Ghofrane Ghrissa offre un triple or historique à la Tunisie à Luanda    Le Festival Néapolis du Théâtre pour Enfants de retour du 21 au 28 décembre 2025 à Nabeul et plusieurs régions    CAN Maroc 2025 : programme des matchs de la Tunisie, préparatifs et analyse des chances    Mpox : une nouvelle souche identifiée pour la première fois à Berlin    Saisie exceptionnelle à Sfax : plus de 5 000 pièces romaines retrouvées    Tunisiens concernés : comment bénéficier des avantages fiscaux    La BIAT élue service client de l'année 2026 : la BIAT primée pour la qualité de son service    Pourquoi se marier entre 25 et 30 ans favorise la fertilité?    France : nouvel examen civique obligatoire pour tous les étrangers dès 2026    ESET Research analyse les cybermenaces du second semestre 2025, l'IA se place au cœur des attaques    Football : la FTF reçoit le soutien de la FIFA pour ses projets clés 2025-2026    Etats-Unis : Les « visas diversité » suspendus après la fusillade de Brown    Météo en Tunisie : pluies attendues sur plusieurs régions    France : Rachida Dati visée par une enquête pour corruption    Vient de paraître : Anouar Moalla en « Témoin libre d'une époque » (Album photos)    Service Client de l'Année 2026 : Wafacash Tunisie confirme son engagement client    Elyes Ghariani - Le Style Trump: Quand l'unilatéralisme redéfinit le monde    Programme télévisé des matchs du vendredi    Rappel : nouveautés de la taxe de circulation 2026    UBCI à la première édition de «Le Bridge 25» organisée par la CCITF: un engagement fort pour l'innovation    Les Etats-Unis remettent à la Tunisie des équipements de sécurité d'une valeur de 1,4 million de dollars    Trois startups tunisiennes parmi les finalistes du programme Qualcomm «Make in Africa» 2025    Météo en Tunisie : brumes locales denses le matin, chutes de pluies éparses    Abdelaziz Kacem: "Les Arabes ne méritent pas leur langue"    Fiscalité: Des propositions concrètes de l'ITES qui changent la donne    Fête de la Révolution : la Tunisie se souvient, 15 ans après    Abdellatif Khemakhem: L'universitaire éclectique    Leila Derbel Ben Hamed, une source de fierté nationale!    Habib Touhami: Au temps glorieux de "Sawt el Arab" et du panarabisme    La Beauté du fragile: pour une philosophie silencieuse de l'instant    Mort de Peter Greene : L'acteur des rôles cultes nous quitte à 60 ans    Slaheddine Belaïd: Requiem pour la défunte UMA    La loi de finances 2026 officiellement publiée au Journal Officiel    L'appel du Sud : le voyage gourmand de Malek Labidi dans La Table du Sud    Programme JCC 2025 : salles et horaires des films et où acheter les billets de la 36ème session des JCC    Hommage à Amor Toumi: une vie dédiée à la pharmacie, à la santé publique et à l'action internationale    Météo en Tunisie : temps brumeux, pluies éparses la nuit    Comment se présente la stratégie américaine de sécurité nationale 2025    Titre    Tunisie 2027 : Capitale arabe du tourisme et vitrine du patrimoine    Match Tunisie vs Qatar : où regarder le match de Coupe Arabe Qatar 2025 du 07 décembre?    Match Tunisie vs Palestine : où regarder le match de Coupe Arabe Qatar 2025 du 04 décembre?    Des élections au Comité olympique tunisien    La Poste Tunisienne émet des timbres-poste dédiés aux plantes de Tunisie    Sonia Dahmani libre ! Le SNJT renouvèle sa demande de libération des journalistes Chadha Haj Mbarek, Mourad Zghidi et Bourhen Bssaies    Secousse tellurique en Tunisie enregistrée à Goubellat, gouvernorat de Béja    New York en alerte : décès de deux personnes suite à de fortes précipitations    Le CSS ramène un point du Bardo : Un énorme sentiment de gâchis    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Hela Ouardi : l'inévitable rançon du succès
Publié dans Leaders le 03 - 05 - 2019

J'eusse aimé voir s'instaurer, autour des livres de Hela Ouardi, le débat qu'ils méritent : serein, objectif, avec pour seule finalité l'établissement de la vérité, la justice, la justesse. Nous eûmes, hélas, un violent libelle du Pr Hichem Djaït (As-Sabah du 24 avril)auquel l'intéressée a jeté le gant.Elle invite tout bonnement son contempteur à un « duel des chevaliers » (As-Sabah du 27). Pour regrettable que soit un tel échange, beaucoup de lecteurs espèrent toujours que le grand historien acceptera d'en débattre publiquement avec celle qui le défie.
Un autre article plus malveillant encore à l'égard de Hela Ouardi vient de paraître. Je n'en citerai ni le titre ni l'auteur, j'en laisse la primeur à l'agressée. Elle saura y répondre. Il m'interpelle cependant sur un point. En substance, cet article dénie à l'auteur des « Califes maudits » toute qualité d'écriture : déjà médiocre en français, elle serait nulle en arabe ; ce ne serait pas elle qui a écrit ses livres ; elle serait sur le point d'avouer le nom du véritable auteur à qui elle ne fait que prêter son nom. C'est à Hela de répondre à ces monstrueuses allégations. Mais il est de mon devoir d'apporter mon témoignage sur sa parfaite maîtrise de l'arabe.
Elle a fait partie de l'équipe académique chargée par Beït El Hikma d'établir et d'actualiser l'incontournable et volumineuse « Chrestomathie arabe » du grand orientaliste, Antoine Isaac Sylvestre de Sacy. Le Doyen Mohamed Yaalaoui, l'académicien François Déroche, le Pr Ahmed El Ayed et moi-même avons éminemment apprécié la judicieuse collaboration du Pr Hela Ouardi à ce travail ardu, qui a duré deux ans. Parfaite bilingue, elle a fait montre d'une admirable connaissance de ses « Mu‘allaqât » et des arcanes de l'orientalisme français.
Mais il faut dire que la notoriété par trop rapide de Hela Ouardi a de quoi agacer plus d'un. Ses livres sont des best-sellers et elle vole de colloque en colloque de par l'Europe. Ce succès dérange et elle doit en payer la rançon.
Pour ma part, ces péripéties, ces débordements me font immanquablement penser au dicton tunisien « Sahib san‘atik ‘adûk » (celui qui exerce le même métier que toi est ton ennemi). Ce sentiment d'impuissance et de convoitiseface à l'intelligence effrontée est universel. En France, cela s'appelle « jalousie de métier» et c'est dans le domaine littéraire que celle-ci atteint son paroxysme. De nombreux ouvrages, des anas sont consacrés aux « haines d'écrivains ». Il y a même un dictionnaire des injures littéraires. Tous les grands noms, toutes les gloires de la littérature française, sans exception, ont subi de la part des critiques mais aussi de leurs pairs envieux de mémorables éreintements qui, au lieu de les inhiber, les ont fortement stimulés. Conscients du fait qu'un tel acharnement ajoute à leur notoriété, ils s'en accommodaient. Hugo dira :«J'ai l'honneur d'être un homme haï».
Qu'en est-il des écrivains arabes ? Même hostilité, même détestation, d'Imr'u l-Qays à Chawqi. L'illustre poète Johan Wolfgang Goethe, grand admirateur de la poésie orientale, lui rend un hommage appuyé dans son célèbre Divan occidental-oriental. Il relève une réflexion de Hafidh al-Chirazi : « Mon cœur est préoccupé par mes compétiteurs. Le conteur déteste le conteur ». Ce sera pour l'Allemand l'occasion de régler ses comptes avec ses contemporains :
Avoue ! Les poètes de l'Orient
Sont plus grands que nous, poètes d'Occident ;
Mais où nous les égalons pleinement,
C'est dans la haine de nos pareils.
Pour conclure, une anecdote mérite d'être racontée. En 1809, Napoléon Ier institua les Prix décennaux, pour récompenser les artistes, auteurs, savants et inventeurs. Trente-cinq prix devaient être décernés à chaque 10e anniversaire du coup d'État du 18 Brumaire (novembre). Les mauvaises langues y ont vu une manière de détourner l'attention de l'opinion publique des dispendieuses campagnes napoléoniennes. Ce fut la course « aux prix ». Un déferlement de haines, de médisances, remplissait les journaux et animait les coteries. L'empereur demanda à un dignitaire ce qu'il pensait de cette effervescence. « Sire, répondit-il, autrefois, on faisait se battre les bêtes pour amuser les gens d'esprit, et aujourd'hui on fait se battre les gens d'esprit, pour amuser les bêtes ».
C'est à devenir bête et cela continue ainsi, sous toutes les latitudes.
Abdelaziz Kacem
Lire :
Pierre Chalmin, Ta gueule, Bukowski ! Dictionnaire des injures littéraires, L'Éditeur, Paris, 2010.
Anne Boquel et Etienne Kern, Une histoire des haines d'écrivains : de Chateaubriand à Proust, Flammarion, Paris, 2009.
Jean-Pierre Enard, Un bon écrivain est un écrivain mort, Finitude, Le Bouscat, Gironde (France), 2005.
Jean-Marie Monod, La férocité littéraire, de Malherbe à Céline, La Table Ronde, Paris, 1983.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.