Le président de la République provisoire, Dr Moncef Marzouki, a exprimé son indignation face au retard que connaît la Tunisie en matière de lutte contre la corruption, lors de son allocution d'ouverture du séminaire sur «La réforme du système de contrôle administratif et financier en Tunisie et l'activation de son rôle dans la lutte contre la corruption», organisé par le Haut comité de contrôle administratif et financier dans le cadre du projet «Lutte contre la corruption dans les pays arabes » initié par le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud) «Je me sens indigné et même humilié de voir que nous avons régressé en matière de lutte contre la corruption, nous perdons des places dans le dernier classement effectué par Transprency International, nous n'avons pas de révolution pour voir la Tunisie devenir encore plus corrompue», a-t-il dit d'une voix colérique. Le président dit «comprendre la difficulté de l'entreprise et la délicatesse de la phase de transition démocratique» mais que «l'ouverture des dossiers de corruption devra constituer une des priorités». «Mises à part quelques restitutions de biens ayant appartenu au clan de l'ancien régime, il existe encore plusieurs problématiques relatives aux dossiers de corruption qu'il va falloir résoudre. Il est temps pour une réelle volonté politique dans ce domaine», a-t-il insisté. Ne s'arrêtant pas à la critique, le président de la République, qui fait de la lutte contre la corruption un de ses rares combats, formule un certain nombre de propositions qu'il souhaite voir se traduire dans la réalité. «Je propose qu'il y ait un appareil contrôleur unifié doté de indépendance ainsi que des prérogatives nécessaires pour pouvoir sévir, à l'instar de l'auto-saisine, et la légitimité de porter les dossiers de corruption devant la justice. Je propose également de renforcer le cadre législatif en matière de lutte contre la corruption et l'enrichissement illicite. Il faudra aussi être vigilant face aux sources de financement douteux des partis et des médias dans ce que j'appellerais la corruption démocratique», explique-t-il. Ghazi Jribi, président du Haut comité de contrôle administratif et financier, rejoint la proposition du président de la République provisoire quant à l'unification du contrôle en un seul corps puissant (pour le moment, il existe trois instances relevant du ministère des Finances, du Premier ministère et du ministère des Domaines de l'Etat et des Affaires foncières). D'ailleurs, selon Ghazi Jribi, un projet de loi concrétisant cette vision va être prochainement présenté aux députés. Plusieurs intervenants, et notamment lors du débat, ont évoqué les difficultés que rencontrent les contrôleurs au cours de leur travail. AbdelHamid Thabet, juge financier chargé de mission auprès du Haut comité de contrôle administratif et financier, explique que les contrôleurs doivent intervenir dans plus de 2.500 établissements publics chaque année. «Au vu de la difficulté de la tâche, j'appelle à doter les contrôleurs des moyens adéquats leur permettant de travailler dans des conditions respectables», dit-il. A la fin de ce séminaire, les intervenants ont émis 12 recommandations, parmi lesquelles la création d'un corps de contrôle unifié et le renforcement de sa complémentarité avec d'autres corps concernés par la lutte contre la corruption. Les recommandations seront portées devant la présidence de la République, au président de l'ANC et à la présidence du gouvernement.