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A la recherche du temps suspendu
Livres - Essayda El Mannoubyya de Mohamed Bouamoud
Publié dans La Presse de Tunisie le 19 - 04 - 2013

A l'instar des romans historiques qui ont effectué un retour sur des figures de proue de l'histoire de la Tunisie, comme la Kahéna, Jézia El Hilaliya, Hannibal et tant d'autres, le roman de Mohamed Bouamoud nous révèle la plume du journaliste talentueux qui médite sur la terre tunisienne du XIIIe siècle et esquisse un personnage mythique et homérique qui appartient à notre riche culture, en réclamant l'acte d'une reconstitution libre —parce qu'elle permet la fiction romanesque— des faits et évènements historiques, et ce, particulièrement, à travers la littérature. La conscience de ce premier roman sur Essayda El Mannoubyya est affirmée dans le désir du romancier d'ôter les décombres sur cet être historique particulier afin d'apporter une meilleure connaissance du tissu socio-historique tunisien.
Le mythe est toujours fécond car ses lectures sont plurielles. Et cette pluralité est créatrice puisqu'elle découle d'une imagination représentée grâce à l'image, notamment. L'auteur a choisi une image simple mais très intense. En effet, il a mis en relief la dimension humaine de cette héroïne, qui, bien que sainte, ne néglige pas le fait que le mythe et la fiction ne peuvent qu'être représentatifs d'une réalité lumineuse.
La guerre des saints n'aura pas lieu !
Dans le roman, on vit et voit les périples de cette femme, son parcours, et les sentiers pénibles par lesquels elle a dû passer pour pouvoir poursuivre un chemin salutaire : Le chemin vers la Vérité suprême. Ce chemin a créé pour Lella un champ d'expansion inégal où règnent l'amour, la générosité, le partage et la loyauté. Ces valeurs, remises en évidence, qui appartiennent à un passé lointain, ne sont en conséquence que des valeurs impérissables. L'auteur a voulu saisir ce personnage historique par le biais d'une imagination libre et non en ayant recours à la documentation précise et limitée. D'ailleurs, Milan Kundera disait à ce propos : «Dans un monde bâti sur des sacro-saintes certitudes, le roman est mort». Et c'est justement là que réside l'art littéraire qui immortalise ces personnages : le romancier et les héros. La littérature laisse comprendre que la vérité est indéfinissable et évanescente, et Bouamoud nous a dévoilé un des postulats de la langue littéraire; celui de lire et réécrire, à sa manière, le personnage de Lella transmis par les comportements, les caractères, les habitudes et les traditions qu'a maintenus notre société vivante. Toutes ces valeurs ont existé et continueront de résister aux noirceurs et à l'obscurantisme qui ont attaqué la Tunisie actuelle. Implicitement, la plume narratrice de Mohamed Bouamoud fait donc appel à la défense de ces valeurs. Lointaine est cette époque, certes, mais ô combien Lella est proche de nous dans ce roman, dans sa profondeur extrêmement sensible, dans sa façon de prêter main-forte aux personnes les plus démunies, aux femmes les plus opprimées et dans sa manière d'exhorter l'égalité entre hommes et femmes, entre pauvres et riches, somme toute, entre toutes les catégories sociales, d'où son humanisme profond qui l'élève au rang des élus au sein du paradigme social tunisien.
Ainsi priait Lella Mannoubyya
Dans ce roman, le personnage de Lella nous rappelle le fameux Zarathoustra de Nietzsche dans sa sagesse, ses errances, sa solitude et dans sa foi purifiée, mais le surhomme, ce demi-dieu tant prôné par le philosophe, est introuvable chez Lella Essayda : l'existence est pour elle transfigurée grâce à l'humanité de l'être, et ce, en semant l'amour de Dieu afin de récolter la paix et l'égalité et non en s'estimant un être supérieur à tous les autres ou en divinisant les êtres humains.
Ainsi Lella, qui prononçait, lisait et apprenait aux ignorants les saintes paroles, a gagné ses galons en tissant avec les mots des actes nobles et des relations pures avec sa société. N'est-ce pas Bouddha qui disait : «Quel que soit le nombre des saintes paroles que vous lisez, que vous prononcez, quel bien vous feront-elles si vos actes ne s'y conforment pas?».
Par ailleurs, Mohamed Bouamoud évoque avec récurrence «les trois pas» dans son roman, ces pas qui, après ses rencontres avec El Khidhr, donnent à Lella un élan mystique et une énergie prodigieuse, ont renforcé le mystère de cette femme. Les trois pas renvoient à l'éternel retour, c'est-à-dire le retour au Suprême qui implore le lien tridimensionnel entre l'individu, la société et Dieu. Ainsi, le destin de cette femme, pour qui «chacun était libre de ses actes, de ses convictions», a été bien accompli, notamment lorsqu'elle a ravitaillé l'éthique du bien avec ses destinataires.
Sans ciller et faisant preuve d'un grand courage, cette femme dont «l'élan fougueux» a dérangé les esprits dogmatiques et a atteint une certaine suprématie spirituelle. Ainsi, grâce à ses vertus, elle a su imposer sa forte personnalité. «Cette jeune fille aux cheveux d'ébène lâchés et sans un soupçon de foulard» doit toujours camper sur ses positions et exiger le respect et la liberté de chacun. A cette époque, il fallait qu'une femme comme Lella existât. D'ailleurs, Guy de Maupassant dans La Vie errante (1890), D'Alger à Tunis, soulignait la nécessité du lien entre le saint, Dieu et les êtres : «Il faut un intermédiaire plus humble entre lui si grand et elles (les femmes arabes) si petites. Cet intermédiaire, c'est le marabout...».
A bon réalisateur, salut !
L'écriture de Mohamed Bouamoud qui appartient, désormais, à travers ce roman, à la mémoire historique et littéraire de la Tunisie, est une écriture dont le souffle est poétique. Ce souffle apparaît aussi à travers les images repérées en toile de fond : on voit que l'auteur dans l'action comme dans la description écrit en images. Les réalisateurs tunisiens trouveront dans ce roman une matière très riche pour réaliser soit un film documentaire, soit un long métrage fiction sur Essayda El Mannoubyya.
Finalement, le style oratoire et affectif du romancier a choisi un chemin libéré des poncifs littéraires. Le retour en arrière à cette figure éminente est devenu un éternel retour, puisqu'il permet de mettre en images romanesques une valeur noble : celle d'une remise en scène d'un imaginaire collectif qui corrobore la mémoire de notre patrimoine historique. Ce patrimoine revendique une identité conçue d'imams, de soufisme, de mysticisme, de zaouïas. Ces éléments sont dans la chair-même de l'architecture sociale tunisienne, elle est surtout révélée grâce au personnage de Lella et d'autres aussi, dont la verve est annonciatrice d'un avenir prometteur traçant la piste du devenir culturel de la Tunisie.
Après avoir brûlé le mausolée de Lella Mannoubyya à La Manouba, le 16 octobre 2012, ce roman a ressurgi de plain-pied à temps. L'œuvre a donc réussi à dépoussiérer les cendres, afin de réincarner ce personnage et le rendre encore plus vivant qu'auparavant : un personnage vif dont on doit s'inspirer essentiellement aujourd'hui!
Aujourd'hui, rencontre-dédicace à Ibn-Rachiq
Cet après-midi, à partir de 16h00, la maison de la culture Ibn-Rachiq accueille une rencontre avec Mohamed Bouamoud où il présentera et débattra de son roman Essayda El Mannoubyya. Nul doute que ce débat sera «relevé», en ces temps où les mausolées et la mémoire des saints hommes (et femmes) sont profanés par des illuminés qui ignorent tout de leur histoire et de leur apport religieux, culturel et social. On sera, en tout cas, en plein dans l'actualité... et pas seulement littéraire. A la fin de la rencontre, Mohamed Bouamoud se prêtera à une séance de dédicace.


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