Insensibles à la paralysie de la vie économique, scolaire et universitaire, voire aux pertes sèches financières qu'ont subies les sociétés de transport — déjà en grandes difficultés — les agents ont entamé une grève sauvage et comptent la poursuivre en dépit de toute logique et de tout sens civique, malgré les mesures de réquisition prises par le ministère de tutelle. Aujourd'hui, il ne s'agit pas de sévir mais d'appliquer strictement la loi Le ministère du Transport a appelé hier, dans un communiqué, tous les agents concernés par la décision de réquisition à consulter les notes de services et les listes établies à cet effet par leurs sociétés, en vue de rejoindre leurs lieux de travail et exercer leurs missions habituelles. Les agents qui ont répondu jusqu'à présent aux décisions de réquisition sont, d'après le département du transport, ceux des sociétés régionales de Nabeul, Gabès et Bizerte ainsi que les contractuels travaillant avec la Sntri (Société nationale de transport interurbain) et les agents travaillant dans le transport scolaire à Ras Jebel. Le ministère escompte que «les agents tiennent compte de l'intérêt national et appliquent la loi, pour éviter les poursuites administratives et judiciaires», soulignant que les négociations sont en cours avec la partie syndicale, pour rétablir complètement l'activité du transport, notamment dans les régions où les agents du transport sont entrés en grève depuis le 12 janvier. Grève sans préavis Une grève sans préavis, observée depuis trois jours, par les agents de la Transtu ainsi que de plusieurs sociétés régionales, a paralysé les services de transport public dans la capitale et nombre de villes de l'intérieur. Des usagers ont exprimé leur colère et leur refus face à cette grève sauvage. La décision de recourir à la procédure de réquisition du personnel prise le 13 janvier a été rendue publique le 14 janvier par le ministère du Transport. Une réunion ministérielle, tenue mardi 13 janvier, à La Kasbah, sous la présidence du président du gouvernement provisoire, Mehdi Jomaâ, a appelé les syndicats de transport de voyageurs et des produits miniers à suspendre leur grève, affirmant que les voies du dialogue sont toujours ouvertes. Lors d'un point de presse, organisé au terme de la réunion, le ministre des Affaires sociales, Ahmed Younbaï, a indiqué que ces grèves n'avaient pas respecté les procédures légales stipulées dans le code du travail, soulignant que toute décision de grève doit être précédée d'un préavis de grève 10 jours à l'avance. 420 mille dinars de pertes sèches Il y a lieu de noter à cet égard que les pertes enregistrées par la Société des transports de Tunis (Transtu), en raison de la grève sans préavis et ouverte menée par les agents de la société, depuis lundi après-midi jusqu'à hier, ont atteint 420 mille dinars. M. Mohamed Chamli, directeur de la communication et des relations extérieures à la Transtu, a précisé, à l'agence TAP, que les recettes quotidiennes de la société, provenant des bus et des métros, s'élèvent à 140 mille dinars, rappelant que la Transtu transporte quotidiennement un nombre variant entre 1,3 et 1,5 million de voyageurs, uniquement dans le grand Tunis. Il a été décidé, a-t-il rappelé, de réquisitionner environ 1.500 agents, soit 30% du nombre total des chauffeurs et receveurs de la Transtu (au nombre de 4.500), mais cette décision n'a pas été respectée par les agents. De son côté, le conseiller à l'information au ministère du Transport, Mohamed Ali Aboudi, a indiqué que les agents réquisitionnés à la Société régionale du transport de Nabeul ont repris, hier, leur travail, alors que les agents de la Transtu, de la Société nationale de transport interurbain (Sntri) et de la Société régionale du transport de Sfax (Soretras) ont refusé cette décision de réquisition. Paralysie totale dans la capitale et les villes de l'intérieur En ce qui concerne les deux sociétés régionales de Gabès et de Bizerte, elles ont assuré le transport des agents et des ouvriers des entreprises qui ont des contrats avec eux, tel le cas du Groupement chimique de Gabès, a-t-il encore révélé. Dans le même contexte, il a précisé que les sociétés de transport régionales qui n'ont pas assuré le transport des agents des entreprises privées, avec lesquelles elles ont des contrats, se trouveront dans l'obligation de payer des pénalités de retard. Il a, par ailleurs, noté que le transport scolaire a repris dans la délégation de Ras Jebel, dans le gouvernorat de Bizerte. Depuis le lancement de la grève, a ajouté M. Aboudi, une cellule de crise a été formée au sein du département du Transport, pour suivre la situation. La cellule est présidée par le ministre du Transport et compte parmi ses membre les directeurs régionaux du ministère. Il est à noter que la Transtu, la Sntri et les sociétés régionales du transport de Sfax, de Bizerte, de Nabeul et de Gabès avaient publié des notes de service et les listes des noms d'agents réquisitionnés et appelés à reprendre le travail à partir du 14 janvier 2015. Cette grève de transport, qui est à son quatrième jour successif, a engendré une paralysie totale dans la capitale et plusieurs villes intérieures du pays, ce qui a suscité la colère des usagers. Structure syndicale De son côté, l'Union des travailleurs de Tunisie (UTT) a appelé, hier, les autorités de tutelle à ouvrir des négociations immédiates pour trouver des solutions aux problèmes posés par la grève des transports. La Fédération générale des transports relevant de l'UTT s'est élevée contre la révision par le ministère du Transport de la procédure de calcul de la prime de fin d'année en tenant compte du facteur du rendement permettant de réduire le coût de 29 MD à 10 MD, faisant ainsi monter la surenchère au lieu de chercher l'apaisement et de faire valoir l'intérêt national. Cette révision avait été le résultat d'accords conclus entre les autorités de tutelle et une partie syndicale (Ugtt) qui ne représente pas l'ensemble des agents. L'UTT a dénoncé «la politique d'exclusion» adoptée par le ministre du Transport qui ne l'avait pas associée, étant représentée dans l'ensemble des ateliers de la Transtu. Le syndicat a appelé à cet égard le chef du gouvernement et le ministre du Transport à intervenir pour rectifier cette situation. Colère des usagers A Sfax, la grève observée par les agents de la Société régionale de transport (Soretras), pour revendiquer une prime de bilan au titre de l'année 2014, est à son troisième jour consécutif malgré la décision de réquisition, mesure prise mercredi par le ministère du Transport pour garantir un minimum de service de transport public. Les usagers des lignes de transport public à Sfax ont exprimé leur colère face à cette situation.La grève a obligé des élèves, des étudiants et des employés à emprunter d'autres moyens de transport pour se rendre à leurs destinations. Selon le secrétaire général du Syndicat de base des agents et cadres de la Soretras, Mohsen Youssefi, la décision de réquisition prise par le ministère de tutelle «ne respecte pas la loi». Le président-directeur général de la Soretras, Ryadh Moalla, était injoignable pour donner plus de précision sur cette décision, a précisé le correspondant de l'agence TAP dans la région. Par ailleurs, la Commission administrative de la Fédération générale du transport s'est réunie, hier, en urgence, au siège de l'Union générale tunisienne du travail (Ugtt) pour trouver une issue favorable à la grève observée, depuis lundi dernier, par les agents de la Société tunisienne du transport «Transtu» ainsi que par plusieurs sociétés régionales. Convoquée par la Fédération générale du transport et le bureau exécutif de l'Union générale tunisienne du travail (Ugtt), cette réunion est présidée par le Secrétaire général adjoint de l'Ugtt chargé des offices et des établissements publics, Kamel Saâd. Selon le Secrétaire général de la Fédération générale du transport, Moncef Ben Romdhane, la réunion se penchera sur les moyens de trouver une issue favorable à ce problème et de prendre les décisions adéquates à ce effet, faisant remarquer que des négociations ont été engagées avec l'autorité de tutelle à ce sujet.