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Une «guerre civile» sur fond de corruption et de propagande politique
Au lycée «Rue de Russie»
Publié dans La Presse de Tunisie le 22 - 04 - 2013

A quelques semaines des examens du baccalauréat, un tumulte hors norme gît au sein du lycée «Rue de Russie», divisant les professeurs et les élèves en deux clans opposés: face à la fraîcheur juvénile des élèves et leur conviction en le principe de la liberté d'expression et en l'équité devant la loi, un front qui se présente comme conservateur et dénonciateur de la corruption morale, administrative et organisationnelle s'active, appelant à la réforme du système interne du lycée et à l'ancrage d'une discipline à même d'encadrer les jeunes et de les orienter vers un comportement responsable et digne de leur statut estudiantin. Cette lutte mutuelle menée par les deux parties pour faire régner la loi celle de la liberté et de l'équité ou celle de la rigueur et de la discipline tout dépend du clan, se trouve tempérée par la lucidité indétrônable de l'administration.
C'est une élève, inscrite en terminal section informatique, qui s'est déplacée à La Presse pour médiatiser le problème, représentant ainsi ses camarades de classe et pour faire preuve de solidarité avec M. Ali Bchetnia, le directeur actuel du lycée «Rue de Russie». Cette jeune fille dénonce les dépassements commis par une enseignante au nom de la discipline; des dépassements qui ont sensiblement lésé l'amour-propre et la dignité des élèves et du directeur. «Il s'agit du comportement inadmissible de Mme Jamil Chemlali, professeur d'éducation civique, qui s'acharne et sur les élèves et sur le directeur du lycée pour imposer ses propres lois, ne se souciant ni de notre avenir, ni de la réputation d'un lycée de renom», indique la demoiselle qui préfère garder l'anonymat.
Selon ses dires, Mme Chemlali exploite l'établissement scolaire à des fins politiques. Elle a toujours aspiré à prendre la place du directeur — qui est déjà parti à la retraite depuis le mois de mars — et qui continue de travailler dans l'optique de ne pas perturber les quelques semaines qui restent de la présente année scolaire. «Avant la révolution, cette enseignante faisait tout pour nous manipuler et nous convaincre des principes du RCD. Après la révolution, elle a changé de camp : elle est membre de la Ligue de protection de la révolution de Bab el Falla et s'affiche pro-Ennahdha. Pour manipuler les élèves et les profs et tâcher de réaliser ses objectifs, à savoir destituer le directeur, porter atteinte à la réputation du lycée et des élèves et devenir souveraine, elle a profité de la manifestation de la danse internationale «Harlem shack» pour semer la zizanie et donner aux petits débordements commis par deux bacheliers et un élève inscrit en première année, une ampleur démesurée», raconte la demoiselle.
Les élèves tirent la sonnette d'alarme
En effet, toujours selon la version de la bachelière, certains ont eu la maladresse d'enlever leurs pulls et de danser torse nu, ce qui a déplu à l'enseignante. En réaction à cette attitude, l'enseignante a demandé à l'administration de faire comparaître les trois élèves devant le conseil de discipline et de les renvoyer définitivement du lycée. Suite au refus du directeur, elle a décidé de passer à la vitesse supérieure: «Elle avait pris une photo personnelle de l'un des élèves en question où figurait de l'alcool. Elle avait agrandi cette photo et en a collé des copies sur les murs du lycée. Elle avait même organisé un sit-in devant le ministère de l'Education en affichant cette photo comme preuve de corruption et de dépravation. Mme Chemlali, poursuit notre bachelière, avait également accusé les élèves de dépravation sur le journal électronique Al Jarida et elle s'est exprimée devant la chaîne Al Hiwar comme étant le porte-parole des profs du lycée, ce qui est loin d'être vrai». L'élève en terminal indique, par ailleurs, que l'enseignante d'éducation civique avait insulté le directeur en plein public, le traitant ainsi que les élèves de corrompus et menaçant de l'expulser du lycée. Ce qui est encore plus curieux, c'est que les élèves inscrits en section informatique sont convaincus que Mme Chemlali ainsi que les professeurs qui la soutiennent ont des intentions fâcheuses envers cette section.
Cette version est appuyée par l'avis d'un autre bachelier de la section informatique. Ce jeune — qui préfère garder l'anonymat — dénonce le comportement de l'enseignante et cette mentalité naissante qui repose sur la manipulation, la violence, l'injustice et l'intolérance. Pour lui, Mme Chemlali exploite l'établissement scolaire à des fins politiques malsaines. «Elle cherche toujours à nous manipuler au détriment du directeur. Elle ne cesse de coller aux professeurs qui ne partagent pas son avis des étiquettes dépréciatives du genre: ce prof est un athée, celui-ci est un dépravé... Elle a même convié des jeunes barbus pour nous donner des leçons sur la bonne conduite», indique le jeune homme. Pour lui, Mme Chemlali ainsi que les profs qui la soutiennent représentent un mouvement politique bien déterminé et font tout pour faire régner leurs propres lois et s'approprier tout le système. «D'ailleurs, renchérit-il, cette dame est antisyndicat, antiprofesseurs, antidirecteur et antiélèves. Elle a réussi, hélas, à diviser le lycée en deux clans rivaux. Pour ce qui me concerne, je suis contre la politisation de l'espace scolaire. Nous sommes des élèves. Nous sommes là pour étudier et nous aspirons à la réussite», renchérit le bachelier.
L'administration garde la tête froide
Ce même son de cloche s'avère être adopté par M. Ali Bchetnia, directeur du lycée. Ce monsieur — et malgré le tumulte et les accusations humiliantes auxquelles il était sujet — garde la tête bien froide. Pour lui, donner des échos assourdissants à un évèvement aussi anodin soit-il relève de la tactique favorite de certains partis politiques.
L'attitude de Mme Chemlali va dans ce sens.
Après l'organisation de la danse du Harlem shack, le directeur avait reçu un rapport signé des membres du conseil de discipline recommandant la comparution des trois élèves devant le conseil.
«Les signataires sont à la fois juges et parties, ce qui n'est point logique. J'ai donc refusé leur requête. Trois jours après, le même rapport m'a été retransmis comportant d'autres signatures. J'avais donc compris qu'il s'agit plus d'un acharnement que d'une attitude bien attentionnée», explique le directeur. Il est à souligner, par ailleurs, que les élèves en question se sont montrés prêts à comparaître devant le conseil de discipline à condition que la même punition soit également infligée aux élèves inscrits au lycée Imam Moslem qui avaient commis d'ailleurs les mêmes gaffes. «Mme Chemlali est une amie intime à Mme Souad Abderrhim. Or, c'est le fils de cette dernière qui a commis le premier cette maladresse. Notre enseignante ne voudrait surtout pas nuire au fils de son amie», fait remarquer notre bachelière.
Suite au sit-in organisé devant le ministère de l'Education ainsi qu'aux déclarations faites par l'enseignante sur le journal électronique Al Jarida et sur la chaîne Al Hiwar, le directeur du lycée avait transféré l'affaire à la direction régionale de l'Education. Deux inspecteurs administratif et financier se sont rendus jusqu'au lycée pour avoir plus d'éclaicissements sur la question. «Pour l'instant, l'inspection n'a pas donné son verdict. De mon côté, je continue à assurer ma fonction administrative qui consiste à faciliter la mission pédagogique et encadrer au mieux les élèves», indique sereinement M. Bchetnia. Pour ce qui est de l'acharnement de Mme Chemlali sur la section informatique, le directeur indique que cette section a connu une mutation qualitative importante depuis son arrivée au lycée. «J'ai été désigné comme directeur au lycée Rue de Russie en 2007. A cette époque, la section informatique comptait à peine deux ou trois professeurs. Elle avait pour plateforme deux laboratoires munis de vieux PC. Aujourd'hui, elle dispose de cinq laboratoires équipés d'un matériel à la page ainsi que du câblage d'Internet par fil optique. Les cours sont donnés par groupes et sont assurés par une dizaine de professeurs.Cette section semble gêner certains professeurs en raison de l'importance du coefficient du module informatique; soit 6 contre des coefficients nettement inférieurs pour les autres matières», explique M. Bchetnia.
Encore faut-il noter que les 1300 élèves inscrits au lycée «Rue de Russie» s'apprêtent à organiser, le 27 avril, la fameuse «dakhla» du bac sport. «Nous ferons de notre mieux pour responsabiliser et encadrer les élèves afin que cette tradition puisse passer dans les meilleures conditions et sans débordement aucun», renchérit le directeur. Quant aux accusations de corruption et de violence verbale auxquelles il a été confronté, le directeur refuse de prendre des mesures juridiques. «Je suis un homme réputé pour mon sérieux et ma conscience professionnelle. Je ne ferais aucune démarche susceptible de me rabaisser», souligne-t-il souriant.
Ce qui est vraiment curieux dans cette lutte mutuelle, c'est la passivité des enseignants faisant partie du clan administration-élèves. Selon les données fournies par M. Bchetnia, le corps enseignant du lycée compte 97 professeurs dont seulement 13 d'entre eux ont participé au sit-in organisé par Mme Chemlali. Le clan de cette dernière est donc minoritaire par rapport au nombre total des professeurs. Pourtant, ce sont les élèves qui se sont mobilisés pour médiatiser le problème. «Nos profs nous soutiennent mais veulent que nous défendions notre cause nous-mêmes», souligne la bachelière. Aussi, chaque section est-elle représentée par deux élèves pour poser le problèmes sur le plan médiatique.
Certes, il est intéressant de responsabiliser les jeunes et de leur apprendre à défendre leurs objectifs et leurs convictions. Toutefois, le lycée est censé également compter sur les professeurs qui y exercent la noble mission d'éduquer les jeunes générations. Pour quelles raisons les professeurs préfèrent-ils se mettre en veilleuse? Pourquoi poussent-ils les élèves à prendre les choses en main alors qu'ils sont censés les inciter à mieux se concentrer sur leurs études, notamment au cours des dernières semaines de l'année scolaire?
La réponse de l'accusateur-accusé
Stopper la corruption, responsabiliser l'administration
La réponse de Mme Jamila Chemlali est fort déconcertante. Il faut dire que le problème, tel qu'il est posé par l'enseignante d'éducation civique, relève essentiellement de la corruption; une corruption à la fois comportementale, relationnelle, administrative et organisationnelle au sein d'un établissement scolaire réputé pour ses honorables taux de réussite. Selon Mme Chemlali, la nonchalance de l'administration et sa démission quant à ses responsabilités d'encadrement et de discipline suivent une courbe ascendante, favorisant ainsi toute sorte de dépravation et de corruption.
Interrogée sur les incidents relatifs à l'organisation du « harlem shack » et la tournure qu'ont pris les débordements commis par les jeunes, l'enseignante indique que le problème est bien plus consistant qu'il ne le semble. « La dépravation constitue une monnaie courante au lycée ‘‘rue de Russie''. Chaque semaine, des manifestations dites «dakhla» sont organisées spontanément par les élèves, perturbant ainsi la marche des cours et favorisant un comportement immoral, voire violent. Des agissements intolérables sont perpétuellement commis à l'intérieur du lycée au vu et au su d'une administration nonchalante. Les élèves ont, en effet, pris l'habitude de consommer de l'alcool, de se filer des joints et de donner libre cours à des actions violentes. Récemment, l'un des élèves a lancé du haut de l'étage une chaise, agressant ainsi un autre élève inscrit en première année. Résultat: huit points de suture au niveau du crâne. Une autre élève à été agressée la veille de la semaine bloquée. On l'avait transportée en état d'urgence à l'hôpital Charles Nicolle. Elle avait, en effet, de douloureux traumatismes au niveau de l'épaule », explique l'enseignante. Et d'ajouter qu'un couple d'élèves a été pris en flagrant délit dans l'une des salles de classe sans que l'administration daigne prendre les mesures appropriées. Mme Chemlali accuse l'administration de laxisme. «Personnellement, l'affaire n'a rien de personnel. Je trouve, par contre, que M. Bchetnia représente toute l'administration. Il en est donc le principal responsable. L'administration doit assurer sa mission et permettre aux conseils de discipline d'encadrer les élèves et de sanctionner les dépassements», renchérit l'enseignante d'éducation civique.
Par ailleurs, et en ce qui concerne les accusations de corruption adressées au directeur, elle souligne qu'une enquête est actuellement menée par la direction régionale, suite à laquelle des lacunes seraient probablement dévoilées. Mme Chemlali nie toute intention de politisation de l'espace scolaire: « L'espace scolaire n'est pas approprié à la propagande politique. Ce sont des prétextes pour détourner l'opinion publique du véritable problème, ce qui est normal. La corruption, comportementale soit-elle ou administrative, est au profit de certains agents de l'administration, de certains professeurs et de certains élèves. En revanche, les principales victimes en sont les élèves eux-mêmes. Nos enfants sont en phase d'adolescence. Ils ont grand besoin d'être encadrés », ajoute-t-elle.
Quant aux intentions de supprimer la section informatique, l'enseignante souligne qu'il s'agit d'une manipulation visant à créer des susceptibilités entre les élèves. « C'est une section parmi tant d'autres et personne n'est à même de la supprimer », précise Mme Chemlali.
D.B.S.


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