Considéré désormais comme stratégique pour le développement économique du pays, le secteur aéronautique tunisien génère d'importantes recettes en devises et un nombre important d'emplois. Grâce à sa politique de grands projets, le parc des compagnies aériennes s'est élargi et l'industrie aéronautique est en plein essor avec, entre autres, la création du Gitas (Groupement des industries tunisiennes aéronautiques et spatiales). Pour bien comprendre et avoir une vision globale de ce secteur prometteur, nous avons contacté M. Noureddine Zekri, directeur général de l'investissement extérieur au ministère du Développement et de la Coopération internationale, qui nous parle du développement de ce secteur et des services liés à l'aéronautique. Il fait ainsi un round-up des évolutions de ce secteur, notamment à travers la construction d'un parc industriel aéronautique qui va attirer de nouveaux sous-traitants aéronautiques et confirmer ainsi la place de la Tunisie comme nouveau site émergent pour l'industrie aéronautique. M.Zekri note que «le développement du secteur aéronautique en Tunisie est un acheminement naturel de l'évolution de l'industrie tunisienne et surtout en matière d'investissements étrangers. Nous savons tous que les premiers investissements ont été faits dans le secteur du textile et des IME, surtout après la signature de l'accord de libre-échange avec l'Union européenne et la réalisation de plusieurs programmes de mise à niveau et de qualité. Pratiquement, toutes les entreprises locales ont pu s'intégrer dans cet espace, tout en respectant les normes de qualité exigées par l'Union européenne. Des efforts considérables ont dû être entrepris pour développer l'exportation mais également pour faire connaître le site tunisien, ses atouts, le savoir-faire et la qualification de son facteur humain...Je dirais donc qu'il y a eu au cours de toutes ces années une évolution vers de nouveaux secteurs porteurs et à forte valeur ajoutée comme l'aéronautique». D'après M. Zekri, «le secteur a commencé à se faire connaître suite à une évolution d'activité effectuée par certaines entreprises opérant dans l'industrie mécanique et électrique». Ces dernières ont commencé a produire certains composants aéronautiques. «D'autres industries spécialisées dans les composants automobiles étaient prédisposées, moyennant quelques programmes de formation ou de qualité, à s'engager dans la fabrication de pièces aéronautiques, car les deux secteurs se ressemblent, sauf que le secteur aéronautique demande des normes de qualité draconiennes». Certaines entreprises du secteur sont entrées en production depuis 2003. A cette époque, la production était vraiment faible. Mais depuis 2006 et surtout avec l'annonce d'Aerolia, filiale d'Airbus, qui a été créée pour la fabrication de structures avions, le secteur a connu une nouvelle dynamique. M. Zekri se réjouit du choix de la Tunisie en tant que site d'investissement : «Avant de s'implanter en Tunisie, la société Airbus a effectué une étude de benchmarking qui a concerné un certain nombre de pays du Maghreb et le choix de la Tunisie comme site d'investissement a été un grand coup promotionnel pour notre pays. C'était un message fort et une vraie reconnaissance des atouts du pays». Il est à rappeler que la branche aéronautique en Tunisie est passée de 7 unités en 2001 employant 951 personnes à 10 entreprises en 2003 employant 1.200 personnes, puis à 46 unités fin 2009, employant près de 2.500 personnes. Elles sont une cinquantaine actuellement qui assurent 4.000 emplois. Selon les dernières statistiques disponibles, les entreprises travaillant exclusivement pour la branche aéronautique sont au nombre de 28. Elles emploient 2.016 personnes, soit 85% de l'emploi total de la branche. La France détient la première place en matière de partenariat avec la Tunisie dans l'aéronautique, avec 37 entreprises résidentes employant 2.169 personnes (90% des emplois de la branche). L'Italie, la Grande-Bretagne et les USA ont chacun un seul représentant et emploient ensemble 132 personnes, soit 5% du total des emplois. Une formation spécifique Pour M. Zekri, «le secteur s'intègre parfaitement dans notre stratégie de développement, surtout d'attraction des investissements directs étrangers. Il cadre aussi avec le point onze du programme présidentiel 2009-2014, qui parle d'une économie à contenu technologique élevé, amie de l'environnement, économe en énergie et innovante, et nous offre des solutions pour la création d'emplois au profit des jeunes diplômés du supérieur, et c'est l'un des secteurs sur lesquels nous comptons énormément». Il précise dans le même contexte que la création d'Aerolia était un message pour les autres entreprises du secteur et le reste des fabricants des composants aéronautiques. «Cette société a créé un effet d'entraînement très important et notre pays a mis les bases nécessaires pour le développement et l'accompagnement de ces investissements. Avec la création d'Aerolia, nous avons connu de nouveaux métiers et d'autres savoir-faire, et le gouvernement tunisien a fourni beaucoup d'efforts pour financer la formation dans ces nouveaux domaines, et ce, en plus des mécanismes déjà en place et qui encouragent la formation au sein des entreprises. D'ailleurs, un centre spécifique à la formation dans le domaine a été créé à M'ghira, près du pôle d'Aerolia (un groupement de sept sociétés : Aerolia et six sous-traitants). Il y aura un programme de formation au profit de quelque 850 à 900 personnes opérant dans le secteur aeronautique en Tunisie, membres de Gitas, en plus de la formation assurée pour les 1.500 employés d'Aerolia et ses sous-traitants ». M. Zekri précise, d'autre part, que la Tunisie soigne ses infrastructures pour offrir aux entreprises des chances additionnelles de réussite, en plus des avantages comparatifs du site. Il cite à titre d'exemple la création de nouvelles zones industrielles à M'ghira ou autres endroits, tout en tenant compte des demandes des investisseurs. Il parle aussi d'infrastructures de transport routier ou maritime qui seront réalisées suite à une demande spécifique formulée par l'une des entreprises de la zone. «Nous avons reçu une demande pour un accès routier direct de la zone industrielle jusqu'au port de Radès. L'usine prévoit la fabrication, dans quelques années, de structures volumineuses destinées aux avions gros porteurs et demande la mise en place d'une route à hauteur et largeur spécifiques». La Tunisie effectue des efforts de promotion pour faire connaître davantage le site qui est favorable au développement de ce type d'activités. «Nous participons aux plus grandes manifestations au Canada, en France, en Allemagne..., en plus des manifestations tunisiennes comme la deuxième édition d'«Aérospace» qui se tiendra les 5, 6 et 7 juillet 2010, le forum de Carthage...» Pour mieux faire connaître le secteur, M. Zekri explique que les activités des entreprises du secteur se déclinent selon trois grands axes. L'ingénierie qui comprend les activités de l'électronique embarquée, les composants électroniques et le développement de logiciels. Le second axe est celui de la production, qui comprend, entre autres, l'usinage mécanique, l'assemblage avion, les pièces en plastique et le traitement de surfaces, tôlerie fine... ainsi que l'axe des services qui comprend, quant à lui, la maintenance et d'autres services pour l'aéronautique. Il explique que le développement de ce secteur entre dans le cadre d'un partenariat gagnant-gagnant. Il permet de créer une industrie à fort apport technologique et participe fortement à la création d'emplois pour les diplômés du supérieur.