Les négociations sociales dans le secteur public entamées le 27 avril s'annoncent extrêmement rudes. Alors que le gouvernement s'efforce de réduire la masse salariale dans le secteur public, sur recommandation du Fonds monétaire international (FMI), l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) ne l'entend pas de cette oreille. Selon les échos qui ont filtré de la réunion du groupement du secteur public tenue hier sous la présidence de Noureddine Selmi, secrétaire général adjoint de l'UGTT chargé des offices et des entreprises publiques, la centrale syndicale entend réclamer des majorations salariales identiques à celles de 2015 au profit des fonctionnaires et d'examiner les augmentations qui seront servis aux salariés des entreprises publiques «au cas par cas» en fonction des indicateurs financiers et de la situation du secteur d'activité de chaque établissement. En 2015, les fonctionnaires et les salariés des entreprises publiques ont bénéfice des majorations salariales «généralisées» allant de 50 et 60 dinars par mois et d'indemnités spécifiques d'un montant situé entre 35 et 50 dinars selon les catégories. Les revendications de l'UGTT risquent d'être rejetées par le gouvernement étant donné que la réduction de la masse salariale dans le secteur public arrive en tête des réformes que recommande régulièrement le Fonds monétaire international (FMI) aux autorités tunisiennes en contrepartie des décaissements des tranches de prêts. Soucieux de mobiliser le maximum de ressources financières en vue d'alléger les pressions qui pèsent sur les finances publiques, le gouvernement a déjà entrepris l'allègement des effectifs de l'administration en lançant deux programmes de départ volontaire et de départ négocié à la retraite. Mais ces programmes risquent de ne pas être suffisants pour réduire la masse salariale publique, qui à 14,1 % du PIB l'an dernier était l'une des plus élevées au monde. Dans son dernier rapport sur l'économie tunisienne, le FMI a d'ailleurs souligné que des ajustements importants sont nécessaires durant les trois prochaines années pour compenser les dérapages et remettre la masse salariale sur une trajectoire lui permettant d'atteindre l'objectif de 12 % du PIB en 2020. L'institution financière multilatérale a d'ailleurs estimé que les négociations sociales centralisées et sectorielles de 2015 ont conduit à des augmentations salariales incompatibles avec la trajectoire de la croissance économique du pays, et recommandé le gel des salaires dans le secteur public. Mais pour les dirigeants de l'UGTT, les autorités devraient rejeter les diktats du FMI et autres bailleurs de fonds multilatéraux afin d'éviter les retombées sociales de certaines mesures impopulaires, indiquant que «la paix sociale a toujours un coût». En raison de la forte évolution des effectifs de la fonction publique et les augmentations salariales importantes consenties depuis la Révolution, la Tunisie détient aujourd'hui, l'une des masses salariales les plus élevées au monde. Celle-ci représenté plus de 14 milliards de dinars en 2017 pour un budget global de 32 milliards de dinars. Pour rappel, la centrale syndicale et le gouvernement avaient conclu fin 2016 un accord sur les augmentations salariales dans la fonction publique, qui avait alors permis d'éviter une grève générale qui était programmé pour le 8 décembre 2016. Cet accord prévoit le versement de 50% des majorations salariales entre janvier à novembre 2017, et le versement de 50% des primes spécifiques entre avril à novembre 2017. La seconde moitié des majorations salariales (générales et spécifiques) a été, quant à elle, versée de janvier à mars 2018. Les deux parties avaient aussi convenu d'ouvrir un nouveau round de négociations sociales dans le secteur public à partir d'avril 2018.