Le nouveau numéro de la revue bimestrielle «Affaires libyennes» éditée par le Centre Maghrébin d'études sur la Libye (CMEL) en arabe, français et anglais, vient de voir le jour. Editée avec le soutien de la Fondation Hanns Seidel et dirigée par Rachid Khechana, elle aligne des études historiques et sociologiques sur la Libye contemporaine et les défis internes et externes auxquels elle doit faire face. Six articles meublent la partie arabophone de ce numéro, dont une étude sur la politique de la France en Libye de 2011 à 2016 de l'historien Abdelmajid Jemal, et un article sur le harem dans les cours de Tripoli et Tunis aux 18eme et 19eme siècles signé Abdelkader Soudani. La partie anglophone comporte cinq articles portant sur le devenir de la crise libyenne et les enjeux locaux et internationaux qui y interfèrent. Quant à la partie francophone qui est la plus riche, elle comporte neuf articles d'un très haut niveau signés Paul Martial, kader Abderrahim, jean Marcou, Pierre RAZOUX, Guidere Mathieu, Antoine Coppolani, Pablo Menguy... et bien d'autres. Dans un article intitulé « Les Etats-Unis au Moyen-Orient : Evolutions et perspectives stratégiques », Antoine COPPOLANI, Professeur à l'Université Paul-Valéry (Montpellier 3) et Pierre RAZOUX, Directeur de recherche à l'IRSEM, passent au crible la politique proche orientale de l'administration Obama, avant de livrer leur lecture des grandes orientations de la politique moyen orientale de Trump. Selon eux la compréhension de l'évolution du jeu politique, diplomatique, économique et militaire des Etats-Unis dans cette région stratégique paraît d'autant plus cruciale que le Moyen-Orient semble être redevenu un espace où s'affrontent brutalement les ambitions géopolitiques contradictoires d'acteurs régionaux et globaux. « Qui aurait prédit, lors de la première élection de Barack Obama, le retour en force de la Russie et de l'Iran sur la scène régionale, de même que l'entrisme forcené de la Chine ? se demandent-ils. Et d'enchainer « Qui aurait misé sur l'isolement de la Turquie, alors que le régime islamo-conservateur de l'AKP était présenté comme un modèle de développement politico-économique pour l'ensemble de la région ? Qui aurait pronostiqué l'effondrement de la Syrie et des cours pétroliers, de même que les très grandes difficultés de toutes natures auxquelles font face aujourd'hui les monarchies du Golfe ? Qui aurait parié sur la révolution, puis sur la contre-révolution égyptienne ? Qui, surtout, aurait annoncé la progression spectaculaire du phénomène Daech et ses connexions interlopes avec certains acteurs régionaux ? ». Par bien des aspects, la situation stratégique et l'entente apparente américano-russe qui prévalent aujourd'hui dans la région rappellent le statu quo de la fin des années 1970, en pleine Guerre froide. À cet égard, il est étonnant de constater l'existence d'une ligne de démarcation d'influence qui passe par Chypre et sépare la Syrie, l'Irak et l'Iran du reste du Moyen-Orient. L'une des conséquences majeures de cette nouvelle donne, si l'on regarde la carte de la région, c'est d'observer que la Turquie se situe du côté nord de cette ligne virtuelle et qu'elle n'est plus vraiment sûre, dès lors, d'appartenir au camp occidental.