La cité de la culture était pleine de monde venu voir à la salle de l'opéra la troisième version d'El Hadhra, un spectacle coloré et inédit composé de 26 tableaux . Ce spectacle suivi par deux mille spectateurs nous a entraînés vers une douce et sensuelle hypnose. Une scène pleine et surchauffée, où des hommes et des femmes en costume traditionnel qui interprétaient, accompagnés de divers instruments, les chants et hymnes des soufis.La vision de Fadhel Jaziri dans la Hadhra 3 n'est pas la fixation d'un folklore teinté de mysticisme et de nostalgie. C'est une continuité du passé dans le présent, qui s'ouvre sur l'avenir, mais sans rupture avec ses origines. Ce spectacle alternera entre tradition de nos aïeux et modernité des choristes et des musiques dans de nouveaux arrangements.Ce travail sur les chants soufis tels qu'ils ont été répercutés et transmis par la tradition confrérique dans les diverses zâwiyas de Tunis, exige non pas de les restaurer dans leurs formes désuètes, mais de les recomposer et de les retranscrire dans le langage de notre époque, afin d'en faire une œuvre vivante du présent. Fadhel a essayé de réinscrire le patrimoine dans la perspective d'un show soufi original. C'est un spectacle populaire dédié au public dans le sens où il est proche des gens, voué à les distraire et à les aider à dépasser les aléas de la vie.La scène artistique tunisienne en a bien besoin pour se renouveler et rompre avec le ronron habituel. Car si la monotonie est le pire ennemi de la création. El Hadhra est une nouvelle écriture scénique avec une nouvelle mise en scène, de nouvelles idées et de nouveaux acteurs. Fadhel n'a rien inventé mais il a mis ce patrimoine au goût du jour à savoir des textes qui racontent le vécu, les qualités morales et spirituelles de chaque confrérie. C'est une nouvelle conception, un nouveau concept, une autre ambiance. Le spectacle était séduisant . Le maestro et sa bande ont fait vibrer la salle au son d'instruments traditionnels auxquels Fadhel a cru bon d'inclure le saxo la guitare et même le piano, interprétés par une excellente équipe mené par Samir Ressaissi. Leurs voix et leurs mots ressemblaient parfois à des sons tirés d'instruments plutôt qu'à des sons produits par la parole. Les chants enivrants "Raies Labhar", Ellil Zahi, Al Jilani « Wa halilou" viennent s'ajouter aux instruments. La communion est immédiate avec le public. Les morceaux s'enchaînent sans temps mort. Tous ces tubes font bouger l'assistance avec ovations et applaudissements du public. Fadhel qui possède un talent remarquable pour la scène, a démontré l'étendue de son jeu.. Chanteurs, chorégraphes et musiciens y mettaient toute leur énergie et toute leur sensibilité.. Aussi, était-ce avec une aisance et un entrain remarquables qu'ils ont gratifié l'assistance de ses grands succès. Tout le monde a découvert ce soir un spectacle de haute facture. Trois générations étaient là. Vieux, adultes et jeunes s'offraient une soirée de bonheur, de partage . Ils étaient à la hauteur dans une effusion d'émotions, joie de vivre, chant et danse.