«Je ne suis pas là uniquement pour sauver la saison touristique. Je suis plutôt là pour engager les réformes structurelles qui ont tardé à se mettre en place et dont l'urgence se fait sentir», déclare la ministre du Tourisme, 80 jours après sa nomination Il a fallu qu'Amel Karboul prenne les rênes du ministère du Tourisme pour qu'enfin l'étude stratégique Roland Berger entre en vigueur. Une stratégie baptisée aujourd'hui « 3+1 » : Qualité/brending/diversification et modernisation du secteur. Elle est exécutée en étroite collaboration avec les professionnels du secteur. « Essoufflement, crises, perte d'attractivité, fragilisation, concurrence, manque à gagner, manque de rentabilité, perte d'investissements sonnent le glas de l'attentisme et signent l'amorce avec l'action », a déclaré Amel Karboul. Depuis la révolution, le tourisme n'arrive pas à se redresser et à retrouver ses chiffres habituels. Même pas ceux de l'année de référence 2010. Et, quand le tourisme va mal, l'économie en souffre. Amel Karboul est déterminée à collaborer étroitement avec la profession pour redresser la barre. « On est là pour prendre les décisions courageuses, nécessaires, afin de redresser l'économie nationale. D'ailleurs, 60% de mon temps est dédié à la mise en place des réformes structurelles qui traînent depuis des décennies et dont l'impact sur le secteur est plus que néfaste. Nous sommes là pour travailler, et vous pourrez par la suite évaluer les résultats qui seront réalisés. Il est certes encore prématuré pour évaluer mon passage à la tête du ministère. Cela dit, lors de mes visites dans le Sud tunisien et dans le Nord-Ouest du pays, le constat est désormais triste. La situation est déplorable. Un grand nombre d'hôtels sont fermés et les commerçants sont en attente des touristes», a indiqué la ministre. En tout état de cause, après trois ans de crise, la saison touristique 2014 semble s'annoncer sous des signes positifs. Au regard des réservations déjà enregistrées, la haute saison serait bonne. Mais il ne faut pas s'arrêter à ce niveau, et il est impératif de travailler encore pour garantir une arrière-saison aussi bonne. Le tourisme n'est pas une affaire exclusive du ministère ou de l'Ontt, a rappelé Amel Karboul. Bien au contraire, le tourisme en général et la réussite de la saison 2014 sont l'affaire de tous les Tunisiens. La première rencontre avec les médias a été une occasion renouvelée pour rappeler l'importance du secteur touristique dans l'économie nationale. A ce titre, la ministre a souligné que son département œuvre afin que le secteur soit une des industries les plus importantes dans le pays, comme en Grande- Bretagne ou en Espagne. Quatre-vingts jours sont peut-être insuffisants pour établir un bilan exhaustif du travail d'Amel Karboul, mais quelques actions engagées méritent le détour. Depuis sa nomination à la tête du département, Amel Karboul a procédé, avec son staff, à une évaluation du programme de mise à niveau des établissements hôteliers. Elle a, également, engagé une campagne pour l'environnement et l'entretien des plages, et mis en place une carte nationale de l'investissement avec, en prime, la création d'un comité de suivi des investissements et d'encadrement des promoteurs. A ce titre, le projet de la carte nationale d'investissement sera soumis, le mois prochain, à une consultation régionale. La ministre a par ailleurs réussi à obtenir 13 MD supplémentaires pour des opérations de marketing et de publicité. Néanmoins, elle a pris une décision, le moins qu'on puisse dire courageuse, dans ce sens. Il s'agit d'une évaluation de ces opérations, sur recommandation des professionnels du secteur, afin de déterminer le retour sur investissement par cible avec, éventuellement, un redéploiement du budget, si les résultats ne sont pas bons. Il n'est pas vrai, a souligné Amel Karboul, qu'en période de crise, il ne faut pas communiquer. Bien au contraire, la destination Tunisie a besoin aujourd'hui, plus que tout, d'une opération « Complete PR », afin de la promouvoir et d'améliorer son image de marque, dans un contexte de concurrence acharnée entre les destinations. D'ailleurs, au regard des chiffres avancés par l'Organisation mondiale du tourisme, on compte aujourd'hui un milliard de touristes de par le monde, dont uniquement quelque 7 millions optent pour la Tunisie. Ils seront deux milliards dans 10 ans. Par contre, les destinations ne connaîtront pas ce sort. Il faudrait donc, selon la ministre, œuvrer à redonner à la Tunisie sa place sur l'échiquier international du tourisme. Dans ce contexte, elle a indiqué que l'Afrique représentait un grand marché à conquérir, et pas seulement pour le tourisme, mais pour l'ensemble des secteurs économiques. Evoquant la problématique de l'endettement des unités hôtelières, la ministre a précisé qu'une commission s'est penchée sur la question. Elle est composée de représentants de la Banque Centrale de Tunisie, des banques concernées, des professionnels et du ministère de tutelle. « L'idée est de trouver des solutions globales, justes et satisfaisantes pour toutes les parties, d'où le traitement des dossiers au cas par cas», a-t-elle indiqué. Le gouvernement actuel est face à une équation difficile. D'une part, l'impatience des Tunisiens pour la réalisation de résultats concrets. De l'autre, le temps qu'il faut pour mettre en place des réformes structurelles, dont les résultats se feront sentir à long terme et non immédiatement. «Je préfère annoncer des réalisations concrètes plutôt que des promesses de réalisations», a-t-elle conclu.