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La représentation du corps : de l'interprétation à l'hybridation (II.1)
Réflexion sur l'art contemporain
Publié dans La Presse de Tunisie le 21 - 06 - 2010

Les temps courent… Les consensus et processus existentiels changent, en même temps que s'éloigne l'image de l'ancienne figure du monde. Dès le XXe siècle, avec l'avènement de la modernité, les progrès techniques et technologiques renforcent une confiance en l'Homme, jusque-là fébrile. Les progrès chers au XIXe siècle, d'une importante révolution industrielle vers une non moins importante révolution plastique, font qu'un ensemble de paramètres artistiques deviennent conceptuellement «possibles».
Parmi les principaux protagonistes disposés et prédisposés à accueillir, non sans joie, ces changements radicaux qui se profilent, les artistes «écopent» une place de choix. D'abord dans les grandes villes européennes, ensuite de par le monde : ils saisissent ces avancées et progrès pour élargir leur vision de la société et des êtres qui la peuplent.
La représentation, d'une manière générale, la représentation du «soi» et de «l'autre», en particulier, se déplacent considérablement. Les codes figuratifs traditionnels sont ébranlés, s'attaquant de près au règne de l'image lisse et «politiquement correct», instaurée depuis le «Quattrocento», ou quatorzième siècle, d'une histoire de l'art embuée jusqu'ici par la bienséance. Dès lors, une révolution plastique s'opère progressivement, aidée par toutes sortes de remises en cause, littéraire, philosophique, scientifique et sociale.
Ces états de fait abolissent la seule unité du sujet conscient, pour révéler un monde beaucoup plus complexe, notamment avec la psychanalyse qui affirme ce sujet comme étant clivé entre son «moi» et les différentes instances inconscientes. Lectures qui permettent à l'artiste de creuser au plus profond de la nature humaine et de voir derrière les faces cachées des faux-semblants. Le corps disparaît en tant qu'image, il devient perceptible comme trace réelle de l'artiste à l'œuvre. Ce dernier quitte son «chevalet» pour s'autoposer au sol, ou se dresser à la verticale pour épouser l'espace du mur. Il devient toile et support de sa propre création. Son geste renvoie à son corps unique. C'est alors une nouvelle acception du corps dans l'art du XXe siècle.
L'interprétation
Avant de développer, dans le prochain et dernier volet de notre dossier «Réflexion sur l'art contemporain», sur le thème «De l'influence occidentale sur la représentation de la figure du corps dans les pratiques artistiques contemporaines tunisiennes», regardons d'abord l'incroyable récit qui a marqué l'évolution de cette représentation en Europe et outre-Atlantique.
Les jeux interprétatifs avec l'image du réel s'attaquent avec la même force aux natures mortes et au corps humain. C'est l'école cubiste du début du XXe siècle qui fait d'abord vaciller les certitudes acquises pendant les siècles antérieurs. Le cubisme est le maître de cérémonie dans les bals inauguraux de la déformation figurale humaine, allant jusqu'à la monstruosité. Prenons pour exemple Pablo Picasso (1881-1973), avec son tableau datant de 1907, Les Demoiselles d'Avignon, toile picturale ayant révolutionné l'art moderne, par sa soudaine introduction de formes méconnues jusqu'alors, les contours singuliers de l'art ibérique, africain et océanien.
Avec ce point de départ propice à la réflexion quant à la légitimité de l'artiste à s'approprier le réel pour le raconter à sa manière, Picasso lance par là même l'aventure de l'interprétation par la défiguration. Il traite le corps humain de manière structurée et géométrique, inédite. Ces surfaces sont planes et ces volumes s'imbriquent dans l'espace, comme si la peinture dialoguait avec la sculpture, habitude chère au «Maestro» de passer indifféremment de l'une à l'autre, et volonté de faire fusionner tous les arts.
Jean Dubuffet (1901-1985), fondateur de l'Art brut, s'intéresse également à la représentation du corps humain. Il y revient à plusieurs reprises, et articule un certain nombre de séries qui constituent chaque fois un changement de style. En 1950-1951, avec la série des Corps de dames, il se mesure au genre le plus sacré de la peinture occidentale : le nu féminin. Mais celui de Dubuffet n'est pas celui que le langage classique et canonique pictural a su donner à voir. Il dépouille la figure humaine de ses plus chères prérogatives : ordre, beauté, symétrie. Dans son œuvre, Le Métafisyx, une huile sur toile de 1950, il aplatit les formes qui se confondent dans la matière. «Changées en galette, aplaties au fer à repasser», selon ses dires. Les corps sont alors transformés en des champs ouverts de matière chaotique, juste un peu cernés par de lointains et vagues contours. Derrière la monstruosité des corps représentés se cache néanmoins un propos philosophique : montrer que ces organismes charnels demeurent plus complexes que l'on ne croit, donnant à voir une vision organique de la machine humaine, comme vue de l'intérieur.
Les artistes d'après-la Seconde Guerre mondiale s'abandonnent aux méandres sensationnels de leur intuition vitale. Ils ne cherchent plus et aucunement à satisfaire l'unique jugement de l'autre, en étant beaucoup plus dans une recherche personnelle, et par là même, ils tentent de retranscrire leurs perceptions et leurs saisissements émotionnels. D'excitation en coups de théâtre, ils peignent et dépeignent leur « idée » du monde, destituant les genres de nature morte et de paysage pour s'attacher impitoyablement à la représentation picturale du corps humain.
Un inconditionnel « enragé » de ce type de figuration, l'ayant même dépassé sans se tourner pour autant vers l'abstraction, reste le transcendant Francis Bacon (1909-1992). Comme l'a souligné le philosophe français Gilles Deleuze, il n'est ni dans la figuration, ni dans l'abstraction, mais complètement dirigé vers la sensation. «La sensation, c'est ce qui est peint. Ce qui est peint dans le tableau, c'est le corps, non pas en tant qu'il est représenté comme objet, mais en tant qu'il est vécu comme éprouvant telle sensation.» (Gilles Deleuze, Francis Bacon, Logique de la sensation).
Bacon, l'artiste irlandais, trouve à travers son époque une devanture propice à l'expression de ses rêves cauchemardesques. Ce XXe siècle qui s'est surpassé en massacres, tortures et horreurs, a en lui son « chroniqueur », un metteur en scène de scénographies picturales de corps disloqués, devenus amas de chair et carcasses de viande, corps suffocants et convulsifs. Disloquée, géométrisée, déformée, défigurée est la figure de Bacon, à vif et à sang. Le peintre puise dans son entourage pour en faire la narration. Inconnus, portraits d'amis, d'hommes d'affaires, jusqu'à la série des crucifixions et des papes d'après Velàzquez (illustre peintre du VIIe siècle). L'humanité entière se contourne pour se détourner d'elle-même, elle se «vomit» dans l'espace dépouillé, complexe et équivoque de ses toiles. Francis Bacon veut qu'elles agissent «directement sur le système nerveux», sa peinture n'ambitionne pas le discours matiériste, elle souhaite atteindre immédiatement l'appareil cérébral. Comme l'a appuyé Didier Anzieu, célèbre psychanalyste français, le spectateur reçoit les toiles de Bacon «comme un coup porté au creux de son âme».
Ainsi, les artistes contemporains de la deuxième moitié du XXe siècle se sont libérés d'eux-mêmes pour libérer leur propre pratique. Ils ont arrêté de regarder leur miroir qui ne faisait que leur renvoyer une pâle image de la réalité alentour. Mettre en relation leur vécu, leurs sensations et surtout leur époque, obscure et lumineuse à la fois, a donné lieu à ces transfigurations du corps physique et du corps plastique.
(Suite de l'article : La représentation du corps : de l'interprétation à l'hybridation (II.2)


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