Xavier Dolan qui signe là son cinquième film dans la foulée de J'ai tué ma mère, Laurence Anyways et Tom à la ferme, se focalise sur ces trois personnages qui portent fabuleusement le film La section «Cinéma du monde» des JCC 2014 comporte des films à voir certainement, dont L'image marquante, du Cambodgien Rithy Panh qui recrée de manière originale, à travers des images d'archives et des figurines d'argile, les atrocités des Khmers rouges commises entre 1975 et 1979 au Cambodge. Il y a aussi l'excellent Winter Sleep, du Turc Nuri Bilge Ceylan, Palme d'or de Cannes 2014, mais aussi le tout nouveau film du Brittanique Ken Loach Jimmy's Hall, sélectionné en compétition à Cannes 2014, ainsi que Still The Water, de la réalisatrice japonaise Naomi Kawase. Enfin, Mommy, du jeune réalisateur canadien Xavier Dolan, qui a époustouflé le public et la critique internationale au dernier Festival de Cannes, figure parmi le lot. Notre lecture du film. Mommy, c'est Diane, une veuve et femme indépendante, à la forte personnalité et au langage fleuri. Elle obtient la garde de Steve, son fils, un adolescent hyperactif et violent. Mommy, qui subit de plein fouet la crise sociale et économique, comme tant de familles au Canada, peine à joindre les deux bouts, grâce à de petits boulots. Mais le plus dur pour elle, c'est d'apprivoiser Steve, psychologiquement instable. Leur voisine Kyla, une enseignante énigmatique, est en congé sabbatique, elle tente, malgré la crise psychologique qu'elle traverse, de les aider. Mais Mommy et Steve parviendront-ils à trouver l'équilibre tant souhaité, voire rêvé ? Xavier Dolan qui signe là son cinquième film dans la foulée de J'ai tué ma mère, Laurence Anyways et Tom à la ferme, se focalise sur ces trois personnages qui portent fabuleusement le film, alternant des scènes dramatiques, violentes et explosives, et des scènes d'apaisement, voire de pur bonheur. Le film est émaillé de trouvailles (la scène avec le caddy, la promenade sur le long board à bicyclette) et de séquences oniriques (notamment celle des noces de Steve rêvées par sa mère). L'ensemble de l'opus se déroule dans un cadre rétréci, de format rectangulaire, afin de traduire l'étouffement et l'horizon bouché des personnages ainsi que leur fragile équilibre psychologique. En fait, le cadre ne s'élargit sur la totalité de l'écran qu'à deux reprises : lors de la séquence jubilatoire vécue par les personnages en pleine promenade à bicyclette et lors de la scène finale du film, quand Steve décide de s'échapper du centre où il a été interné par sa mère. Mais ce qui reste une énigme, voire la faiblesse du film, c'est que l'on ne comprend pas d'abord les raisons du mal-être de Kyla, devenue bègue depuis deux ans, ni comment ce personnage, lui-même psychologiquement altéré, peut-il venir en aide et à la rescousse des deux autres personnages en crise. Bref, Xavier Dolan, qui a déjà traité, entre tension et humour, des mêmes rapports conflictuels déjà, dans J'ai tué ma mère, édulcore ici son propos en donnant une image plus nuancée, car plus positive de la mère, en déroulant de manière profonde, fond et forme confondus, les relations psychologiques entre les trois personnages centraux. Il filme, donc, leur crise existentielle, leur mal-être, la violence de leur langage et sentiments, nous l'avons dit, dans un cadre à fleur de peau, multipliant les gros plans. La lumière, la musique, le jeu des acteurs s'ajoutent, de manière fonctionnelle pour créer cette émotion convoitée et si difficile à susciter au cinéma. Il faut dire que la force et le talent des acteurs, Antoine Olivier Pilon (Steve), Anne Dorval (Mommy) et Suzanne Clément (Kyla) ajoutent à la magie de l'ensemble. Mommy a raflé le prix spécial du jury au festival de Cannes 2014.