Torture, Hazem Amara, alcool au volant... Les 5 infos de la journée    Les Etats-Unis rejettent les amendements de l'OMS sur les pandémies    Photovoltaïque : nouvelles mesures pour accélérer les raccordements    Sfax : Le stade Taieb Mhiri de nouveau opérationnel pour accueillir tous les matchs    Tunisie Telecom et le Club Sportif Sfaxien renforcent leur alliance stratégique pour trois nouvelles années    Composition de la commission d'évaluation des recherches scientifiques féminines    Volley-Mondial U19: La Tunisie, championne d'Afrique, vise les quarts en Ouzbékistan (sélectionneur)    En prison, on perd la liberté. Pas le droit à la vie    Le pont de Bizerte entre dans sa phase décisive : fondations profondes lancées    BRICS - Une mosaïque économique: Entre complémentarités et fractures    Vague d'arrestations ciblant la communauté LGBTQ+ : Damj tire la sonnette d'alarme    Nouveau Code du travail : Quelles formes de fraude les employeurs utilisent-ils ?    Décès du journaliste Youssef Oueslati    Appel à participation : l'Unesco lance une enquête mondiale sur les femmes, la culture et les urgences    L'UE adopte un 18e paquet de sanctions contre Moscou : le pétrole russe dans le viseur    Nouvelle agression de l'entité sioniste : raid aérien sur Soueida    Affaire UReputation vs Meta : la justice américaine autorise l'accès aux preuves    Audi Tunisie présente la nouvelle Audi Q6 e-tron SUV : l'ère du luxe électrique entre dans une nouvelle dimension.    « Nous t'aimons, Ons » : le monde du tennis ému après l'annonce de Jabeur    Ons Jabeur prend un break dans sa carrière sportive    Marché boursier tunisien : forte progression portée par les biens de consommation et les finances    Smartphones, TV, climatiseurs, pourquoi acheter quand on peut louer ?    Etat des Bons du Trésor en Tunisie au 15 juillet 2025 : une progression marquée des BTA    Vendredi sous haute température : jusqu'à 43°C attendus    Korba : démarrage des travaux de la station d'épuration prévu pour septembre 2025    Violences à l'hôpital : aux urgences, l'insécurité devient la norme pour les soignants    Le CNCI lance un appel pour la candidature de la Tunisie à l'Oscar 2026 du meilleur film international    Météo en Tunisie : ciel dégagé, températures en légère hausse    Pièce "Mère des pays" : un voyage théâtral à travers l'histoire et l'identité Tunisiennes au Festival Hammamet 2025    Yadh Ben Achour - Chawki Gaddes: le juriste, entre l'art et la science    La Tunisie et l'UE célèbrent le 30è anniversaire de la signature de leur Accord d'association    Que propose la nouvelle édition du Festival de Sfax aux passionnés de musique ?    Ons Jabeur s'éloigne des courts pour respirer et guérir    Enfin: des TPE chez la SONEDE ! Payez vos factures par carte    Festival Hammamet 2025 : RUST et Alsarah & The Nubatones, fusion électrisante de modernité et d'héritage    Météo en Tunisie : mer très agitée près des côtes nord    Violence dans les stades : vingt ans de prison pour faire taire les gradins    À deux jours de Tomorrowland, un incendie ravage la scène principale du festival    Triste nouvelle : la mère de l'actrice Hend Sabri est décédée    La justice française ordonne la libération du Libanais Georges Abdallah    Décès de la mère de l'actrice tuniso-égyptienne Hend Sabri    Festival du Film Arabe d'Al Qods 2025 : « Aicha » de Mehdi M. Barsaoui remporte le prix du meilleur film    Fort séisme de magnitude 7,1 en Alaska : risque de tsunami signalé    Une secousse tellurique ressentie à Gafsa    Carrefour Tunisie accompagne la 59e édition du Festival International de Carthage    Carrefour Tunisie félicite Walid Boudhiaf pour son nouveau record national à -118 mètres    L'Espérance de Tunis enrôle le Mauritanien Ibrahima Keita pour deux saisons    Tentative de victimisation : Atef Ben Hassine sous le feu des critiques    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La Tunisie a mal à sa classe politique
Publié dans Leaders le 04 - 07 - 2016

Plus de cinq ans après la révolution, les Tunisiens ne voient rien venir de tout ce qu'on leur avait promis pour améliorer leur condition sociale. Ils ont certes la démocratie et la liberté d'expression dont ils usent tout leur soûl, mais ces acquis ne nourrissent pas leur homme. La révolution tel un ouragan avait tout balayé sur son passage. S'il est facile de déconstruire, la reconstruction s'est s'avérée problématique. Face à la complexité de la tâche, les Tunisiens replongent dans la sinistrose et se remettent à pratiquer la méthode Coué à l'envers, en recourant à l'autoflagellation, comme s'ils voulaient guérir le mal par le mal. Faute de résultats probants, ils tombent dans «l'à-quoi-bonisme». S'ils croient encore à quelque chose, c'est à la fatalité de l'échec. Et s'ils perçoivent une lueur d'espoir si mince soit-elle, on peut faire confiance à la presse et aux «experts en tout», véritables prophètes de malheur pour les rappeler à la dure réalité. Il n'est plus question que de mauvaises nouvelles : la gestation difficile du gouvernement d'union nationale, la persistance de la menace terroriste, la crise économique, les rumeurs persistantes de faillite de banques, la débandade du dinar, l'insécurité dans les grandes villes, la montée de la corruption, sans oublier de la énième crise de Nidaa Tounès. Même les affaires de droit commun ne sont plus ce qu'elles étaient: des vols à la tire on est passé au grand banditisme avec des braquages de plus en plus audacieux et des crimes qui rivalisent d'horreur.
La source du malheur tunisien
Six gouvernements ne sont pas parvenus à redresser l'économie du pays, comme si c'était la quadrature du cercle. A quoi attribuer cet échec ? A l'incurie du gouvernement incapable de démêler l'écheveau d'une crise dont la gravité est d'une ampleur sans précédent ? Certes, mais aussi et surtout à cette "bande des quatre", UGTT, Front Populaire, Nidaa Tounès et Ennahdha, acteurs incontournables de la vie politique tunisienne, mais aussi source du malheur tunisien. Chacun d'eux se dit soucieux de la stabilité du pays, mais agit selon ses propres intérêts.
L'UGTT est la principale force du pays comme le clament ses adhérents. Au nom des services qu'elle estime avoir rendu au pays depuis la lutte nationale, elle se croit autorisée à agir à sa guise. Ses syndicats de base à l'intérieur sont les véritables maîtres du pays : Ils peuvent décréter une grève, observer un sit in, demander et obtenir le renvoi du gouverneur sans que la direction à Tunis émette la moindre réserve. Face à ces dérives, les journalistes observent un mutisme total, au nom du politiquement correct:"On ne critique pas la classe ouvrière". Ses revendications sont autant d'oukases et quand elle condescend à négocier, c'est, dans la plupart des cas, pour arracher un accord léonin au gouvernement, tout en sachant que celui-ci devra, pour honorer ses engagements, puiser dans les crédits alloués généralement aux projets de développement. Elle rejette la trêve sociale proposée par le chef de l'Etat, tient à être consultée sur toutes les décisions: les programmes scolaires, l'âge de la retraite, le déficit des caisses sociales, les nominations de ministres.
Aujourd'hui, l'UGTT, c'est une organisation qui dispose d'un Etat. Jamais sans doute dans l'histoire, un syndicat n'aura été aussi puissant, pas même les syndicats américains AFL-CIO dans les années 50 et 60, du temps de George Meany, ou la CGT française de l'immédiat- après-guerre. Comme l'appétit vient en mangeant, elle réclame maintenant une institutionnalisation du dialogue social où elle aurait probablement le beau rôle. Nettement marquée à gauche, plus proche de Bakounine que de Ferhat Hached dont elle se réclame pourtant, l'UGTT donne l'impression, parfois, par son anticapitalisme primaire, ses relations tendues avec le patronat, son activisme revendicatif qui rebute les investisseurs tunisiens et étrangers et son irréalisme d'être un Front populaire bis dont elle est d'ailleurs proche idéologiquement.
Le parti avant la patrie
Ah le Front populaire! C'est le réceptacle de nos illusions, l'exemple-type de la gauche archaïque. Sa logorrhée pseudo révolutionnaire nous rappelle notre jeunesse. Quand on entend ses dirigeants pourfendre «le grand capital», «l'impérialisme américain"» ou «les institutions financières internationales», on a l'impression de feuilleter ces ouvrages de la Petite Collection Maspéro,où nous nous abreuvions des idées des maîtres-penseurs de l'époque et de revivre cet univers manichéen dans lequel nous nous étions enfermés.
Depuis le chute de l'URSS, tout le monde a évolué sauf le Front populaire. il reste accroché à ses vieilles lunes, la lutte des classes et la dictature du prolétariat. même si, officiellement, il y a renoncé. Il se dit prêt à gouverner, mais que ne l'a-t-il pas fait plus tôt, au lendemain des élections législatives, lorsque le parti vainqueur lui avait proposé d'entrer au gouvernement. Soucieux de sauvegarder leur pureté révolutionnaire, ses dirigeants étaient paniqués rien qu'à l'idée d'être confrontés à l'épreuve du pouvoir. Leur refus de prendre part aux consultations sur le gouvernement d'union nationale après avoir remué ciel et terre pour y participer, procède de la même logique. Parti des mécontents, le FP l'est et le restera. Il se complait dans sa fonction tribunitienne. Sa ligne de conduite est simple: «pour tout ce qui est contre, contre tout ce qui est pour». Avec ses 15 députés obtenus grâce à un code électoral inique (9% des sièges alors qu'ils n'a remporté que 3,5 % des voix aux élections) et sa stratégie de la tension, il conserve une capacité de nuisance non négligeable tant à l'assemblée que dans la rue. Principal parti d'opposition, il est de tous les mouvements de protestation: dans le bassin minier, à Kerkennah, Séliana. Commentaire d'un homme politique: il ne fait pas de l'opposition, mais de la résistance.
Le blocage de la vie politique
A l'autre bout de l'échiquier, deux partis se partagent le pouvoir, le premier Ennahdha se dit un parti civil mais avec référent islamique. Cette décision annoncée avec fracas lors du Xe congrès a été présentée comme une concession majeure sur l'autel de la paix civile. La prédication est confiée aux prédicateurs alors que le parti se limitera à un rôle politique. L'émotion a été si grande chez les militants de base que la direction du parti a dû relativiser : «c'est une spécialisation, on se contentera d'une activité politique, mais on ne deviendra pas pour autant, un parti laïque». En réalité, il s'agit d'une mesure cosmétique qui ne porte pas à conséquence. Ennahdha n'est pas près de se débarrasser de ses fondamentaux, ni de ses travers : sa propension à se considérer comme le défenseur patenté de l'islam, le double langage, la pratique de l'entrisme qui lui a tant réussi par le passé : il est partout, dans l'administration, l'enseignement, chez les agriculteurs, les scouts, dans les mosquées (cela va de soi) et dans les associations. Seules l'armée et la police ne sont pas encore garanties comme l'a déploré un jour Ghannouchi. Mais le Grand remplacement à la sauce nahdhaouie est en marche. Enfin, last but not least, ni le cordon ombilical qui le rattachait aux «Frères musulmans» n'a été coupé, ni son allégeance à la confrérie depuis 1975 rompue.
Sous le gouvernement Essid, Ennahdha a cumulé les avantages d'un parti au pouvoir en participant à l'élaboration de la politique nationale et ceux d'un parti d'opposition, en se démarquant de temps en temps de telle ou telle décision qui ne fait pas l'unanimité. Elle ne dispose que d'un ministre et d'un conseiller auprès du chef de gouvernement avec rang de ministre. Ils seront au moins quatre dans le prochain cabinet. La voie royale du pouvoir lui est grande ouverte. Il a déjà entamé sa reconquête, au pas de charge, avec en point de mire les élections municipales. Il faut commencer par le pouvoir local. Le reste suivra. Pour ce faire, 16000 militants ont été mobilisés et quand on sait la discipline et le dévouement des militants, on peut être sûr du résultat.
Aussi paradoxal que cela puisse paraître, le grand vainqueur des élections, Nidaa Tounès, est aussi celui qui en a pâti le plus. On était bien conscient de ses fragilités, notamment son caratère hétéroclite et l'ambition dévorante de ses cadres, mais on avait cru que le bon sens et un minimum de patriotisme finiraient par l'emporter. Malheureusement, ces cadres étaient dépourvus des deux. Officiellement, ce parti est le chef de file de la coalition gouvernementale et Habib Essid, censé être proche de lui, sinon son candidat. Pourtant, Nidaa n'a jamais cessé de le saboter surtout au cours des derniers mois et d'essayer de l'acculer à la démission avec le même acharnement qu'ont mis ses militants à s'autodétruire. A l'épreuve du pouvoir, ce parti a montré un visage différent de celui de la campagne électorale, faisant litière de tous les principes et les valeurs qu'il prétendait défendre. Ce faisant, ses cadres se sont discrédités et ont donné de la politique et des politiciens une image négative, tout en rendant un fier service à leurs adversaires, privant par là-même la scène politique d'un parti séculier fort qui aurait fait pièce à Ennahdha.
Plus de cinq ans après la révolution, la Tunisie a mal partout: à ses élites, à ses journalistes, à sa classe politique et surtout à ce quatuor censé donner l'exemple, mais qui a fait main basse sur le pays et plongé les Tunisiens dans un abîme de désespoir. Il n'aura pas peu contribué à affaiblir l'Etat et à enfoncer davantage le pays dans la crise. Il est, aujourd'hui, le principal responsable du blocage de la vie politique. Avant la révolution, les Tunisiens se désintéressaient de la politique. Aujourd'hui, ils en sont dégoûtés.
. Plus que jamais, le «tous pourris» est d'actualité.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.