Exception faite de l'Espérance qui a toujours pu et su se maintenir à un très bon niveau, nos clubs et notre football plongent inexorablement vers le bas. Bien sûr, il y a depuis deux saisons une résurrection du CAB, un retour de flamme au CSS, un sursaut d'orgueil de l'Etoile et un spectaculaire saut économique et de qualité au Club Africain... mais on ne peut pas en dire autant pour les autres clubs, toutes divisions confondues, et notre football continue à se débattre dans des problèmes sans fin. On pourra toujours arguer que les liaisons dangereuses sport-politique qui ont caractérisé notre sport-roi n'ont jamais arrangé les choses et que la toute-puissance d'un certain Slim Chiboub a totalement faussé la règle de jeu pendant deux décennies mais, entre-temps, rien n'a été fait pour mettre en place un cadre juridique, éthique et sportif pour que notre football sorte de son archaïsme, de ses petits calculs, de ses appartenances et de sa politique des deux poids deux mesures. L'épisode (en cours) du contentieux qui oppose aujourd'hui le CAB aux instances de notre football est, à ce propos, très significatif. C'est que, par-delà l'aspect juridique, c'est une véritable crise de confiance qui s'est installée depuis belle lurette entre les clubs, la fédération et la Ligue. Et pour cause: trop d'épisodes troubles, trop de petits trafics, trop de jeux d'influence pour, à l'arrivée, trop d'injustice. Cloîtrés dans leurs bureaux, accrochés à leurs portables, dirigeants de la FTF et de la Ligue gèrent les compétitions selon le bon vouloir de certains, leurs propres intérêts et ne tiennent compte que de l'équilibre de force. Au jour le jour, au match le match... Il faut dire que s'ils sont là où ils sont, c'est grâce à une somme savante de compromis, de compromissions, de liaisons dangereuses secrètes ou alors connues par tous. Et pour s'y maintenir, la démarche est tout indiquée: faire plaisir ou même acte d'allégeance pour les uns ou pour les autres. Tant mieux pour les plus forts, tant pis pour les plus faibles. Cela pose une question essentielle : à qui fédération et Ligue rendent-elles compte? Aux clubs en principe, mais on sait que ceux-là, à travers leurs dirigeants, sont complices d'un système bâti sur l'intérêt particulier et personnel, et non sur l'intérêt général. C'est pour cela d'ailleurs qu'on n'a jamais vu des clubs retirer leur confiance à une fédération et la faire chuter. Pourtant, il y a bien des raisons à cela. Sur ce plan bien précis donc, la FTF est «inattaquable» de l'intérieur. Elle l'est aussi de l'extérieur avec le parapluie de la Fifa. Une Fifa qui tient absolument à ce que le football soit indépendant de la politique, mais qui sait pertinemment que la réalité est tout autre. Une Fifa qui a, par exemple, accueilli un certain Slim Chiboub en son sein avant de le rejeter. Bailleur de fonds de la FTF, le ministère est, pour sa part, interdit d'ingérence. Même quand notre équipe nationale quitte la CAN au premier tour, qu'il se passe plein de choses à Dubaï, à Qatar et en Afrique du Sud. Même quand le président de la fédération rompt de pacte de non-ingérence politique- FTF et qu'il envoie une lettre à un président de parti, Rached Ghannouchi, pour se plaindre du ministre ! Dans ce cas, qui peut demander des comptes à la FTF ? Vous l'avez bien compris, personne. Ni les clubs qui font grand bruit, mais n'agissent pas ; ni les médias qui prêchent dans le désert et encore moins l'autorité de tutelle qui observe impuissante ce manège et continue à rallonger du fric à une institution qui en fait à sa guise... celui du contribuable en l'occurrence. Un Etat dans l'Etat que cette FTF dont plus personne ne veut, mais qui est là pour trois ans encore. En dépit d'un premier bilan calamiteux. En moins de douze mois !