«Chokri, on ne t'a pas oublié», « Martyr de la nation, nous continuerons le chemin», «Belaïd, Hached, Ennahdha a vendu le pays», «Le peuple veut savoir qui a tué Belaïd», «A bas les rcédistes, les obscurantistes et les bourreaux du peuple», ont scandé sur fond de chansons engagées les sympathisants du Front populaire réunis, hier, sur l'esplanade du théâtre municipal de Tunis. C'était dans le cadre d'une manifestation de soutien à la cause de Chokri Belaïd, secrétaire général du Parti des patriotes démocrates unifié, assassiné le 6 février dernier. Hommes et femmes, jeunes et moins jeunes, ils étaient quelques centaines à prendre d'assaut, hier, dès 14 heures, l'esplanade du théâtre municipal pour scander haut et fort des slogans où ils dénoncent l'injustice, l'arrivisme, l'opportunisme, la trahison, l'instrumentalisation religieuse et le banditisme de l'Etat. Pour ces protestataires, le stratagème adopté pour faire oublier l'affaire Belaïd a été déjoué. « Ils multiplient les versions, diversifient les pistes, essaient de détourner l'intérêt public en engageant de faux débats et en provoquant d'incessants problèmes, mais leur stratagème est déchiffré. Le peuple n'est pas dupe et sait parfaitement que tout ce qu'ils font n'est que prêches en plein désert. Nous n'avons qu'une seule exigence : connaître la vérité et savoir qui a orchestré l'assassinat du camarade Belaïd», égrenait Fadia, incapable de retenir ses larmes à l'écoute de tristes mélodies dégagées par des baffles éparpillés ici et là. Tristesse et colère ont donc marqué l'ambiance qui a régné le temps d'un après-midi agité à l'Avenue Habib-Bourguiba. Mais les proches, amis et camarades de Belaïd se sont montrés patients, résistants et déterminés à poursuivre leur quête de la vérité. Croisé au cœur de la foule, Abdelmadjid Belaïd, frère de Chokri Belaïd, en a fait preuve. «Sur le plan officiel, l'affaire n'a pas avancé. D'ailleurs, ma certitude aujourd'hui est qu'il n'y a pas de volonté pour faire avancer les choses. Toutefois, en ce qui concerne la famille, le Front populaire et les Patriotes démocrates unifié, le travail se poursuit. Et les informations collectées au fur et à mesure du déroulement de nos enquêtes ont servi à mettre davantage de pression sur le juge d'instruction. Ce dernier refuse encore de convoquer Kamel Ifi accusé d'avoir rôdé durant trois semaines devant l'habitat de Chokri, juste avant l'assassinat. Sinon, je pense que l'on commence à nous approcher des vrais coupables et responsables de l'assassinat de mon frère, surtout après la convocation de Bahri Jelassi, qui est proche du mouvement Ennahdha. Selon certains membres de sa famille, cet homme pense et agit comme les terroristes. Sur un autre plan, il faut dire que nous avons commencé les démarches pour mobiliser les institutions internationales des droits de l'Homme en Europe et aux Etats-Unis d'Amérique entre autres et les médias étrangers, avec qui j'ai de bonnes relations ». Mongi Rahoui, membre du bureau exécutif des Patriotes démocrates unifié et député à l'ANC, a indiqué, en rebondissant sur les reproches faits par une grande partie de l'assistance à l'ANC pour son inertie, qu'il ne faut rien attendre de cette institution. Une institution qui s'est avérée, selon lui, incapable même de trancher sur des questions beaucoup moins compliquées. « La partie majoritaire au sein de l'ANC se soucie peu de l'affaire Chokri Belaïd. C'est pourquoi, il ne faut rien espérer de l'Assemblée, à cet égard. Seule la société civile qui a engagé la révolution de la dignité peut tout sauver. Chokri Belaïd est devenu un symbole national et sa cause doit mobiliser toute la nation ».