La femme rurale qui travaille la terre assure notre nourriture. Qu'a-t-on fait pour lui garantir un minimum de dignité dans sa vieillesse? Les hommes et surtout les jeunes rechignent à travailler la terre. Aujourd'hui, ce sont les femmes qui assurent la survie du secteur agricole. Elles représentent plus de quatre-vingts pour cent de la main-d'œuvre agricole. Quelle que soit la saison, elles sont partout dans les champs. Elles font des dizaines de kilomètres de leur lieu d'habitation pour aller travailler dur sous la chaleur accablante de l'été comme dans le froid glacial de l'hiver. Sans leur travail dans le maraîchage, les légumes et autres produites de la terre connaîtront des prix exorbitants. Sans ces héroïnes, nos oliveraies seraient déjà à l'abandon. La cueillette des olives, le ramassage des tomates, l'arrachage de la pomme de terre, etc., c'est encore elles. Bien sûr, tout en assurant chez elles les tâches ménagères quotidiennes. Les dépenses familiales sont parfois assurées par la femme qui se trouve exploitée : le sous-traitant qui sillonne les hameaux pour trouver cette main-d'œuvre bon marché. Le salaire en lui-même est en deçà de ce que perçoit un ouvrier de sexe masculin. La précarité et le besoin dans lesquels se trouve la femme rurale font qu'elle n'a pas beaucoup de choix. Elle doit travailler pour ne pas tomber dans le dénument total. Avec une patience à toute épreuve, elle brave tous les aléas de la nature et les risques pour gagner laborieusement son pain et celui de ses enfants. Mais avec l'âge, et ce qu'elle avait enduré pendant des décennies, elle se retrouve au bout du compte dans l'incapacité de continuer et par là sans ressources. Elles sont des centaines de milliers à vivre ainsi et ne sachant pas de quoi demain sera fait. Il est grand temps pour que cette injustice prenne fin pour donner à celles qui assurent notre nourriture de l'espoir en l'avenir, en leur assurant un minimum de couverture sociale pour qu'elles finissent leurs jours décemment et à l'abri du besoin. Un fonds spécial Aux gouvernants qui dépensent des milliards pour des futilités (80 milliards alloués à la présidence de la République) de trouver la bonne solution qui est d'ailleurs à la portée si l'on fait preuve d'imagination en instituant un fonds de solidarité. Ce fonds d'entraide pourra faire l'objet de mesures spéciales quant aux contributions qui doivent l'alimenter. Une part pourrait provisoirement provenir des caisses de l'Etat, une autre serait à la charge des cultivateurs et des industriels dans l'agroalimentaire. Les céréaliers versaient 100 millimes sur chaque quintal de blé ou d'orge au fameux (26-26), pourquoi donc ne pas les destiner pour une si bonne cause? Aussi, ne peut-on pas imaginer la ponction de quelques autres millimes sur chaque kilo de tomate transformée, sur chaque kilo d'olives, chaque kilo de raisin de cuve? Cela est possible si l'on parvient à conjuguer les efforts à tous les niveaux pour aider cette catégorie sociale, à besoins spécifiques, mais dont l'apport économique est de toute première importance. Ces femmes battantes n'ont rien demandé jusqu'ici, mais si elles ne l'ont pas fait, c'est à la communauté nationale qu'incombe le devoir d'agir dans ce sens, pour leur permettre de vivre dans la dignité. Il est du devoir de tous d'avancer et de mettre en chantier de tels projets qui donnent aux révolutions leurs sens. Sinon pourquoi se révolter? La Tunisie, qui vit en effervescence depuis 2011, et dont les catégories sociales n'ont de cesse de revendiquer le partage équitable de la richesse, ne peut se permettre d'oublier et d'ignorer celles dont la décence leur interdit de hausser la voix pour revendiquer ce qui n'est, au fait, qu'un droit.