Imperturbable dans les moments de haute tension, coriace, et surtout, de plus en plus pragmatique, ce matheux d'origine politicien, à l'arrivée, est passé par tous les grands moments de l'Histoire de la Tunisie indépendante. De gauche au sens moderniste du terme, il a atterri à la tête du Parti socialiste et attiré l'attention des observateurs politiques, lorsqu'il a intégré l'Union pour la Tunisie, alors que ses anciens camarades chantonnaient à la Jabha. Son soutien à Béji Caïd Essebsi, et son attachement à l'action unitaire, sans compromission, font de lui un personnage proche du Prince, sans rien partager du pouvoir et ses délices. Mohamed Kilani, qui a fait les révisions parfois douloureuses, pour se trouver dans la peau d'un centriste modéré, tout en demeurant progressiste, a une analyse originale de la situation politique et les voies de sortie.... Quelques heures après le discours du 10 mai de BCE, il répond aux 3 questions, que le contexte si brûlant impose : Le Temps : Comment trouvez-vous la prestation du président, ses annonces et leur impact sur la réalité... Y aurait-il un véritable après 10 mai 2017 ? Mohamed Kilani : Il a prononcé un discours complètement théâtral, sans réponses aux attentes, 6 ans après le 14 janvier 2011. Il a même esquivé les bonnes réponses et les solutions à apporter pour sortir de la crise sociale et politique. Concernant le niveau politique, régional, la réforme du ministère de l'Intérieur, ne fera que centraliser le pouvoir de décision en commençant par les gouverneurs pour passer au sommet de l'hiérarchie. Il a glissé avec tact et doucement vers un pouvoir présidentiel pour ne pas dire présidentialiste. S'agissant de la réponse aux revendications des régions marginalisées, il est revenu à une tendance militariste qui ne colle pas au tempérament des Tunisiens. Votre parti, quel alternative propose-t-il pour amorcer une sortie honorable de l'effondrement général, des valeurs, de l'autorité, du sens du civisme et de la valeur travail ? En réponse à tout ce vide politique, qui ne résout guère les problèmes, car les bonnes paroles anesthésient les esprits sans plus, je pense que l'opposition qui ne joue encore pas pleinement son rôle doit mettre fin à son immobilisme et encore plus à certain populisme, pour regarder dans la glace.... Pour se faire, j'appelle à une conférence nationale, « les assises de l'opposition démocratique et publique » la veille des prochaines élections ». Et dans tout ce climat peu orthodoxe, vient s'ajouter la crise de l'ISIE. Vous a-t-elle étonné ? Altèrera-t-elle le processus électoral ? Quelle est la voie idéale pour sauver cette instance constitutionnelle ? - C'est une expression du pourrissement de la vie politique.