La «Furia» a fait les frais d'une sélection suisse ambitieuse et appliquée... «Nous sommes la petite équipe qui va jouer contre la grande. Nous serons les requins, nous voulons les manger». Ceux qui ont souri aux paroles de Philippe Senderos la veille de la deuxième rencontre du groupe H entre l'Espagne et la Suisse, disputée ce mercredi à Durban, doivent s'en mordre les doigts. Alors qu'on se demandait à quelle sauce seraient mangés les Helvètes, ce sont les grands favoris espagnols qui ont avalé de travers. Pourtant, avec un Andres Iniesta finalement titulaire, la Roja avait faim d'entrée de jeu et s'offrait quelques frappes dangereuses en amuse-gueule : un missile de Sergio Ramos hors cadre (17'), une tentative d'Iniesta bloquée par Diego Benaglio (21') et une ouverture millimétrée du Catalan pour son coéquipier Gérard Piqué, qui crochetait Stéphane Grichting avant d'échouer devant le gardien suisse (24'). Les Ibères étaient tout près de savourer leur premier mets de la soirée lorsque David Silva adressait un caviar à Iniesta en profondeur, mais Grichting faisait tourner l'affaire au vinaigre, récoltant une biscotte sur le coup. Pour ne rien arranger, la Suisse perdait Senderos sur blessure. Ça sentait le roussi dans la cuisine d'Ottmar Hitzfled, mais à la pause, la Suisse pouvait se vanter de rester sur 439 minutes d'invincibilité en Coupe du monde de la Fifa. Derdiyok manque le dessert... Au retour des vestiaires, Xabi Alonso apportait le plat de résistance en frappant de loin à deux reprises en cinq minutes, mais d'abord dans les nuages, puis sur le crâne de Grichting. A attendre trop longtemps avant de se servir, l'Espagne laissait la voie libre aux pique-assiettes, en l'occurrence Eren Derdiyok et Gelson Fernandes. Le premier échappait à la défense et butait sur Iker Casillas, à la diète jusque-là, mais le second avait suivi, récupérait le ballon devant Piqué et concluait à bout portant (52', 0-1). Le chef espagnol Vicente Del Bosque invitait successivement Fernando Torres, Jesus Navas et Pedro à passer à table, mais la défense suisse se battait bec et ongles sur chaque miette de Jabulani. Xabi Alonso était tout près de donner enfin sa part du gâteau à la Furia Roja, mais la barre se chargeait d'allonger le jeûne des Espagnols (70'). Navas tentait aussi sa chance, mais si la note artistique était bonne pour le sombrero sur Reto Ziegler, Benaglio brillait sur sa frappe enchaînée (72'). Dans la foulée, la Nati s'offrait une occasion en or de prendre du dessert, mais le slalom de Derdiyok dans la défense espagnole finissait sur le poteau (74').Malgré l'appétit d'ogre des Espagnols dans les dernières minutes et les multiples tentatives pour grignoter le point du nul, la Suisse ouvrait le champagne au coup de sifflet final. Pour les champions d'Europe en titre, il faudra digérer cette amère entrée en matière avant de dîner en tête-à-tête avec le Honduras. Une brutale baisse de régime A l'image de ses deux perles David Villa, titulaire, et Fernando Torres, entré en cours de match, l'attaque espagnole a connu une brutale baisse de régime contre la Suisse. La dernière fois que pareille mésaventure était arrivée à la "Roja", il y a un an, l'Espagne avait été battue par les Etats-Unis (0-2) à la surprise générale, lors de la Coupe des Confédérations. Depuis cette désillusion, les joueurs espagnols restaient sur 12 victoires, dont certaines de prestige contre l'Argentine (2-1) et en France (2-0). Au passage, l'attaque de feu avait inscrit 40 buts, dont 6 face à la Pologne (6-0) le 8 juin à Murcie lors du dernier match de préparation. Mercredi, à Durban, les deux gâchettes Torres, entré en jeu à la 61e minute, et Villa sont pourtant restées muettes. Le buteur de Liverpool et celui qui vient de signer au FC Barcelone se sont fait piéger par une défense suisse de haut niveau qui a pourtant perdu en cours de route Senderos, sorti avec une entorse à une cheville (36e), sans que cela nuise à son rendement! Seul titulaire en pointe, Villa, 2e meilleur buteur de l'histoire en sélection espagnole avec 38 buts, n'a jamais pu se mettre réellement dans le sens du but. Et, quand il y est parvenu, il a tiré à côté, alors que le but était vide (45e) ou le gardien suisse Benaglio s'est interposé (60e). Esseulé, il a cependant trop systématiquement cherché le dribble gagnant, perdant toute sa spontanéité. Le sélectionneur Vicente Del Bosque a alors choisi de lui adjoindre Torres, buteur lors de la finale remportée face à l'Allemagne à l'Euro 2008 (1-0). Sans résultat. L'attaquant de Liverpool a commencé par un bon appel suivi d'un tir au-dessus (68e), avant de buter à son tour sur Benaglio (70e), puis Grichting (70e). Avant de manquer un contrôle facile (88e); un raté symbolique de la panne espagnole en attaque.