les divers intervenants ont émis plusieurs suggestions, dont les plus importantes sont comme suit : — Amendement de l'article 66, qui devrait stipuler l'élection du président de la République pendant 5 ans, mais non renouvelables. — L'écriture de la Constitution doit être claire du point de vue juridique, succincte et avec des termes pertinents. — Dans l'article 4 du chapitre relatif aux principes généraux, l'on doit mentionner que l'Etat «garantit la liberté de croyance et de pratique des rites religieux» et non «prend en charge cette liberté...». — La garantie de la liberté de l'habit chez la femme. — Dans l'article 68, quelques intervenants ont suggéré la suppression de la phrase qui stipule que le président de la République bénéficie de l'immunité judiciaire après la fin de son mandat. Des propositions Quelques membres de l'ANC et représentants des partis et de la société civile nous ont fait part de leurs propositions à cette occasion. M. Mohamed Gahbiche, membre de la commission constitutionnelle de la justice au sein de l'ANC et du parti de l'Alliance démocratique, nous a déclaré que le projet de la Constitution doit être amélioré et précisé dans un langage juridique bien défini et pertinent surtout au niveau du préambule de la Constitution. La rédaction des articles sur les libertés doit être révisée dans un sens qui protège ces libertés d'une façon claire sans pour autant essayer de les amoindrir par un retour à la notion de l'ordre public. Concernant les chapitres se rapportant au pouvoir législatif et exécutif, il faut revoir les pouvoirs du président de la République pour assurer un équilibre entre le pouvoir du président et celui du président du gouvernement, et ce, dans l'espoir de s'orienter vers un régime semi-présidentiel. Quant au pouvoir judiciaire, a-t-il ajouté, il faut assurer l'indépendance de la magistrature d'une façon claire et revoir la composition du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire dans le cas où la représentativité des magistrats soit supérieure à 50% et que ces magistrats soient élus par leurs confrères. Mme Najoua Mestiri, secrétaire générale de l'Association Forum de la société civile et présidente de l'Association des femmes créatrices arabes, nous a indiqué qu'elle suggère la constitutionnalisation de «l'institution du médiateur administratif», car celui-ci joue un rôle très important dans la préservation des droits administratifs pour le citoyen ainsi que dans la réforme et l'amélioration du service administratif. Dans l'article 41, il a été mentionné que l'Etat encourage la créativité culturelle et appuie la culture nationale sous toutes ses formes..., sans pour autant mentionner son devoir de financer et de garantir les conditions favorables à la généralisation de la culture dans toutes les régions du pays pour toucher le maximum de citoyens et assurer la démocratisation de la culture. «Je suggère aussi dans l'article 68 la suppression de la dernière phrase qui stipule que le président de la République bénéficie de l'immunité après la fin de son mandat pour assurer le maximum de responsabilisation de ce dernier dans tous ses actes et ses décisions». M. Zied Ladhari, membre de l'ANC et du parti Ennahdha, nous a indiqué que le projet de Constitution exprime en fait le consensus établi entre les différents partis et sensibilités au sein de l'ANC. Un effort reste à faire au niveau de la rédaction ainsi qu'au niveau de la cohérence bien que le projet du texte de la Constitution soit le fruit d'une discussion qui a duré 10 mois tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'ANC (société civile, experts, personnalités nationales...). M. Salah Chouaïb, président du Parti «la Troisième voie», nous a déclaré : «Ce qui m'intéresse actuellement, c'est la garantie des libertés individuelles et collectives, et ce, avant de passer à l'étude approfondie de la Constitution, du budget, ainsi que de la loi de finances. En ce qui concerne la Constitution, j'ai dit et j'ai réclamé qu'il faut partir de la Constitution de 1959 car elle renferme les objectifs de la révolution actuelle mais elle nécessite certaines modifications concernant en particulier les libertés individuelles et collectives, le régime politique ainsi que le système économique. J'ajoute que la Constitution réelle ne sera définie qu'après sa discussions au niveau de l'ANC». M. Noumi Abdedayem, membre du comité exécutif de l'Association internationale des prisonniers politiques et du Réseau tunisien de la justice transitionnelle, nous a formulé que le projet de Constitution comporte un préambule qui doit être normalement court, simple, succint et à sens juridique. Il manque dans le préambule le slogan de la révolution (dignité, liberté et égalité des droits). Le préambule doit mentionner clairement le refus de l'exclusion, de l'oppression, de la corruption et de la spéculation ainsi que la vision future et les nouvelles ambitions du nouvel Etat tout en tenant compte de l'histoire du pays et la concrétisation d'un Etat démocratique moderne.