Après l'audiovisuel, vient le tour de la presse écrite qui devrait, elle aussi, prendre son destin en main. A l'aune d'un paysage médiatique pluriel et diversifié, il est grand temps que ce secteur puisse s'organiser et évoluer dans le cadre d'une nouvelle structure appelée «Conseil de la presse», comme c'est le cas de certaines expériences européennes. C'est là pour l'essentiel la teneur de l'assemblée exceptionnelle qu'a tenue, hier après-midi à Tunis, le Syndicat national des journalistes tunisiens (Snjt). Sa présidente, Nejiba Hamrouni, a indiqué qu'il s'agit là d'une occasion pour se concerter et se pencher sur le devenir de ce corps de métier, à la lumière de ce nouveau contexte révolutionnaire, où le professionnel demeure, aujourd'hui, maître de soi-même. Et le projet de Conseil de la presse dont l'idée est encore embryonnaire constitue, bel et bien, un choix irréversible, étant donné que la récente Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle (Haica) ne couvrira pas le domaine de la presse écrite et électronique. Elle vient de noter que ce projet est le fruit d'un long parcours de réflexion engagée avec les journalistes, d'une part, et les patrons des établissements de presse, de l'autre, aidés en cela par le modèle belge en matière d'autorégulation, déjà institué en 2002. Pour l'histoire, la Suède était, en fait, le premier pays européen à avoir mis en place un conseil de la presse, suivie du Canada et de l'Allemagne. De son côté, M. Hichem Snoussi, membre de la Haica et animateur d'Article 19, a insisté sur la nécessité de créer un tel conseil qui l'a considéré comme une instance autorégulatrice incontournable, surtout que la presse écrite et celle électronique ne relèvent en rien des compétences de la Haica. Celle-ci dépend, juridiquement, du décret 116, alors que ledit conseil aura comme référence législative celui numéro 115 qui doit régir la presse écrite dans son ensemble. Sans pour autant oublier l'importance du décret-loi 41 relatif au droit d'accès aux documents administratifs. «Et l'on se retrouve aujourd'hui dans un nouveau cadre législatif qui fait de la liberté de la presse et de l'information une règle de base à laquelle on ne doit jamais déroger...», s'exprime-t-il. Cependant, a-t-il encore ajouté, il est de mise de voir ce secteur s'organiser davantage, sous la tutelle du Conseil de la presse, en tant qu'instance d'autorégulation de plus en plus exigeante. L'autorégulation se fait nécessairement en concertation avec les professionnels du métier, en toute coordination, avec les chefs d'établissements médiatiques concernés, comme partie prenante dans le domaine. Et par définition, l'autorégulation, d'après lui, est l'ensemble des mécanismes opérationnels respectant des normes bien déterminées. Il s'agit, à vrai dire, d'un pacte déontologique qui doit régir la publication de l'information. Un cadre légal et légitime dans lequel les journalistes devraient pleinement s'engager pour l'accomplissement de leur fonction. Alors que la Haica en tant qu'autorité régulatrice, ajoute Snoussi, revêt un caractère contraignant, ayant un pouvoir décisionnel et d'arbitrage dans les affaires et les litiges survenus dans l'audiovisuel, le Conseil de la presse envisagé se distingue, quant à lui, par son autorégulation. Son ultime objectif :défendre la liberté d'expression contre toute force de pression et protéger les lecteurs de tout usage abusif de cette liberté. Pour ce faire, ledit conseil prend à sa charge le traitement des doléances qui lui seront parvenues par les lecteurs. Observer, contrôler, résoudre et réguler font aussi partie de la mission qui lui est dévolue. Outre la composition de ses membres et les structures qu'il doit réunir, le Conseil de la presse se trouvera face au problème du financement. Qui va le financer? s'interrogent certains journalistes participants. Quelle que soit la partie donatrice, l'on ne sortira jamais du cercle de la dépendance. Quand sera-t-il réellement opérationnel? Et comment en faire, vraiment, une instance de renforcement de la liberté d'information? Autant de questions qui ont été également posées et qui pourraient remettre l'autonomie de ce conseil en cause.