Intitulé «Sereneta Mediterranea», le concert présenté dimanche soir au Festival international d'Hammamet par l'Ensemble philharmonique de la région des Marches (au centre de l'Italie) a été bercé par le vent. Un vent plutôt persistant et soufflant de plus en plus fort, emportant les partitions et brouillant parfois le son. Or cet élément parasite et inattendu n'a en rien perturbé la concentration des quinze musiciens (onze violonistes, deux violoncellistes, un contrebassiste et un guitariste solo) de cet ensemble qui a joué comme un seul homme. Professionnel jusqu'au bout des cordes, l'orchestre a enchanté le public par la délicatesse et la justesse de son jeu. Mais n'est-ce pas paradoxal que cette formation de musique classique, qui a présenté des morceaux de Boccherini et de Joaquim Rodrigo, soit programmée parmi les spectacles de world music du festival d'Hammamet ? Réponse de Giovanni Seneca, guitariste soliste, compositeur et directeur du Filarmonica Marchigiana : « Les symphonies classiques peuvent durer jusqu'à 40 minutes. Les pièces de la musique populaire ne dépassent pas les trois minutes. Nous avons voulu mixer les deux registres. Nous nous sommes beaucoup inspirés de la simplicité et de la forme courte et alerte de ce répertoire ethnique pour produire Serenata Mediterranea, dont nous avons fait un album». Du sud de l'Italie à l'Espagne en passant par les territoires insulaires méditerranéens et jusqu'aux rivages de l'Amérique Latine, le voyage pour lequel nous ont conviés les instrumentistes à corde italiens sentait le parfum des fêtes locales, des danses, des chants et des processions populaires. Giovanni Seneca, qui a signé la majorité des morceaux de Serenada, est un virtuose de la guitare, nourri des différents modes d'interprétation de cet instrument plutôt rare dans les ensembles classiques. La version nouvelle du fameux Adagio de l'Espagnol Joaquim Rodrigo qu'il a créé pour ce concert préserve le thème de ce morceau immortel tout en l'imprégnant d'une touche contemporaine d'une nouvelle fraîcheur. Même chose pour la tarentelle, musique traditionnelle italienne dont les rythmes sont une invitation au mouvement des corps, et que Giovanni Seneca a réinterprété à sa manière en gardant toute la joie de vivre de ces sonorités qui donnent son âme au sud de la péninsule italienne. Le souffle de la brise marine était au rendez-vous dimanche soir. Pas le public. Dommage pour les absents. Ils avaient vraiment tort ce soir-là…