Jusqu'où peut porter la baraka dont bénéficie, aujourd'hui, le onze national? Ultime paradoxe : l'équipe de Tunisie met les deux pieds, ou presque, en phase finale de la CAN 2015 le soir même de son plus mauvais match depuis bien longtemps. Sa victoire miraculeuse — et très heureuse avant-hier soir à Monastir (1-0) à la dernière minute du temps additionnel — la laisse dans une position très favorable, un seul point la séparant de la grand'messe continentale. On peut dire sans risque de se tromper que le plus dur a été fait. Certes, dans la douleur, telle une césarienne, avec ses limites qui sautent aux yeux, mais aussi avec son courage, sa patience, son abnégation à la tâche et ce zeste de chance qui ne gâte rien. «Saint-George», faiseur de miracles Certes, les Lions de la Terenga constituent un bel ensemble homogène, aussi bien physique que technique, solide et hautement compétitif. Pourtant, ce sont surtout les carences manifestées par les nôtres qui ont rendu les copains de Papiss Cissé des monstres de joueurs dominateurs et qui donnaient parfois l'impression de se promener carrément. En deuxième période, les hommes de George Leekens n'ont plus existé, et faisaient peine à voir. Le ballon ne sortait plus, la ligne médiane était confisquée par Mohamed Diamé et consorts, la défense à trois prenait l'eau de toutes parts. Le team national était carrément à la dérive! Puis, le miracle à l'ombre de Ribat: les deux corners consécutifs, l'assist de Maâloul, le premier tir raté de Ferjani Sassi, et le second qui fait mouche. «Saint-George» (Leekens) l'avait prédit : bien avant la rencontre, il avait «annoncé» au milieu du CSS qu'il allait rentrer et inscrire un but. La version sera confirmée par le joueur lui-même. A défaut de faiseur de miracles capable de transformer le jeu de l‘équipe en trois mois d'exercice, le technicien belge apporte dans son sillage des performances très heureuses, qui portent le label d'une chance inouïe. Une victoire à la dernière minute face au Botswana, quatre points pris devant un Sénégal qui a dominé de façon on ne peut plus claire... Mais on ne peut pas s'accrocher indéfiniment à la fortune. Dame chance, on le sait, est une compagne infidèle, coquine et versatile... Des stratégies moins frileuses Avec moins de pression et de stress pesant sur les Aigles, avec la sérénité et la confiance qui s'installent, le staff technique a toute la latitude pour remédier aux carences, améliorer le jeu et opter pour une stratégie moins frileuse. Dans ce dispositif en 5-4-1, avec Fakhreddine Ben Youssef jeté en pâture aux défenses adverses, la sélection entrevue à Dakar et à Monastir n'ira pas très loin. La confiance, le sélectionneur doit être le premier à l'insuffler et à la communiquer par des choix pertinents. Soit le contre-exemple de la double confrontation face au Sénégal. La phase finale — où les Aigles se trouvent déjà, sauf accident improbable— ne laisse aucune chance à ces petits calculs frileux et à ce foot négatif. Le réalisme a des limites et devient contre-productif losrqu'on en abuse tel un cliché qu'on rabache à tout bout de champ. Sans vouloir jouer les rabat-joie, cela mérite d'être rappelé.