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UGTT : ce chêne qu'on ne doit pas abattre !
Publié dans Leaders le 01 - 11 - 2021

Par Azza Filali - Ce texte n'est pas une nième analyse de la situation politique qui prévaut dans le pays, ni de l'époque, possiblement charnière, que nous traversons sur le plan politique. Tant d'analyses ont été faites que je ne me hasarderai pas à en écrire une de plus. De même, ce texte ne vise ni à approuver ni à dénigrer ceux qui font et défont les évènements auxquels nous sommes confrontés chaque jour.
Plus simplement, il s'agit à la fois d'un rappel mais aussi d'un plaidoyer pour une institution publique qui accompagne le pays depuis 1924, date à laquelle un certain Mohamed Ali El- Hammi, alors âgé d'à peine vingt-quatre ans, après avoir vu capoter son projet de « mutuelle socio-économique », entreprend de créer des syndicats indépendants, destinés à défendre les intérêts des ouvriers Tunisiens. Il réunit ces syndicats sous l'appellation de « Confédération Générale des travailleurs Tunisiens. » Mais Mohamed Ali gêne le pouvoir Français ; en 1925, on l'accuse d'atteinte à la sécurité intérieure de l'Etat. Il est arrêté, jugé et condamné à dix ans d'exil. Il les passe, pour l'essentiel, en Arabie Saoudite, faisant le métier de chauffeur entre « la Mecque » et « Djeddah ». C'est là qu'il meurt mystérieusement, dans un prétendu accident de la route. Malgré cette vie brève, à peine trente-huit ans, Mohamed Ali El-Hammi a planté les germes du syndicalisme dans notre pays.
Farhat Hached, procède de manière plus progressive et plus diplomatique. Recruté par la société des transports de Sousse comme convoyeur, il crée le premier syndicat professionnel de base, qu'il affilie à la CGT française. Mais, il ne tarde pas à démissionner de la CGT, à laquelle lui et ses camarades reprochent d'ignorer les aspirations du peuple Tunisien à l'indépendance. C'est là qu'il crée les deux premiers syndicats authentiquement Tunisiens, l'un à Sfax, l'autre à Tunis. Tous deux prônent comme objectifs d'accéder à l'égalité entre Tunisiens et Français et d'obtenir l'indépendance nationale. Ainsi, le ton est donné : d'emblée et par la force du contexte socio-politique, les premiers syndicats Tunisiens, clament haut et fort que leur action syndicale se doublera d'un engagement politique. L'UGTT, fondée en Janvier 1946 par Farhat Hached et unissant les deux syndicats, du nord et du sud, à la fédération Tunisienne des travailleurs, ne déviera pas de la ligne de conduite, tracée par les premiers syndicats, à savoir allier l'action syndicale intrinsèque (consistant à défendre les intérêts des travailleurs) à une activité politique de premier plan, visant à combattre le colonialisme et restituer au pays son indépendance. Aux côtés du néo-Destour de Habib Bourguiba, l'UGTT va ainsi jouer un rôle de premier plan dans les revendications populaires qui ont commencé dès la fin de la seconde guerre mondiale.
Mais il n'y a pas eu que l'action sur terrain. Sous la houlette de Hached, l'UGTT, soucieuse d'établir l'après-indépendance, élabore un programme économique et social, établit une charte des libertés, dotant ainsi la centrale syndicale, tout autant que le mouvement de libération nationale, d'un support écrit, préparant l'avenir.
Entre 1950 et 1952, un assouplissement se profile dans les relations Tuniso-Françaises. Le premier pas vers l'autonomie interne est accompli par la constitution d'un gouvernement Tunisien, présidé par Mhamed Chenik. Toutefois, cette période ne dure pas : l'arrivée d'un nouveau résident général, Jean de Haute cloque qui reproche au gouvernement Chenik d'avoir déposé une plainte contre la France à l'Onu, durcit à nouveau les relations entre la Tunisie et la France.
Protégée par la loi sur les libertés syndicales, ainsi que par le soutien de la CISL, l'UGTT se retrouve seule à assurer la résistance contre la France. Et c'est dans les locaux de l'UGTT que sont abrités et préparés des activistes Tunisiens devant rejoindre la guérilla contre les Français. En parallèle, Hached entreprend une tournée à Bruxelles puis Washington, afin de sensibiliser les occidentaux à la cause Tunisienne.
Ce rappel historique, quoique succinct, indique que l'UGTT a toujours mené de pair son activité d'organisation syndicale, tout autant qu'un investissement politique actif ayant, sans doute, vu son apogée lors de la lutte contre la colonisation, action à double but qui s'est poursuivie après l'assassinat de Farhat Hached, par la « main rouge », au matin du 5 décembre 1952. Cette activité, autant syndicale que politique, fait que notre organisation se démarque des autres syndicats à travers le monde, par deux rôles, assumés dès sa création.
Après l'indépendance, l'UGTT a conservé son rôle de contre-pouvoir au régime du parti unique, instauré par Bourguiba. Contre le Parti socialiste destourien, Habib Achour, alors secrétaire général de l'UGTT, a publiquement contesté les décisions du gouvernement au nom de l'intérêt des travailleurs. Tenu pour responsable du fameux jeudi noir du 26 Janvier 1978, il est condamné à dix ans de travaux forcés, puis gracié en 1979. Encore une prise de position politique où l'UGTT s'oppose au gouvernement, dénonçant la cherté de la vie, qui avait alors précipité les Tunisiens dans la rue.
Sous l'ère Ben Ali, l'UGTT a connu une indéniable mise au pas, s'alignant sur les décisions du patronat et du gouvernement. Toutefois, cette mise au pas n'empêche pas la centrale syndicale de dénigrer la venue d'Ariel Sharon à Tunis, lors du sommet mondial sur la société de l'information, attitude éminemment politique. De même, au cours de la période Ben Ali, l'UGTT exerce également son activité syndicale, organisant un certain nombre de grèves sectorielles : grèves des enseignants, de la Santé Publique, etc.…
Après 2011, l'UGTT s'est frottée au pouvoir, allant même jusqu'à accepter que des syndicalistes participent au premier gouvernement de la Troïka. Mais ce phénomène fut passager et, face à la colère populaire, les trois syndicalistes- ministres démissionnent. De même, des syndicalistes se sont présentés aux élections législatives, au sein de listes indépendantes. C'est dire que la participation directe des syndicats aux deux pouvoirs, législatif et exécutif, n'a pas été couronnée de succès. Toutefois, leur participation indirecte à la vie politique du pays est un fait établi. Il suffit de citer le rôle de l'UGTT au sein du quartet, ayant mené en 2013, des négociations qui ont abouti à la chute du gouvernement d'Ennahdha, et son remplacement par celui de Mehdi Jomaa.
Résultant plus de la conjoncture historique ayant présidé à la naissance du mouvement syndical, que du choix délibéré de ses dirigeants, l'UGTT s'est vue, dès son émergence, strictement impliquée dans la vie politique du pays. Dès lors, elle a occupé une place demeurée vide, celle de contre-pouvoir qui revenait aux partis politiques : ceux-ci ont d'abord été des partis uniques intouchables, sous Bourguiba et Ben Ali, ensuite on a vu proliférer d'innombrables petits partis, émiettés, et qui en dehors du mouvement Ennahdha, n'avaient pas suffisamment d'envergure pour assurer le rôle de contre-pouvoir. En ce concerne le mouvement Ennahdha, son objectif majeur a été, dès le départ, de placer ses pions et ses intérêts, aux poste-clé de l'administration. Le mouvement ne contrecarrait (avec ruse et diplomatie) les décisions des politiques que si elles s'opposaient aux siennes propres. Tout ceci pour dire que l'UGTT représente depuis près d'un siècle et demi, le véritable contre-pouvoir qui critique, s'oppose, nuance les décisions prises par les politiques. Laisser l'UGTT assurer ce rôle est une nécessité absolue, en ces heures où rôde le spectre de la disparition pure et simple des partis politiques, tout comme celui des associations de la société civile.
Comme tous les pouvoirs, exécutif, législatif, ou les partis politiques, l'action des institutions est le fait des hommes et des femmes qui y figurent. L'UGTT ne fait pas exception à la règle. Si des erreurs ont lieu, ou que des malversations sont commises, ce sont les êtres qui en sont responsables, pas l'institution. Il est hors de question de supprimer une institution parce que les individus qui y siégeaient n'étaient que de petits malfrats, juste soucieux de leurs intérêts. Les individus doivent partir, être jugés, et recevoir des peines en rapport avec leurs méfaits. Quant à l'institution, pas question d'y toucher, elle est en dehors de tout cela. Elle se place, surtout, plus haut que tout cela.
L'UGTT a été un acteur crucial en Tunisie, lors de la lutte du pays pour son indépendance. Elle a accompagné la construction de la Tunisie Bourguibienne, en tant que partenaire privilégié, vigilant et souvent critique. Aujourd'hui, elle est une partie intégrante de notre présent et il est essentiel qu'elle le demeure ; nous avons besoin d'instances appartenant à l'Etat, et possédant la force et la longévité de l'UGTT. Nous devons donc tout faire pour maintenir notre organisation syndicale présente, active, agissante, voire même dissidente… Il est des chênes qu'il ne faut jamais abattre !


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