Quelque 400 médecins hospitalo-universitaires ont tiré, dans une lettre ouverte adressée au Chef du gouvernement, la sonnette d'alarme sur la situation catastrophique des hôpitaux publics, tout en appelant à la mise en œuvre d'un plan de sauvetage immédiat des ces établissements, en attendant une réforme profonde et globale du système de santé. «Nous, médecins hospitalo-universitaires, lançons (...) un cri d'alarme quant à la situation dramatique à laquelle est arrivée la santé publique. En effet, les insuffisances flagrantes des ressources matérielles et humaines, constatées aujourd'hui, ainsi que les défaillances de gestion et de gouvernance, sont à l'origine d'une dégradation vertigineuse des services de soins et des conditions de travail dans les hôpitaux, notamment universitaires », ont écrit ces médecins parmi lesquels figurent 292 professeurs et maîtres de conférences agrégés et 94 chefs de services. « Actuellement, nous vivons une crise sans précédent avec une menace sérieuse, dans un premier temps, de paralysie des hôpitaux publics, en raison principalement du déficit budgétaire (700 milliards de dettes) et du départ massif de nos médecins, puis dans un deuxième temps une dégradation des soins dans les deux secteurs ; public et privé, par défaut de personnel médical et paramédical suffisamment formé », ont-ils ajouté, rappelant que 70% des interventions de la caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM) concernent le secteur privé 30% seulement sont affectés au secteur. public Les médecins hospitalo-universitaires ont également appelé le gouvernement à se mobiliser au chevet de l'hôpital public et lui administrer des soins urgents afin d'empêcher son effondrement. « Monsieur le Chef du Gouvernement, en attendant une réforme profonde et globale du système de santé, la mise en œuvre d'un plan de sauvetage immédiat, est impérative. Elle a été exprimée par tous les acteurs du système et à différentes occasions (« Dialogue Sociétal », séminaire «Hôpital de demain», «Appel pour sauver le secteur public de la santé» signé par plusieurs organismes et associations...», ont-ils détaillé. Estimant que «les problèmes structurels des hôpitaux publics menacent non seulement le secteur de la santé publique mais aussi l'avenir de la médecine tunisienne », les médecins hospitalo-universitaires signataires de la lettre ouverte adressée au Chef du gouvernement ont plaidé, en premier lieu, pour la mobilisation de ressources additionnelles pour résoudre les difficultés financières des hôpitaux, comme cela a été possible pour les secteurs du tourisme et des banques. Ils ont aussi suggéré la mise en place de nouvelles mesures afin d'améliorer les conditions de travail et la situation matérielle des médecins universitaire, d'atténuer l'hémorragie des départs et vers l'étranger et l'exode vers le secteur privé et d'encourager les jeunes médecins à rejoindre la carrière universitaire. Les signataires de la lettre ouverte ont, d'autre part, appelé les autorités de tutelle à passer rapidement à la gestion par objectifs dans la gouvernance des hôpitaux. Ils ont rappelé dans ce même cadre que les centres hospitalo-universitaires (CHU) demeurent la pierre angulaire du système de santé national. «Partout dans le monde, la médecine académique est assurée par les structures universitaires de santé publique, à travers les trois fonctions de soins, d'enseignement et de recherche. Dans ce domaine, la Tunisie a connu des années de gloire depuis la création des facultés de médecine et des hôpitaux universitaires. La médecine tunisienne s'est ainsi distinguée par des réalisations multiples qui ont eu un impact positif sur la santé du citoyen tunisien et une reconnaissance internationale ayant permis le développement d'un secteur économique lié à l'exportation des services de santé », ont-ils fait savoir, notant que «ces acquis et notamment la santé du citoyen tunisien, sont plus que jamais menacés devant l'accumulation actuelle de problèmes structurels apparus depuis plusieurs années et l'absence de réformes adaptées ». La Tunisie compte quelque 2000 médecins hospitalo-universitaires sur un total d'environ 20.000 médecins. Cellule de crise pour mener un audit Le ministre de la Santé, Selim Chaker a décidé hier de créer une cellule de crise et de charger une équipe pluridisciplinaire de mener un audit dans les différents établissements publics hospitaliers et relever toutes les défaillances. Selon un communiqué rendu public par le ministère de la Santé, le travail de cette équipe de contrôle sera lancé au sein de l'hôpital Charles Nicolle pour concerner par la suite les différents établissements hospitaliers, universitaires et régionaux. Un rapport détaillé sera remis par la suite au ministre de la santé, rappelle la même source. Cette décision intervient à la suite d'une visite inopinée effectuée par Selim Chaker la nuit du jeudi à vendredi à l'hôpital Charles Nicolle, l'hôpital d'enfants Béchir Hamza et au service d'aide médicale urgente (SAMU), en réaction au reportage diffusé sur la chaine de télévision Al hiwar Ettounsi, dans le but de prendre connaissance des conditions d'hospitalisation des malades.