La Chambre Tuniso-Française de Commerce et d'Industrie, a organisée hier conjointement avec les autres chambres bilatérales membres du Conseil des Chambres Mixtes une rencontre débat sur les principales dispositions de la Loi des Finances 2018. Présidée par le ministre des Finances, Ridha Chalghoum, cette rencontre à réunis des opérateurs économiques et de hauts cadres du Ministère des Finances. Lors de son allocution, le président du Conseil des Chambres mixtes, Foued Lakhoua a déclaré que « depuis le 1er janvier 2018, la LF n'a cessé de faire couler beaucoup d'encre. Un tel débat vise à donner un éclairage utile et à jeter la lumière sur l'impact attendu des différentes dispositions fiscales sur l'investissement et sur les entreprises tout en reconnaissant la gravité de la situation économique. » Cette loi « a soulevé plus de questionnements que de réponses. La levée de boucliers de différentes catégories sociales et professionnelles au sujet de la majorité de mesures entrées en vigueur jugées comme injustifiées, fait montre de l'absence d'un consensus et d'une démarche participative lors de processus d'élaboration de cette loi », a-t-il encore indiqué, relevant que le Conseil des Chambres Mixtes a sollicité à plusieurs reprises aussi bien l'administration fiscale que le Ministère des Finances. Et d'ajouter : « Quelques remarques ont été faites en considération. Pour notre part et au regard des dispositions fiscales, nos sociétés membres, véritables moteurs de l'économie, expriment leur réticence. A notre sens le bâton fiscal n'est pas la solution idoine et ne permettra pas de relever les trois grands défis économiques : la maîtrise du déficit budgétaire, l'endettement, la relance de l'économie et la mise en œuvre des réformes essentielles. Il faut rappeler ainsi que pas moins de 511 mesures fiscales ont été prises depuis la révolution sans étude d'impact. A l'inverse, les inégalités fiscales atteignent leur summum. Le pouvoir d'achat des citoyens ne cesse de s'éroder sous l'effet d'une dévaluation continue du dinar, d'une augmentation continue des taux de la TVA, d'une pression fiscale hostile et d'une inflation galopante. Pour les entreprises, la LF et par le biais des mêmes mesures de rafistolage ne fait qu'aggraver la situation et pénaliser l'investissement. Hormis les nouvelles charges fiscales, il ne faut pas oublier que depuis des années, les investisseurs sont davantage pénalisés par la persistance et l'instabilité des règles juridiques et fiscales qui régissent l'investissement avec un manque de visibilité qui les empêchent de se projeter dans l'avenir et de construire leurs budgets annuels pour le plan de développement et d'investissement. Une législation fiscale changeante tous les ans, représente tout simplement un facteur additionnel d'incertitude » a souligné M. Lakhoua. Dans le même ordre d'idées, il a déclaré que d'autres solutions existent pour combler le déficit fiscal et relancer l'économie ; à travers l'élargissement de la liste des contribuables soumis à l'impôt à l'ensemble des activités de catégories professionnelles et assurer à ce titre une meilleure équité fiscale, optimiser la Caisse générale de compensation et désengager progressivement certaines participations de l'Etat dans des entreprises publiques. Face aux nombreuses interventions ayant surtout mis en cause l'instabilité du cadre fiscal et la montée de la pression fiscale sur les entreprises, Ridha Chalghoum, a estimé notamment que la situation économique actuelle nécessite un élargissement de l'assiette fiscale. « Le taux d'endettement atteint 70%, le déficit courant s'établissant à 10% cette année, le flux des investissements directs n'arrive pas à le couvrir, sans parler des signes négatifs émis chaque mois par la Caisse Nationale de Retraite et de Prévoyance Sociale. Nous nous sommes trouvés dans une situation, où nous ne pouvons plus reporter les réformes qui auraient dû être engagées depuis 10 ans au minimum. Aucun ministre des Finances ne souhaite faire passer une LF pareille, mais aucun ministre n'a hérité une situation aussi délicate et difficile que celle des finances publiques », a-t-il souligné. Par ailleurs il a relevé que la LF 2018 ne comporte aucun élément qui puisse affecter l'activité des entreprises, tout en précisant que l'augmentation des droits de douanes n'implique ni les intrants de production ni les biens d'équipement et que des mesures ont été même prises en faveur des PME, du secteur du tourisme, de l'artisanat... Selon lui le plan de relance préconisé par le gouvernement prévoit des actions visant à favoriser les Partenariats Public-Privé, et à consacrer un certain désengagement de l'Etat au profit de l'investissement privé, dans l'objectif d'alléger les charges de l'Etat. Et d'ajouter : « Le gouvernement a proposé 15 mesures visant à lutter contre l'évasion fiscale tendant à élargir l'assiette imposable de manière à alléger la pression fiscale qui est aujourd'hui de l'ordre 22%, alors qu'elle a atteint en 2014 les 23%. Dans le cadre de la diversification des ressources, l'Etat compte poursuivre le traitement des dossiers des entreprises publiques au cas par cas, pour décider d'un éventuel désengagement de l'Etat. A titre d'exemple, pour le secteur bancaire, 3 banques sont aujourd'hui concernées par les procédures de vente : Zitouna, BTE et TF Bank. L'avenir des banques publiques sera décidé en fonction des résultats de leurs plans de restructuration». Khouloud AMRAOUI Ferdinand Terbug, vice président de la chambre Tuniso- Allemande de l'industrie et du commerce : « L'investisseur revendique un minimum de stabilité fiscale » « La Tunisie a perdu sa stabilité fiscale et juridique. L'année dernière, nous avons rencontré de grandes difficultés et un nombre important d'entreprises ont quitté le pays. La pression fiscale sur les entreprises est aujourd'hui assez élevée. La nouvelle mesure douanière suscite également un flou auprès des investisseurs tunisiens et étrangers. Tout investisseur a besoin d'une structure garantissant la stabilité et la pérennité sans devoir s'inquiéter continuellement de nouveaux obstacles fiscaux et douaniers. Ainsi, au lieu d'alourdir systématiquement la charge fiscale, nous souhaitons que le Gouvernement diminue les dépenses et génère de nouvelles recettes à travers l'encouragement à l'initiative privée ».